Le suspect de la tuerie de Toulouse assiégé par la police

Le principal suspect des tueries qui ont fait sept morts en France ces deux dernières semaines était toujours assiégé mercredi après-midi par les policiers dans un immeuble de Toulouse où il s'est retranché. /Photo prise le 21 mars 2012/REUTERS/Jean-Paul - -
par Jean Décotte et John Irish
TOULOUSE (Reuters) - Le principal suspect des tueries qui ont fait sept morts en France ces deux dernières semaines était toujours assiégé mercredi après-midi par les policiers dans un immeuble de Toulouse où il s'est retranché.
Mohamed Merah, un Français de 24 ans d'origine algérienne qui se revendique d'Al Qaïda, a échangé à plusieurs reprises des coups de feu avec les policiers du Raid, une unité d'élite qui tente de négocier avec lui depuis plus de 13 heures, l'opération ayant commencé peu après 03H00 mercredi.
"L'individu que nous voulons interpeller est retranché dans son appartement", a expliqué le ministre de l'Intérieur Claude Guéant. "Il a dit à plusieurs reprises qu'il souhaitait se rendre et il indiquait même qu'il se rendrait cet après-midi."
Les forces de l'ordre ont trouvé devant son domicile une voiture remplie d'armes, sur ses indications. Des produits pouvant servir à la fabrication d'explosifs ont été trouvés dans la voiture de son frère, dit-on de source syndicale policière.
L'homme a "à son actif plusieurs actes de délinquance, une petite dizaine, dont certains étaient marqués de violence", a poursuivi Claude Guéant. "Sa radicalisation s'est en revanche plutôt faite au sein d'un groupe d'idéologie salafiste et affermie, semble-t-il, lors de deux voyages qu'il a faits, l'un en Afghanistan, l'autre au Pakistan."
Son avocat, Christian Etelin, a toutefois démenti que son client ait des antécédents de violence, sauf un vol à l'arraché.
Il avait d'après lui rendez-vous en avril pour aménager une peine de prison ferme pour conduite sans permis et il aurait tenté d'intégrer l'armée mais sa candidature aurait été rejetée pour des motifs inconnus à ce jour.
Selon Nicole Yardeni, présidente pour la région Midi-Pyrénees du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), qui a participé à la mi-journée à une réunion à Toulouse avec Nicolas Sarkozy, le président a déclaré que le suspect avait l'intention de "tuer de nouveau ce matin".
Claude Guéant a précisé que le suspect avait jeté par la fenêtre un colt 45 en échange de moyens de communication fournis par la police pour négocier mais qu'il possédait encore "beaucoup d'armes", dont une kalachnikov et un pistolet uzi.
Sa mère, ses deux soeurs et ses deux frères, dont l'un évoluait également dans la mouvance salafiste selon Claude Guéant, ont été interpellés, a ajouté le ministre, ajoutant que les habitants de l'immeuble cerné avaient été évacués.
Deux policiers du Raid, un groupe d'intervention d'élite, ont été blessés et un troisième a vu son casque atteint par une balle, a-t-on appris de même source.
SÉJOURS EN AFGHANISTAN
Nicolas Sarkozy, qui s'est rendu à Montauban (Tarn-et-Garonne) pour rendre hommage aux trois militaires tombés sous les balles du tueur au scooter après être passé par Toulouse, a parlé lors de la cérémonie d'"exécution terroriste".
"Ces crimes ne demeureront pas impunis", a-t-il dit en demandant d'éviter l'"amalgame" et la "vengeance".
Une gigantesque chasse à l'homme a été engagée lundi après le meurtre d'un rabbin et de trois enfants dans une école juive de Toulouse. La semaine précédente, trois militaires ont été abattus de sang-froid, selon le même mode opératoire, l'un à Toulouse et deux autres à Montauban.
A chaque fois, l'auteur des coups de feu mortels est arrivé en scooter et a visé ses victimes à la tête.
La mère du suspect a été amenée sur les lieux mais n'a pas souhaité entrer en contact avec son fils.
L'opération a été lancée aux alentours de 3h00 du matin mercredi dans le quartier résidentiel de la Côte Pavée, dans l'est de Toulouse. Le suspect est retranché dans un immeuble de cinq étages des années 1970 qui tranche avec le reste des habitations, des petits pavillons.
La rue Sergent Vigné où se trouve cet immeuble se situe à quelques centaines de mètres à peine du lieu du premier meurtre d'un militaire, le 11 mars dernier, et de l'école juive où quatre personnes ont trouvé la mort lundi dernier.
"C'est un quartier calme", a déclaré une voisine, Cathy Fontaine. "Il y a une crèche là, des écoles derrière, c'est vraiment un quartier très cosmopolite en plus."
RISQUE FONDAMENTALISTE SOUS-ESTIMÉ ?
Le recteur de la Grande mosquée de Paris s'est dit abasourdi que l'auteur présumé des tueries se réclame d'une mouvance islamiste intégriste dont il a souligné qu'il pensait qu'elle était "neutralisée dans notre pays".
"Ce que je peux dire c'est l'abasourdissement, c'est véritablement la surprise la plus totale que (...) tous ces méfaits inqualifiables qui ont lieu depuis une dizaine de jours soient d'une mouvance intégriste, djihadiste et de type terroriste dont on croyait qu'ils étaient cadrés et neutralisés et en tout cas complètement inoffensifs dans notre pays", a-t-il déclaré sur i>télé.
La présidente du Front national Marine Le Pen a placé l'affaire sur le terrain politique en réclamant la guerre contre les fondamentalistes et en affirmant que la France payait le prix de son engagement militaire en Afghanistan.
"Je crois que le risque fondamentaliste a été sous-estimé dans notre pays, que des groupes politico-religieux se développent face à un certain laxisme", a dit sur i>télé la candidate du FN à l'élection présidentielle.
Avec Patrick Vignal à Paris, édité par Yves Clarisse