Les gardés à vue contraints de livrer leur code pour déverrouiller leur téléphone

Photo d'un commissariat (illustration) - Anne-Christine Poujoulat - AFP
Certains y voient une atteinte au droit au silence. Le Conseil constitutionnel a jugé conformes les procédures engagées contre des suspects qui avaient refusé de livrer leur code personnel pour débloquer leur téléphone portable et valide ainsi le fait que les suspects sont contraints de le donner. Une décision passée plus qu'inaperçue mais repérée par Le Monde mardi.
Saisis d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), les Sages se prononçaient sur l'article 434-15-2 du code pénal qui punit de trois ans d'emprisonnement et de 270.000 euros d'amende le refus de remettre aux autorités judiciaires "une convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie susceptible d’avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit".
Droit à ne pas s'auto-incriminer
D'après le quotidien du soir, cette disposition est apparue dans la loi antiterroriste de novembre 2001 après les attentats du 11-Septembre à New York. Mais les avocats, qui ont porté la QPC devant le Conseil constitutionnel, estiment que le fait de livrer son code de déverrouillage est contraire au droit au silence et de ne pas s'auto-incriminer consacré par la Cour européenne des droits de l'homme et inscrite dans la loi en mai 2011 avec la réforme de la garde à vue.
L'article de loi dénoncé a été répété dans la loi de 2016 portant sur le renfort de la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement. Lors de l'examen du projet de loi antiterroriste, qui a succédé à l'état d'urgence, les sénateurs ont retoqué la mesure controversée d'introduire l'obligation de fournir ses identifiants numériques lorsqu'une personne est suspectée de terrorisme. Les Sages, eux, ont estimé que la loi était conforme à la Constitution y compris pour tous les suspects.
Le Conseil constitutionnel pose une condition à cette conformité. Pour que l'obtention de ce code téléphonique soit valide, les enquêteurs ont établi que les informations contenues dans l'appareil sont "susceptibles" d'avoir été utilisées pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit (...)". L'institution de la rue de Montpensier n'a pas tranché la question des codes PIN pour le téléphone ou SIM pour la carte.