BFMTV
Police-Justice

Hormone de croissance: ouverture d'un procès au civil

Hormone de croissance: ouverture d'un procès au civil

Hormone de croissance: ouverture d'un procès au civil - AFP - Loïc Venance

Trente ans après les faits, la cour d'appel de Paris devra déterminer si le professeur Fernand Dray et l'ancienne pédiatre Élisabeth Mugnier ont commis une faute qui a pu conduire à infecter des centaines d'enfants.

Trente ans après les faits, le drame de l'hormone de croissance revient devant la justice: la cour d'appel de Paris examine depuis lundi la responsabilité civile de deux scientifiques dans ce scandale de santé publique.

Après deux procès et une relaxe générale, personne n'ira plus en prison. Mais il reste une possibilité pour les familles des victimes de voir leurs souffrances reconnues, en obtenant des dommages et intérêts. La cour d'appel devra déterminer si le professeur Fernand Dray et l'ancienne pédiatre Élisabeth Mugnier ont commis une faute qui a pu conduire à infecter des centaines d'enfants.

Le professeur Dray, 93 ans aujourd'hui et absent à l'audience pour raisons de santé, dirigeait le laboratoire Uria, rattaché à l'Institut Pasteur et chargé d'élaborer la poudre d'hypophyse (la glande qui produit l'hormone de croissance). Elisabeth Mugnier (66 ans) assurait la collecte des hypophyses sur des cadavres. Assise au deuxième rang, elle a écouté avec attention le rappel des faits. Plusieurs des cadavres collectés étaient infectés par la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ).

"On est là pour la mémoire de nos enfants"

Entre 1983 et 1985, 1.698 enfants en insuffisance hormonale ont été traités par injection à partir de prélèvements contaminés: 125 sont morts, d'autres risquent encore de tomber malades, le temps d'incubation dépassant les 30 ans. "On est là pour la mémoire de nos enfants, et pour tous ceux qui sont encore là, et qui attendent dans l'angoisse", a déclaré Michèle Jolivet, dont le fils Emmanuel est mort à 29 ans, le 18 juillet 2000, après "six mois de souffrances". Son mari, Alain, attend "qu'il y ait une punition" sanctionnant ce "désastre" pour la santé publique.

L'alerte n'est lancée qu'en 1991, avec une première plainte en France, alors que depuis des années déjà, le traitement à l'hormone de croissance extractive est interdit aux États-Unis et dans plusieurs pays européens. Lors des premiers procès (2008 et 2010) les débats avaient largement porté sur l'état des connaissances scientifiques à l'époque, pour conclure qu'on ne pouvait reprocher au professeur Dray de ne pas avoir eu "l'intuition d'un risque de contamination" qu'aucun professionnel n'avait alors prévu.

Quant à Elisabeth Mugnier, elle avait été considérée comme un coursier n'ayant pas de responsabilité dans l'organisation des prélèvements. La Cour de cassation avait relancé l'affaire en janvier 2014, considérant que l'extraction et la purification de l'hormone "entraient dans la préparation" d'un médicament et n'auraient pas dû être pratiquées par le laboratoire Uria.

la rédaction avec AFP