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Cinéma

"La France a eu une telle importance dans ma vie": pourquoi Robert Redford aimait tant Paris

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Mort ce mardi à l'âge de 89 ans, l'acteur et réalisateur américain n'a jamais caché son goût pour l'Hexagone. Un amour que le public français lui a bien rendu.

Une ovation de près de deux minutes et, au centre de la scène, un Robert Redford tout ému, costume élégant et sourire pimpant, quoique un peu gêné, qui tente de remercier la foule (le gratin du cinéma tricolore). En 2019, l'acteur et réalisateur, décédé ce mardi à l'âge de 89 ans, recevait un César d'honneur pour l'ensemble de son œuvre, confirmant (s'il le fallait encore) que le public français l'appréciait, sinon l'adulait, tout particulièrement. Et c'était largement réciproque.

"J'adore Paris, j'ai toujours aimé Paris, lance l'octogénaire devant le parterre de stars réunies ce soir-là à l'Olympia. Je suis venu ici à l'âge de 18 ans, j'étais un jeune artiste, je voulais tenter de nouvelles expériences, je n'avais pas d'argent, que de l'espoir."

Et l'acteur américain de raconter une anecdote savoureuse: "Avant de quitter l'Amérique, je me suis acheté un béret pour avoir l'air Français en arrivant à Paris. Mais un beau jour, alors que j'étais avec un groupe d'artistes français, un Américain est venu me voir pour me demander si je n'étais pas un touriste américain. Moi qui voulais m'intégrer au maximum, c'était plutôt raté. J'ai dû me débarrasser du béret."

"En vieillissant, le temps passe plus vite"

À l'époque, seul avec son carnet de croquis dans la capitale, le jeune Robert Redford aimait, comme Hemingway ou Henry Miller avant lui, se poser dans des cafés, regarder les gens, les dessiner et imaginer ce qu'ils se racontaient. "Sans amis, c'est comme cela que j'occupais mon temps à Paris", confie-t-il sur la scène des 44e César.

"Après cela, je suis allé à Cannes en auto-stop. Comme je ne pouvais pas me payer grand-chose, j'ai dormi à la belle étoile sur un sac de couchage, sous une jetée, et j'ai entendu des rires qui venaient de l'hôtel du Carlton, poursuit-il. Je me suis demandé: 'Qu'est-ce que ça doit être d'être dans cet hôtel et de s'amuser comme cela, habillé sur son 31?'"

Dix-sept ans plus tard, l'acteur, devenu une icône revient sur la Croisette, cette fois en tant que participant. "Je suis descendu à ce même hôtel et, alors que je regardais la mer, je me suis souvenu la fois que j'avais dormi sur la plage." Et de conclure, en grand sage: "En vieillissant, le temps passe plus vite. Tout d'un coup, l'avenir se change en passé, demain devient hier."

"Un endroit plus libre"

Un peu plus tôt, en 2013, Robert Redford avait déjà évoqué son arrivée à Paris au micro de Nikos Aliagas sur Europe 1. "Je n'ai jamais été tout à fait à l'aise, tout à fait chez moi, là où j'ai grandi, à Los Angeles. Tout petit oui, parce qu'il y avait des grandes zones de verdure, pas de gratte-ciel ni d'autoroute. Mais tout a changé après la Seconde Guerre mondiale, lorsque l'argent est venu en masse dans le pays. Je n'avais alors plus envie de rester dans cette ville."

Il évoquait aussi son expérience parisienne, pour échapper, disait-il, "aux confins de la vie américaine".

"Je voulais aller dans un endroit plus libre, plus neuf, et c'est ce que j'ai trouvé à Paris. C'est là que ma vie d'adulte a commencé, raconte l'acteur. J'ai quand même dû rentrer aux États-Unis parce que je n'avais plus d'argent, mais je n'en avais plus envie. C'est pourquoi la France a eu une telle importance dans ma vie."

Signe de reconnaissance suprême, la star californienne avait même reçu la Légion d'honneur des mains de Nicolas Sarkozy en 2016. "Vous incarnez les États-Unis et tout ce que ce pays représente", lui avait alors lancé l'ancien président français. Un hommage avant l'heure.

Estelle Aubin