ONU: la Russie met son véto à une résolution déplorant son "agression" de l'Ukraine

Réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU, le 23 février 2022 à New York - TIMOTHY A. CLARY © 2019 AFP
La Russie a sans surprise mis son veto, lors d'un vote au Conseil de sécurité de l'ONU ce vendredi, à une résolution approuvée par une majorité de ses membres qui déplorait dans "les termes les plus forts" son "agression contre l'Ukraine" et lui réclamait de retirer "immédiatement" ses troupes de ce pays. Sur les 15 membres du Conseil, 11 pays ont voté en faveur du texte, co-rédigé par les États-Unis et l'Albanie, trois se sont abstenus: Chine, Inde et Émirats arabes unis.
Le projet avait été adouci dans les heures précédant le scrutin pour "sécuriser" des abstentions et éviter que ces trois pays ne votent non, selon un diplomate. Le texte proposé ne comportait ainsi plus le terme "condamner", remplacé par "déplorer". Une référence au chapitre 7 de la Charte de l'ONU, qui prévoit un possible recours à la force, a aussi été supprimée.
"Un moment de vérité"
La résolution "condamne" l'agression de la Russie, a cependant jugé l'ambassadrice américaine à l'ONU, Linda Thomas-Greenfield, tandis que son homologue albanais, Ferit Hoxha, dénonçait de manière virulente Moscou pour avoir "décidé d'infliger la mort" en Ukraine.
"Les États membres responsables n'envahissent pas leur voisin", a ajouté la diplomate américaine, en estimant que les pays abstentionnistes, lors du vote, "ne défendent pas la Charte des Nations Unies".
L'invasion par la Russie de l'Ukraine, c'est "un moment de vérité pour les grands pays, comme l'Inde, le Brésil ou certains pays africains, qui aspirent à devenir membres permanents du Conseil de sécurité", estime-t-il. "Soit ils choisissent leur intérêt particulier, soit ils choisissent le multilatéralisme et l'intérêt général".
Avant le vote, l'ambassadeur ukrainien à l'ONU, Sergiy Kyslytsya, avait aussi estimé que le scrutin représentait "un moment de vérité". C'est celui de savoir "qui est du bon côté", a-t-il dit, avant de poser pour les caméras, drapeau ukrainien en main et entouré de tous les ambassadeurs de l'Union européenne, devant une vaste tapisserie représentant Guernica de Picasso, ornant un mur à l'entrée du Conseil de sécurité.
"Un signal effrayant"
Une résolution similaire à celle soumise au Conseil de sécurité devrait être proposée dans les jours à venir à un vote de l'Assemblée générale de l'ONU (193 membres) où le droit de veto n'existe pas, selon des diplomates. Certains ambassadeurs estiment qu'au vu du "désastre" en cours en Ukraine, un vote favorable pourrait recueillir à l'Assemblée générale l'adhésion de plus d'une centaine de pays.
Depuis le début de son invasion militaire de l'Ukraine dans la nuit de mercredi à jeudi, la Russie, accusée par l'Occident et le chef de l'ONU de violer la Charte des Nations Unies, clame agir en auto défense en vertu de l'article 51 du document fondateur de l'Organisation. Seuls les cinq membres permanents du Conseil de sécurité (États-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni) ont un droit de veto au Conseil de sécurité.
La résolution américano-albanaise avait reçu le co-parrainage de quelque 70 pays. Elle prévoyait, outre une vive critique de la Russie, de réaffirmer un soutien à la souveraineté de l'Ukraine, et d'obliger la Russie à cesser "de recourir à la force" et à retirer "immédiatement, complètement et sans condition toutes ses forces militaires" de ce pays. Dans un communiqué, Kenneth Roth, directeur de l'ONG Human Rights Watch, a vivement dénoncé un veto russe qui "envoie un signal effrayant aux civils ukrainiens de son indifférence au droit international".