Toni Musulin, une énigme à 2,5 millions d'euros

Toni Musulin, condamné le 2 novembre 2010 à 5 ans de prison. - -
A 43 ans, Toni Musulin est un homme libre. Le convoyeur de fonds, qui avait dérobé 11,6 millions d'euros le 5 novembre 2009, est sorti dimanche de la prison de la Santé. Condamné fin 2011 par la Cour d'appel de Lyon, il n'a désormais plus de comptes à rendre à la justice.
Au terme de 11 jours de cavale, Toni Musulin s'était laissé appréhender les poches vides. Après son arrestation, la police avait mis la main sur l'essentiel du butin dérobé: 9,1 millions d'euros, jetés en vrac dans un box lyonnais. Aujourd'hui, 2,5 millions d'euros sont toujours manquants, et une information judiciaire est ouverte pour "recel".
> A la recherche des 2,5 millions perdus
Evidemment, la question est sur toutes les lèvres: quid du magot manquant? Sans réponse à ce jour, l'énigme des 2,5 millions trouve sûrement sa réponse dans le parcours du convoyeur. De cela, l'avocate de son employeur de l'époque, Loomis, en est persuadée.
"Il y a un différentiel entre le nombre de kilomètres qu'il a faits pendant sa cavale, et le trajet qu'il a décrit avoir fait", pointe Me Claudia Chemarin, interrogée par BFMTV. Est-il allé en Europe de l'Est? C'est une possibilité cohérente avec le kilométrage du véhicule."
> Un parcours parsemé de zones d'ombres
La cavale de Toni Musulin a duré 11 jours. Le convoyeur a faussé compagnie à ses deux collègues au matin du 5 novembre 2009 à Lyon, et s'est enfui avec son fourgon de la Loomis. A son bord: 11,6 millions d'euros. A la mi-journée, les enquêteurs ont retrouvé le fourgon vide.
Onze jours plus tard, le convoyeur épuisé s'est rendu de lui-même aux autorités monégasques, avant d'être remis aux autorités françaises. Interrogé, il a reconnu avoir caché son butin dans un box à Lyon, à proximité de l'endroit où le fourgon avait été retrouvé. Là, la police a retrouvé 9,1 millions d'euros.
Qu'a-t-il fait entretemps? A ce stade, les enquêteurs savent qu'il s'est rendu en Italie. L'hypothèse d'une virée en Serbie, d'où sa famille est originaire, est envisagée. Le convoyeur y a toujours des attaches et parle couramment le serbo-croate.
> Ce qu'en dit le principal intéressé
Toni Musulin, lui, a toujours contesté savoir ce qu'il était advenu de l'argent manquant. En novembre 2011, soit un an après sa condamnation, son avocat avait même mis en cause Michel Neyret, le n°2 de la PJ lyonnaise, alors mis en examen pour corruption - et en charge de l'arrestation du convoyeur.
"Il y a peut-être eu des légèretés, des erreurs, un manque de rigueur dans la gestion des scellés", déclarait alors Me Hervé Banbanaste, l'avocat de Toni Musulin. "Je n'accuse pas monsieur Neyret d'avoir fait quoi que ce soit (...). Mais on a des doutes sur la validité de la procédure et sur l'éthique avec laquelle a été menée cette affaire."
Les enquêteurs ne comptent néanmoins pas lâcher le convoyeur. Libre, sans plus aucun compte à rendre à la justice, Toni Musulin va voir ses conversations téléphoniques écoutées, ses achats vérifiés et ses déplacements surveillés.
> Pourquoi il ne sera pas inquiété
En revanche, le quadragénaire au visage poupin ne risque plus rien. "En France, on ne peut pas être désigné à la fois comme 'voleur' et comme 'receleur'", explique Dominique Rizet, consultant expert des questions justiciaires pour BFMTV. "Condamné pour le vol de la totalité de la somme, il ne peut donc pas être poursuivi pour le recel d'une partie de la somme."
Au terme de l'enquête, seule une autre personne pourrait donc être condamnée pour le recel des 2,5 millions d'euros restants. S'il s'avérait que Toni Musulin était seul en possession de l'argent, "on pourrait saisir l'argent, mais pas le poursuivre", précise Dominique Rizet.
Ainsi libéré de tout tracas judiciaire, le convoyeur, lui, a déjà songé à l'après. "Il a un projet de travail dans une entreprise de transport", a simplement indiqué Me Hervé Banbanaste, son avocat.