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"On nous a vendu du rêve": les usagers du RER E excédés par les nombreux problèmes sur la ligne depuis son prolongement

La gare de RER E d'Ozoir-la-Ferrière (Seine-et-Marne), le lundi 4 novembre 2024.

La gare de RER E d'Ozoir-la-Ferrière (Seine-et-Marne), le lundi 4 novembre 2024. - BFMTV

Le 6 mai 2024, le prolongement du RER E entre Paris et Nanterre ouvrait officiellement aux voyageurs après une inauguration en grande pompe. Une extension grandement attendue par les usagers qui déchantent aujourd’hui à cause des nombreux soucis qui touchent la ligne.

Retards, annulations et pannes.. C’est désormais le quotidien des usagers du RER E depuis le prolongement de la ligne jusqu’à l’arrêt Nanterre-la-Folie. Pour ce faire, la SNCF et Île-de-France Mobilités n’ont pas lésiné sur les moyens et sur les promesses.

Présent pour l'inauguration, le 3 mai dernier, Gabriel Attal, alors Premier ministre, avait assuré que cette extension était un "pas de géant pour des millions de Français", du "temps de vie gagné" mais aussi "des opportunités nouvelles".

Le prolongement du RER E est en réalité totalement effectif depuis le 15 décembre avec des trains en circulation toute la journée. L'ensemble des trains en provenance de l’est de l'Île-de-France sont désormais à destination de Nanterre-la-Folie.

Plusieurs incidents par semaine

Sur le papier, cet aménagement devait faciliter la vie de nombreux Franciliens en permettant aux habitants de l’est de la région de rejoindre directement le quartier d'affaires de La Défense, à l'ouest de la capitale.

De son côté, la SNCF estimait même que cette nouvelle version de la ligne E devait transporter 650.000 voyageurs par jour contre 370.000 avant les travaux. Un peu plus de trois mois depuis l'ouverture, la réalité est moins reluisante que celle promise.

"Depuis le prolongement, les voyageurs nous ont fait remonter une augmentation importante des incidents sur la ligne", indique à BFMTV.com, Ghizlaine Guessous, référente de l'association d’usagers Plusdetrains.

"Il y a plusieurs incidents par semaine sur toute la ligne et certaines interruptions ne sont même pas indiquées en avance. Des usagers arrivent donc avec plusieurs heures de retard au travail", ajoute-t-elle.

Ce mardi 11 février, le trafic a une nouvelle fois été perturbé à cause d'une panne sur un train en gare de Pantin.

Un problème technique qui a causé un attroupement des passagers sur les quais de la gare. "Grâce à vous (RER E NDLR) j’ai fait une petite balade dans Pantin très sympa! Mon boss est moins fan des 30min de retard…", a écrit sur le réseau social X, une usagère bloquée par cette perturbation.

Des perturbations qui rappellent le RER B

Depuis le prolongement, le RER E dessert désormais des points névralgiques de la vie professionnelle de l’Île-de-France.

"Il dessert les trois grands pôles professionnels parisiens en s’arrêtant à la Défense, à Rosa Parks et à Haussmann. Donc, forcément, c’est une déception pour les salariés qui avaient beaucoup d'attentes", souligne Ghizlaine Guessous.

Pour les usagers de Seine-et-Marne, du Val-de-Marne ou de Seine-Saint-Denis, ces nombreux problèmes sont des nouveaux vecteurs d’angoisse.

"Certains retrouvent l'inquiétude du RER B. Des gens qui habitent en banlieue nous disent qu’ils se demandent comment ils vont rentrer le soir”, relate Ghizlaine Guessous à BFMTV.com.

Une angoisse que ne s'est pas dissipée, ce mardi 11 février, car les usagers de la gare de Villiers-sur-Marne ont été contraints d'attendre plus d'une heure sur les quais à cause des perturbations sur la ligne.

Un sentiment de déception d’autant plus fort, que pour fluidifier la circulation, la SNCF a mis en place sur cette ligne un nouveau type de train: les RER NG. Des engins de nouvelle génération présentés comme plus confortables et censés améliorer la ponctualité de la circulation.

"Déjà avant le prolongement, il y avait des problèmes d’entretien", relate à BFMTV.com Ghizlaine Guessous. "On nous a annoncé ça comme la solution miracle (les RER NG NDLR) alors que le matériel ne suit pas", abonde-t-elle.

Une période de "rodage"

De son côté, la SNCF justifie en partie les avaries sur la ligne par le fait que des incidents ne soient pas directement liés à des problèmes techniques.

"Depuis décembre, les équipes de Transilien SNCF Voyageurs et de SNCF Réseau ont dû ainsi faire face à plusieurs incidents, à l’instar du dépôt de graisse laissé par les nouveaux trains sur les voies le 14 janvier dernier et cette semaine encore. Ou encore avec les incidents liés aux voyageurs qui représentent à eux seuls 25% des retards, mais qui génèrent des retards plus importants”, indique à BFMTV.com, SNCF Réseau.

Pour les problèmes liés à des aspects techniques, la SNCF se justifie en invoquant une période de "rodage".

"Comme n’importe quelle nouvelle ligne, elle est en phase de rodage sur le plan technique avec l’arrivée de nouvelles rames RER NG, mais également sur le plan humain avec l’assimilation de nouveaux réflexes d’exploitation", avance l’entreprise auprès de BFMTV.com.

Un discours partagé par Île-de-France Mobilités. "Nous déplorons les difficultés rencontrées qui impactent les trajets quotidiens des usagers. Le prolongement du RER E n’en est qu’à sa première étape, et demande à être fiabilisé et perfectionné, que ce soit au niveau des infrastructures ferroviaires", indique à BFMTV.com, l'autorité organisatrice des transports en Île-de-France.

Une explication qui ne convainc pas les associations des usagers. "Factuellement, on nous a vendus du rêve. Nous parler d’une phase de rodage, c’est quand curieux, ils (SNCF NDLR) auraient pu penser à tout cela bien avant", déclare Ghizlaine Guessous.

Vers une amélioration du trafic

Malgré l’inquiétude et l'exaspération des voyageurs, la SNCF se veut rassurante. "Depuis le 16 décembre dernier, la ponctualité voyageurs du RER E s’est donc progressivement améliorée, bien que certaines journées restent contrastées. Elle est passée ainsi de 86% à 89% à fin janvier en moyenne hebdomadaire”, assure l’entreprise qui conclut en assurant travailler pour "que cette période de rodage soit la plus courte possible".

De son côté Île-de-France Mobilités mise sur la mise en place d'un nouvel outil pour fluidifier la circulation.

"D’ici 2026, le nouveau système d’exploitation Nexteo pour l’assistance au pilotage automatique et au contrôle des trains sera mis en place entre Nanterre-la-Folie et Noisy-le-Sec, et contribuera à grandement améliorer l’exploitation de la ligne", conclut-elle.

Sylvain Allemand