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Police-Justice

Procès de l'attentat de Magnanville: l'accusé estime que l'"on veut un coupable à tout prix"

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Mohamed Lamine Aberouz est jugé depuis deux semaines pour complicité dans l'assassinat d'un couple de policiers à leur domicile de Magnanville (Yvelines), perpétré au nom du groupe État islamique (EI).

Interrogé pendant près de 10 heures devant la cour d'assises spéciale de Paris, vendredi, Mohamed Lamine Aberouz n'a pas varié d'un iota dans sa ligne de défense, réaffirmant son innocence. "C'est Larossi Abballa qui a tué ces personnes", Jessica Schneider, 36 ans, agente administrative au commissariat de Mantes-la-Jolie, égorgée sous les yeux de son fils de trois ans, et son compagnon Jean-Baptiste Salvaing, 42 ans, commandant au commissariat des Mureaux, tué de neuf coups de couteau à l'abdomen.

Il est jugé depuis deux semaines pour complicité dans l'assassinat d'un couple de policiers à leur domicile de Magnanville (Yvelines), le 13 juin 2016, perpétré au nom du groupe Etat islamique (EI), Mais ce vendredi, lors de son interrogatoire sur le fond, l'accusé a soutenu qu'il n'avait en rien participé aux faits, estimant que la société veut "un coupable à tout prix".

"C'est parce que (Larossi Abballa) n'est plus de ce monde qu'on cherche un coupable à tout prix", s'est-il défendu, debout dans son box face à la cour.

Aberouz soutient "un transfert d'ADN"

Une trace de l'ADN de l'accusé a été retrouvée sur le repose-poignet de l'ordinateur portable du couple de policiers, assassinés avec un couteau de boucher par son ami d'enfance, Larossi Abballa, tué lors de l'assaut des policiers du RAID. Pour l'accusation, cet élément démontre que Mohamed Lamine Aberouz, 30 ans, était présent au domicile des policiers.

Celui-ci a de nouveau soutenu vendredi que cette trace provenait d'un "transfert" d'ADN entre la voiture de Larossi Abballa, où ont aussi été isolées des traces génétiques lui appartenant, et l'ordinateur des victimes.

"Si mon ADN s'est retrouvé (au domicile des victimes), c'est du fait de l'auteur" du crime, a-t-il dit.

La semaine dernière, des experts étaient venus dire à l'audience que cette hypothèse était peu probable sans pour autant l'exclure totalement. De la même façon, Mohamed Lamine Aberouz a réaffirmé qu'il se trouvait dans une mosquée des Mureaux le 13 juin 2016, le soir de l'assassinat des deux fonctionnaires de police. Personne, hormis certains de ses frères, n'a pu confirmer sa présence à la mosquée, mais aucun témoin n'a pu l'infirmer.

"Je reste optimiste"

Le président Christophe Petiteau soupire. "L'hypothèse de trace ADN par transfert paraît relativement réduite (...). Votre alibi est quand même assez faible", dit-il. Mais l'accusé, en veste de survêtement noire et bleue, reste imperturbable.

"Je n'ai pas participé à l'assassinat de M. Salvaing, ni de Mme Schneider", insiste-t-il. "Je n'ai pas observé le crime."

"On veut me faire porter le chapeau", s'indigne-t-il. "J'ai été interrogé de façon véhémente (par les enquêteurs) pour m'extorquer de faux aveux." "Je n'ai jamais légitimé quoi que ce soit sur la base de textes religieux comme un attentat ou un passage à l'acte violent", dit encore celui qui se définit comme "un sunnite conservateur".

"Si vous me demandez si j'approuve leurs méthodes, la réponse est non. Ils auront des comptes à rendre à Dieu, personne n'échappera à la justice divine", poursuit-il.

Dans la salle d'audience, les membres de la fratrie, dont son frère aîné Charaf-Din Aberouz, 37 ans, un temps mis en examen dans le cadre de cette enquête, suivent attentivement l'interrogatoire.

"On s'est déchargé sur moi"

Connu des services antiterroristes, Charaf-Din Aberouz a été condamné à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte terroriste après avoir tenté de rejoindre en 2011 un camp d'entrainement d'Al-Qaïda dans les zones tribales du Pakistan. Il a été soupçonné d'avoir été le mentor de Larossi Abballa qui, en 2013, avait été condamné à trois ans de prison, dont six mois avec sursis, pour "association de malfaiteurs en vue de préparer des actes terroristes".

"Mon frère faisait le coupable idéal mais après son non-lieu, on s'est déchargé sur moi", soutient encore Mohamed Lamine Aberouz.

Il doit répondre des accusations de complicité d'assassinat sur personne dépositaire de l'autorité publique, complicité de séquestration de mineur et association de malfaiteurs terroriste criminelle. Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité.

A une ultime question de son avocat Nino Arnaud, qui lui demande s'il a conscience de ce qu'il risque, il répond: "Je reste optimiste, j'ai un espoir". "J'ai fait tout ce que j'ai pu pour être franc. J'ai fourni un travail de vérité." Le verdict est attendu mercredi prochain.

M.A avec AFP