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Police-Justice

L'homme qui s'était fait passer pour un lord irlandais pour escroquer Dany Boon, condamné à 5 ans de prison

Dany Boon le 22 février 2025 à Bruxelles aux "Magritte du cinéma"

Dany Boon le 22 février 2025 à Bruxelles aux "Magritte du cinéma" - HATIM KAGHAT / BELGA MAG / Belga via AFP

Il s'était fait passer pour un riche lord irlandais pour escroquer Dany Boon de plusieurs millions d'euros. L'homme, jugé ce vendredi à Nice, a écopé de 5 ans de prison.

Il se faisait passer pour un lord irlandais passionné de voile et a réussi à escroquer des millions d'euros à l'acteur et réalisateur Dany Boon: le tribunal correctionnel de Nice l'a condamné vendredi à cinq ans de prison.

Dans son box de prévenu, il s'exprime d'un ton clair et posé, le débit assuré. Il reconnaît les faits, mais assure qu'il n'avait pas au départ l'intention de s'envoler avec les fonds qui lui ont été confiés.

En face, Dany Boon n'a pas fait le déplacement, représenté par son avocat. L'escroc a été condamné à lui rembourser 4,8 millions d'euros avec intérêts.

Début 2021, sur les conseils du skipper Marc Pajot, qui a perçu une commission pour la mise en relation mais n'a pas été inquiété par la justice, la star a confié à l'escroc la gestion d'un voilier de 20 mètres encore en construction.

L'homme se présente alors comme un lord irlandais, avocat en costume trois-pièces et chapeau mou, rosette à la boutonnière, avec une page Wikipédia le décrivant aussi comme propriétaire terrien et planteur jamaïcain. Ses parents sont morts dans un accident d'hélicoptère dans le Connemara lorsqu'il avait 9 ans, évoquait le Guardian en août dernier. Il dit posséder deux yachts et une propriété de 17 chambres dans le comté de Cork en Irlande.

Faux documents

Titulaire - réellement - d'une licence en droit maritime et passionné de voile, il est également skipper, propriétaire de deux bateaux et membre du Royal Cork Yacht Club.

Il avait cependant déjà passé six mois en prison pour escroquerie: en 2012, pendant ses études de droit, il avait vendu à un notaire de faux documents incriminant un associé honni, et proposé la même chose à l'associé.

En mars 2021, il crée pour Dany Boon une société basée à Antigua - "une solution légale, efficace et discrète", explique-t-il au tribunal - pour la gestion du voilier. L'acteur verse alors 2,2 millions d'euros pour financer la fin de l'acquisition et l'entretien du navire.

Une relation de confiance s'instaure et en juillet 2021, quand l'escroc lui propose un montage rémunérateur, avec un prêt d'une banque belge et un placement en bons du trésor irlandais via la société basée à Antigua, Dany Boon verse 4,5 millions d'euros.

L'acteur explique qu'il voulait financer ainsi l'achat d'un voilier plus grand. L'escroc relève que l'acteur n'avait même pas encore navigué sur son premier voilier et assure que ce placement avait d'abord des motivations fiscales.

Parti aux Bahamas

Des "insinuations mensongères", pour les avocats de Dany Boon, qui rappellent que les autorités ne contestent pas qu'il ait "toujours agi dans le strict respect des lois et règlements".

En novembre 2021, quand l'escroc annonce à l'acteur qu'il va céder son activité à une famille romaine - issue de son imagination -, ce dernier réclame le rapatriement de ses fonds.

S'ensuivent des mois d'échanges de sms, où l'escroc temporise, expliquant que les fonds sont bloqués par une banque coréenne ou par la duplicité des repreneurs.

En réalité, les fonds sont partis dès l'été vers des comptes à Monaco ou Singapour ou dans des achats de produits de luxe. L'escroc et son ex-femme sont d'ailleurs poursuivis à Monaco pour blanchiment dans le cadre de cette affaire.

Au passage, l'escroc a aussi emporté avec lui près de 900.000 euros, issus de la vente d'un yacht, qu'une Ukrainienne encore conseillée par Marc Pajot avait fait transiter par sa société.

Parti aux Bahamas quand Dany Boon a porté plainte en 2022, l'escroc a finalement été arrêté au Panama en février 2024 et extradé l'été suivant vers la France.

Devant le tribunal, il assure qu'il a mis neuf millions d'euros à l'abri au Panama ou dans les îles du Pacifique, via "des structures complexes" qu'il est le seul à pouvoir démêler pour dédommager les victimes, à condition de pouvoir se rendre lui-même sur place.

"Le concept même de ces banques, c'est la dissimulation des actifs", insiste-t-il, sourire indulgent aux lèvres, face à la présidente dubitative.

Depuis sa cellule à Nice, où il fait office d'écrivain public pour ses co-détenus et poursuit des études en architecture navale, il a quand même réussi à créer une société immatriculée en Floride et à y envoyer 5.000 euros provenant du Belize.

Le parquet avait requis six ans de prison.

M. R. avec AFP