L'Education nationale part en guerre contre les théories du complot

Najat Vallaud-Belkacem, la ministre de l'Education nationale, souhaiter définir des outils pour lutter contre les théories du complot - Philippe Huguen-AFP
L'homme n'a jamais marché sur la Lune. Le 11 septembre est l'œuvre du gouvernement Bush. La société secrète des Illuminati dirige le monde. Ou encore les attentats du 13 novembre sont l'œuvre des services secrets. Les théories du complot pullulent sur internet et cartonnent auprès des plus jeunes. Pour y faire face, Najat Vallaud-Belkacem organise ce mardi une journée d'étude sur le thème "Réagir face aux théories du complot". La ministre de l'Education nationale réunit ainsi 300 collégiens, lycéens, étudiants, chercheurs, professeurs et psychiatres au Muséum d'histoire naturelle, à Paris, pour tenter de trouver des réponses pédagogiques et éducatives.
Pourtant, si le phénomène tend à se développer depuis ces dernières années, il n'est pas nouveau. "Des théories du complot ont conduit à tuer des gens. Par exemple, la grande période la chasse aux sorcières au Moyen-Age, ce n'est que ça. Ou encore le génocide des juifs basé avant tout sur l'idée que les juifs sont un peuple de comploteurs, qui conspirent contre le bien de l'humanité pour dominer le monde", expliquait pour BFMTV Rudy Reichstad, fondateur de l'Observatoire du conspirationnisme.
"Faire la part entre l'information et la rumeur"
Car le phénomène explose. Mi-janvier, Najat Vallaud-Belkacem a affirmé qu'un jeune sur cinq adhère à ces théories. Le gouvernement a ainsi commencé à développer des outils pour tenter de mettre en place une parade. Un compte Snapchat, une messagerie instantanée qui permet d'échanger des photos et des vidéos qui disparaissent ensuite, a été ouvert sur le sujet afin de toucher les plus jeunes. Le site internet Ontemanipule.fr a récemment été lancé pour contrer ces discours, avec un célèbre youtubeur en tête d'affiche.
La ministre de l'Education nationale reconnaissait alors que le gouvernement avait échoué à prendre le problème à bras le corps. "Ce que nous avons peut-être raté jusqu'à présent à l'école, c'est de réussir à faire le pont entre ce que le jeune découvre sur Internet, et qu'il ne sait pas trier, puisqu'il ne sait pas faire la part entre l'information et la rumeur". En fin d'année dernière, le ministère a diffusé des ressources pédagogiques à destination des enseignants et incité au développement des médias lycéens dans chaque établissement scolaire.
Ce qui change à présent, c'est la facilité d’accès à ces fausses informations. "L'avènement du multi-écrans, la facilité d'accès sur Internet à une multitude de contenus, de sources, créent une confusion dans laquelle il est parfois difficile de distinguer le vrai du faux, et d'exercer son sens critique", indique le Service d'information du gouvernement.
Une méfiance envers la parole officielle
A cette propagation ultra-rapide d'informations erronées et non-vérifiées vient s'ajouter une méfiance vis-à-vis des médias. "Les personnes qui adhèrent à la théorie du complot se méfient de la parole officielle, des médias, des politiques, des institutions, des professeurs, et pensent qu'on nous cache tout", résume pour BFMTV le journaliste et écrivain Eric Giacometti, auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet.
Si ces théories séduisent, c’est aussi parce qu'elles ont l'avantage de fournir des théories clef en main. "Vous avez tout à coup une nouvelle lecture géopolitique du monde basée sur des catégories grossières du bien et du mal, analyse le sociologue Gérald Bronner pour BFMTV. C'est une vision manichéenne du monde qui nous fait croire qu'on le comprend avec des éléments simplistes."