Enquête, renforts policiers... Ce que l'on sait de la violente rixe survenue au tribunal de Bordeaux

La cour d'assises de Gironde dans le centre ville de Bordeaux - Google street view
Une violente bagarre a éclaté ce lundi 12 mai en début de soirée dans l'enceinte de la cour d'assises de la Gironde en marge du procès de huit suspects, dont trois jeunes hommes jugés pour "meurtre en bande organisée" après la mort de Lionel.
Cet adolescent de 16 ans a été tué le 2 janvier 2021 dans une fusillade sur fond de rivalité entre deux quartiers bordelais distants de deux kilomètres dans le nord de la ville: Les Aubiers où il résidait et Saint-Louis Chantecrit. Ce jour-là, il vendait des pâtisseries pour partir au ski, lorsque des tireurs ouvraient le feu au fusil automatique au pied de son immeuble.
Si trois mineurs, âgées de 13 à 16 ans, s'étaient réfugiés grièvement blessés dans les bâtiments à proximité, Lionel est lui resté inanimé au sol, touché par deux balles dont une dans le thorax.
• Une bagarre d'une vingtaine d'individus dans la salle d'audience
À 19 heures ce lundi, alors que l'audience venait d’être suspendue, une vingtaine de personnes des deux groupes rivaux se sont distribué coups et insultes dans la salle des pas perdus et en salle d'audience du tribunal de Bordeaux.
Des vidéos diffusées par Sud-Ouest et ici Gironde montrent des heurts à l'entrée du lieu judiciaire, au niveau des portiques de sécurité.
Selon Me Yann Herrera, avocat de la famille de Lionel, plusieurs individus étaient venus quelques minutes plus tôt en audience "au compte-goutte", avant d'échanger "des mouvements de sympathie avec les accusés" de Saint-Louis Chantecrit, ce que la présidente a alors désapprouvé.
"On a vu arriver une dizaine d'individus tous vêtus de noir, physiquement très impressionnants. Alors que l'audience s'était tenue dans un climat plutôt apaisé, une espèce de chappe de plomb s'est installée", raconte-t-il à BFMTV.
"À la sortie, les individus se sont mélangés aux habitants des Aubiers et (...) ont commencé à taper dans le tas. Ils sont passés par dessus les tables, c'était totalement anarchique", poursuit-il. Certains portaient des gants coqués selon des témoins.
"Une horde d'une vingtaine de personnes se sont notamment rués sur mon client, qui a été blessé à l'épaule", décrit à son tour l'un des avocats des accusés qui comparaissait libre, Me Grégoire Mouly. "De ma vie d'avocat, je n'ai jamais vu un tel déferlement de violence dans une salle d'audience", pointe ce dernier.
• Une enquête ouverte après des "incidents graves"
"À l'issue de la première journée d'audience, des incidents graves ont eu lieu dans la salle d'audience et la salle des pas perdus de la cour d'appel, entraînant en particulier des blessures sur les fonctionnaires de police intervenus pour ramener l'ordre", écrit la cour d'appel dans un communiqué.
Une enquête a été ouverte par le parquet de Bordeaux pour déterminer les circonstances de la rixe. La cour d'appel précise qu'il n'y a "pas encore d'interpellation", alors que l'on procéde mardi matin à "l'exploitation des vidéos et témoignages".
"Qu'il y ait des affrontements dans la salle des pas perdus, cela peut arriver même si c'est consternant, on l'a déjà vu. Mais les gens ont commencé à revenir paniqués et cela a dégénéré jusque dans la salle d'audience où une vingtaine de personnes se sont battus. De mémoire d'avocat, c'est sans doute le moment qui m'a le plus choqué", ajoute de son côté Me Yann Herrera.
• Jauge réduite de moitié et renforts policiers pour la suite du procès
Sur les images filmés pendant la bagarre, on entend une femme hurler: "Ils sont où les policiers?". Le manque d'effectifs de forces de l'ordre a été souligné par les différentes robes noires après l'incident.
"On savait que c'était une audience à haute tension, nous avons demandé des renforts, on ne les a pas eus", confirme une habitante des Aubiers auprès d'ici Gironde.
La cour d'appel de Bordeaux a indiqué que l'audience prévue jusqu'au 23 mai "se poursuivra jusqu'à son terme sous surveillance renforcée". Selon nos informations, il y aura une "limitation du nombre de personnes admises en salle d’audience" couplée avec une "augmentation de la sécurité et du nombre de policiers présents".
Les parents de l'adolescent tué ont fait part de leur "colère" mardi matin contre ceux "qui ne respectent pas la mémoire" de leur fils. Le procès a repris dans le calme mardi matin mais avec une jauge réduite de moitié et des renforts policiers.
"Il faut leur faire comprendre qu'on n'est pas dans un pays sans lois. On compte sur la justice pour que le verdict qui sera prononcé fasse écho dans les quartiers, pour qu'il n'y ait pas d'autre Lionel", a dit le père de la victime.