Orages à Paris: pourquoi les rues de la capitale sont-elles inondées si facilement?

Des scènes d'inondations désormais courantes dans la capitale. Les orages qui se sont abattus sur la France, ce mercredi 25 juin, n'ont pas épargné Paris et l'Ile-de-France, où le bilan matériel des intempéries fait état de véhicules sinistrés, mais surtout de rues inondées pendant quelques heures.
Avec parfois plusieurs dizaines de centimètres d'eau dans les rues, rendant la circulation de véhicules compliquée, les Parisiens ont une sensation de déjà-vu après les épisodes orageux de mai dernier.
Ce n'est effectivement pas la première fois que les rues sont inondées après un épisode de fortes précipitations, comme celui de mercredi soir. Certains grands axes sont régulièrement sous les eaux après des orages intenses et l'urbanisme de la capitale n'y est pas étranger.
À Paris, on parle de ville imperméable, du fait de son urbanisme. Les rues parisiennes, principalement recouvertes de béton ne permettent pas à l'eau de s'infiltrer dans les sols. Plutôt que de s'y infiltrer, l'eau va ruisseler en surface, vers des réseaux souterrain. En 2025, 74% du territoire parisien est imperméable. L'objectif de la ville est d'abaisser cette donnée à 60%, d'ici à 2050.
Par effet physique, lorsque des trombes d'eau, plus communes en été, s'abattent, impossible que cette grande quantité s'infiltre dans les sols, comme cela peut être le cas en nature. L'eau tombée du ciel se retrouve en surface, difficile à écouler, ce sont les ruissellements pluviaux. Un risque "sous-estimé" selon l'Institut Paris Région.
L'agence d'urbanisme rappelle que 88% des événements enregistrés depuis 1982 donnant lieu à des arrêtés de catastrophe naturelle "inondation" (arrêtés CatNat) en Île-de-France peuvent être rattachés à des phénomènes de ruissellement.
"C'est une gêne, mais tout Paris n'est pas concerné"
Et à Paris, les inondations par ruissellement s'expliquent d'abord pour une chose: la gestion des eaux usées et pluviales par un même réseau, le réseau "unitaire". "En cas de fortes pluies, le réseau d’égouts peut être saturé, l’excédent déborde alors en surface ou se déverse dans la Seine", explique l'Agence Parisienne du Climat (APC), dans un rapport sur les risques d'inondations à Paris publié en juillet 2024.
Pour Ludovic Faytre, responsable des études risques et aménagement à l'Institut Paris Région, les inondations comme celles de ce mercredi à Paris n'ont rien d'alarmantes et ne signifient pas que la ville est condamnée à avoir les pieds dans l'eau à chaque épisode orageux.
"Les intempéries observées [mercredi 25 juin NDLR] ne sont pas des inondations majeures. [...] C'est une gêne, mais tout Paris n'est pas concerné. Il s'agit d'un événement exceptionnel difficile à gérer, mais qui peut être plus récurrent à cause du réchauffement climatique", nuance l'urbaniste auprès de BFMTV.com.
Bien qu'il ne néglige pas que certains axes soient régulièrement touchés par les eaux, l'expert invite à se questionner sur leur topographie (les reliefs, les distances, ou encore les structures présentes). "S'il y a des inondations à répétition à ces endroits, dans ce cas, il sera peut-être judicieux de réfléchir à des solutions", ajoute-t-il.
Pour l'heure, aucune donnée quantifiable ne permet de définir quels axes sont les plus victimes de ces inondations lors d'épisode orageux. Toutefois, les relevés de pluviométrie parisiens confirment les affirmations du Giec selon lesquelles les orages deviennent de plus en plus intenses en pluie.
"Mais on ne sait pas encore où ces eaux vont s'accumuler. Il faut des données plus précises [pour agir]", explique Cécile Gruber, directrice des Transitions et de la communication au sein de l'Agence Parisienne du Climat.
Revêtements perméables, végétalisation, récupération...
Quid des solutions mises en place? Quelques jours après les intempéries liées au passage de la tempête Kirk en octobre dernier, la mairie de Paris a dévoilé un plan pour faire face à ce genre d'intempéries avec notamment des réservoirs chargés de récolter les eaux de pluie. Une installation dans la continuité de son plan ParisPluie, qui prévoit l'intégration dans chaque nouveau projet immobilier de solutions alternatives au rejet dans le réseau d’assainissement.
Pour l'Agence Parisienne du Climat, certaines solutions sont à aller chercher dans la nature (végétalisation des toitures, renaturation des sols, revêtements perméables...). Des solutions qui ne permettent en réalité que de limiter les trombes d'eau qui inondent certaines rues.
"Elles ne suffiront néanmoins pas à supprimer le risque d'inondation pendant des pluies exceptionnelles: il faut donc rester vigilant et protéger les bâtiments à risque, limiter l‘urbanisation dans les zones les plus sensibles ou encore développer le concept de "rues rivières", conçues pour devenir des lits temporaires et guider l’eau de ruissellement", écrit l'APC.
Des travaux réalisables dans un futur proche? "Il y a une vraie prise de conscience à Paris, mais transformer la ville ne se fait pas aussi rapidement", ajoute Ludovic Faytre.
Invité à réagir, le service urbanisme de la ville de Paris n'a pour le moment pas donné suite à nos sollicitations.