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Police-Justice

Calais: qui se cache derrière le collectif des No Border?

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- - Philippe Huguen - AFP

Après les violences lors des manifestations de migrants à Calais, les autorités ont pointé du doigt le collectif anticapitaliste No Border, présent sur place depuis 2009, et dont les contours restent volontairement flous. Une seule certitude, ils militent pour l'abolition des frontières.

Calais, où stationnent dans un bidonville de la périphérie 4.000 réfugiés désireux de passer en Grande-Bretagne, a connu un week-end de tension, avec samedi une action spectaculaire de migrants qui sont parvenus à monter sur un ferry dans le port. Et, dimanche, une manifestation de commerçants en présence d'élus.

Mais derrière les migrants pointés du doigt, les No Border sont accusés par les autorités, le président de la région Xavier Bertrand en tête qui demande des "sanctions", d'être l'allumette qui a enflammée la contestation. Qui sont-ils? 

"L'ouverture des frontières à tous et à toutes"

Il s'agit d'un mouvement anticapitaliste, composé d'activistes provenant de toute l'Europe, qui s'est formé en Allemagne dans les années 1990. Il est présent à Calais depuis 2009, lors de la première "jungle", écrit L'Obs qui a enquêté sur l'organisation en 2015 après des affrontements. On y trouve principalement des Britanniques, des Belges, des Italiens, des Hollandais et des Allemands.

Mais les choses ne sont pas aussi simples au moment de les condamner, 35 ont été interpellés à Calais samedi, puisque le mouvement n'a aucun chef connu et ne répond à aucune charte collective.

"Un No Border réclame l'ouverture des frontières à tous et à toutes. Point barre. La libre circulation des personnes mise sur papier par les accords de Schengen était un début de réalisation de leur utopie mondiale à grande échelle. On ne peut pas dire que cela soit une idée d'extrême-gauche puisqu'elle a été produite et mise en application par des politiques libérales de droite", écrit un membre du collectif sur Mediapart pour expliquer leurs motivations.

Au nom du même principe de liberté de circulation, ils prônent l'arrêt des expulsions, la régularisation des étrangers en situation irrégulière et la fermeture des centres de rétention.

Un parallèle avec les Black Blocs

Les autorités leur reproche notamment d'utiliser une tactique dite de Black Blocs, ce groupuscule international qui intervient lors des G20, des G8 ou récemment lors de la COP21 de Paris fin 2015. Quitte à être caricaturés par le gouvernement, qui assurait que leur but est d'alimenter des dérapages lors des manifestations pour déstabiliser les institutions.

"Il y a des militants No Borders qui ont été identifiés (...) qui profitent du désarroi, de la détresse de ces migrants, qui instrumentalisent cette détresse, et les poussent à faire n'importe quoi", avait par exemple déclaré en novembre 2015 le porte-parole du ministère de l'Intérieur.

Ceux qui les côtoient décrivent un mouvement plutôt hétéroclite: certains évoquent des jeunes marginaux, d'autres de jeunes universitaires très politisés, venant de milieux aisés.

Une aide à la limite de la légalité?

En outre à Calais, la maire de la ville Natacha Bouchart (Les Républicains) a jugé que les No Borders étaient accompagnés des groupes antifascites de la région. Car la question de leur nombre sur place n'est pas claire. Loin de là. Une dizaine, assurait un militant à Europe 1 quand les autorités évoquent parfois 6.000 personnes rien que dans le Pas-de-Calais.

Reste la question de la statue du général de Gaulle taguée samedi. Pour le moment la responsabilité des No Borders n'est pas confirmée.

Mais réduire leur action à la violence ne suffit pas puisque d'après les témoignages et les reportages - celui de l'Obs cité plus haut par exemple - sur place, les activistes militants aident aussi les migrants à s'installer et à entreprendre des démarches administratives grâce à leur bonne maîtrise du droit. Des actions, parfois à la frontière de la légalité, qui créent aussi des tensions avec les associations locales.

Samuel Auffray