Olivier Lepick, expert en armes chimiques: "le risque d'attentat chimique est relativement faible"

Moins d'une semaine après les attentats qui ont touché Paris et Saint-Denis, Manuel Valls s'est exprimé devant l'Assemblée nationale afin de demander la prolongation de l'état d'urgence. Le Premier ministre y a notamment évoqué le risque que Daesh tente d'opérer une attaque à l'arme chimique ou bactériologique.
Selon Olivier Lepick, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique et spécialiste des armes chimiques, ce risque est toutefois assez faible. "Il faut rester calme. Aujourd'hui, aucune information en provenance des services de renseignement ne laisse penser qu'un attentat chimique est en préparation sur le territoire national", a-t-il tempéré sur le plateau de BFMTV.
S'il reconnaît que la publication dès le lendemain des attentats d'un arrêté au Journal officiel autorisant l'utilisation de sulfate d'atropine -seul remède en cas d'intoxication aux neurotoxiques- laisse penser "que le gouvernement aurait des informations sur la préparation éventuelle d'un attentat chimique", il doute de l'imminence d'une telle attaque.
"La difficulté de planifier et de mener un attentat chimique réside dans un certain nombre de barrières techniques, mais également logistiques. C'est beaucoup plus compliqué qu'un attentat traditionnel à la kalachnikov ou aux explosifs, ce qui explique que le risque est relativement faible", selon lui.
Le risque existe quand même
Pour mener une attaque chimique ou bactériologique de grande ampleur, il faut coupler l'agent chimique à un mode de dissémination, c'est-à-dire le militariser, explique Olivier Lepick.
"Il faut être capable de le projeter dans l'atmosphère, de l'"aérosoliser" de manière efficace, c'est très compliqué, et ce n'est aujourd'hui pas à la portée d'une organisation comme Daesh, aussi puissante et riche soit-elle", croit-il savoir.
On sait néanmoins que l'organisation État islamique dispose d'armes chimiques, notamment de gaz moutarde, qui a été utilisé le 21 août dernier dans la région d'Alep, selon l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC). Ce qui explique le fait que l'État ait choisi d'approvisionner le Samu en atropine - "Plus dans le cadre de la préparation de la COP 21 que des événements de vendredi", précise toutefois Olivier Lepick.
"Ils ont des armes chimiques, donc on ne peut pas écarter l'hypothèse d'un attentat chimique – raté, mais un attentat chimique tout de même – sur le territoire national", concède toutefois l'expert.
Mais pour lui, "à partir du moment où vous avez au sein de vos effectifs des gens qui sont prêts à mourir avec une kalachnikov à la main et à se faire sauter dans une salle de concert, se tourner vers quelque chose qui pourrait être intéressant d'un point de vue médiatique [comme une attaque chimique] reste quand même peu probable."