Taïwan: face aux États-Unis et la Chine, Macron appelle l'UE à ne pas "être suiviste"

Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse à l'Élysée avec le Premier ministre britannique Rishi Sunak, le 10 mars 2023 - Gonzalo FUENTES / AFP
Une crise diplomatique qui ne manque pas de faire réagir sur l'ensemble du globe. Se refusant à "entrer dans une logique de bloc à bloc", Emmanuel Macron exhorte l'Europe à ne pas "être suiviste" des États-Unis ou de la Chine sur la question de Taïwan, dans une interview au quotidien économique français Les Echos publiée dimanche.
"La pire des choses serait de penser que nous, Européens, devrions être suivistes" sur la question de Taïwan "et nous adapter au rythme américain et à une surréaction chinoise", déclare le chef de l'État français, dans cet entretien accordé vendredi, lors de son déplacement en Chine.
Interrogé avant même le déclenchement samedi d'importantes manoeuvres militaires chinoises autour de Taïwan, Emmanuel Macron appelle l'Europe à se "réveiller": "notre priorité n'est pas de nous adapter à l'agenda des autres dans toutes les régions du monde".
Une conversation "dense et franche" entre les deux dirigeants
"Pourquoi devrions-nous aller au rythme choisi par les autres ? À un moment donné, nous devons nous poser la question de notre intérêt", sachant que "nous ne voulons pas entrer dans une logique de bloc à bloc", insiste le président de la République. Emmanuel Macron avait abordé vendredi avec son homologue chinois Xi Jinping la question de l'île.
Pékin, qui considère Taïwan comme une province, s'oppose à tout contact officiel entre Taipei et les gouvernements étrangers. Cela inclut la rencontre de mercredi en Californie entre la dirigeante taïwanaise Tsai Ing-wen et le président de la Chambre des représentants américaine, Kevin McCarthy, qui a suscité l'ire des dirigeants chinois et le déclenchement de trois jours de manoeuvres militaires.
Vendredi, "la conversation a été dense et franche" entre Emmanuel Macron et Xi Jinping, a fait savoir l'Élysée, rapportant la vigilance du chef de l'État français autour de "l'accumulation des tensions dans la région" qui pourrait conduire "au suraccident".
Constituer un pôle fort européen
Plaidant pour que "l'autonomie stratégique" soit "le combat de l'Europe", Emmanuel Macron met en garde dans Les Echos contre "une accélération de l'embrasement du duopole" Chine - États-Unis, au risque de ne plus avoir "le temps ni les moyens de financer" cette "autonomie stratégique". "Nous deviendrons des vassaux alors que nous pouvons être le troisième pôle si nous avons quelques années pour le bâtir", fait-il valoir.
"Le paradoxe serait qu'au moment où nous mettons en place les éléments d'une véritable autonomie stratégique européenne, nous nous mettions à suivre la politique américaine, par une sorte de réflexe de panique", poursuit Emmanuel Macron.
Le chef de l'État français s'est aussi félicité d'avoir au sein de l'Union européenne "gagné la bataille idéologique": "il y a cinq ans, on disait que la souveraineté européenne n'existait pas". Il plaide pour "muscler notre industrie de défense" et "accélérer la bataille pour le nucléaire et le renouvelable" sur le continent.