Gaza: ce que l'on sait de l'opération menée par l'armée israélienne à l'hôpital al-Shifa

Une opération militaire au sein même d'un hôpital. Au 40e jour de la guerre entre le Hamas et Israël, des dizaines de soldats israéliens ont pénétré ce mercredi 15 novembre dans l'enceinte de l'immense complexe hospitalier al-Shifa, le plus grand de la bande de Gaza, où sont accueillis des centaines de patients et des milliers de civils ayant fui les combats et les bombardements.
L'armée israélienne explique mener cette opération en ayant la certitude que des centaines de combattants de Hamas se trouvent sur le complexe et assure qu'il n'y a "aucune volonté" que des civils soient des victimes collatérales de l'opération, selon les termes du porte-parole francophone de Tsahal Olivier Rafowicz, invité sur BFMTV ce mercredi. Il a également fait savoir que des otages de se trouvaient "peut-être" dans les sous-sols de l'hôpital.
· Israël défend une "opération chirugicale"
"On parle d'opération 'chirurgicale', avec le renseignement israélien et des équipes spéciales dont des équipes arabophones et de équipes médicales (...) pour vérifier ce qu'il se passe dans l'hôpital, dans un endroit particulier de l'hôpital. On a du renseignement précis, tactique, même microtactique. On a également prévenu la direction de l'hôpital", assure Olivier Rafowicz sur BFMTV.
Tsahal aurait "des informations précises sur la présence de terroristes du Hamas, entre 200 et 300 dans l'hôpital", selon le porte-parole.
Dans un point presse ce mercredi matin, le porte-parole anglophone de l'armée Daniel Hagari insiste sur les indications d'évacuations transmises aux Gazaouis au cours des dernières semaines.
Selon un journaliste présent sur place et collaborant avec l'AFP, des soldats israéliens évoluent dans les couloirs et étages de plusieurs bâtiments de l'hôpital en tirant en l'air. D'autres militaires lancent dans des haut-parleurs, en arabe: "Tous les hommes de 16 ans et plus, levez les mains en l'air et sortez des bâtiments vers la cour intérieure pour vous rendre".
Aussitôt, des centaines de personnes sont sortis des différents services de l'immense complexe situé dans l'ouest de la ville de Gaza, où se concentrent désormais les combats entre les chars israéliens et les combattants du Hamas, au pouvoir à Gaza, appuyés par leurs alliés du Jihad islamique. Ils ont été parqués dans la cour de l'hôpital et fouillés, certains déshabillés. Des soldats ont interrogé des personnes dans l'hôpital, dont des patients et des médecins.
Toujours selon l'AFP, des chars israéliens, qui encerclaient depuis plusieurs jours l'hôpital, sont entrés à l'intérieur, postés devant différents services dont celui des urgences.

Selon l'armée israélienne, l'hôpital al-Shifa est "utilisé de manière systématique par le Hamas, depuis des années d'ailleurs, comme machine de guerre, comme quartier général logistique et opérationnel", et les civils servent de "bouclier humain" à l'organisation islamiste. Des affirmations en partie étayées par un rapport d'Amnesty International datant de 2015, qui fait état d'interrogatoires violents et de tortures infligées par le Hamas à des civils en 2014.
"Israël n'est pas en guerre avec l'hôpital al-Shifa ni avec les gens qui sont dans l'hôpital. Nous sommes en guerre avec le Hamas pour récupérer entre autres les kidnappés", a assuré Olivier Rafowicz.
· Flou entretenu sur la potentielle présence d'otages
L'armée israélienne a communiqué par plusieurs canaux sur la présence potentielle d'otages à al-Shifa, Olivier Rafowicz expliquant qu'il y en avait "peut-être (...) des kidnappés du 7 octobre dans les sous-sols de l'hôpital".
"Nous avons certains éléments mais je ne peux pas les révéler", a-t-il partagé après avoir été interrogé sur notre antenne quand à de potentielles informations fiables sur la présence d'otages. "Le retour des otages est une priorité absolue" pour Israël, a-t-il rappelé.
· Le Hamas nie et la situation humanitaire inquiète
Le Hamas nie les propos de l'armée israélienne: l'organisation islamiste explique qu'il n'y a pas de commandement militaire sous l'hôpital al-Shifa et que Tsahal ne vise que des civils. Face aux affirmations d'utilisation des hôpitaux comme "boucliers humains" depuis plusieurs années, le ministère de la Santé à Gaza a démenti à plusieurs reprises, réclamant la visite de "commissions d'enquêtes internationales".
L'Autorité palestinienne au pouvoir en Cisjordanie a accusé mercredi l'armée israélienne d'avoir "violé de façon flagrante" le droit international en lançant une opération militaire dans l'hôpital. La Jordanie a quant à elle estimé que le "silence" du Conseil de sécurité de l'ONU autorisait "la barbarie".
Il est difficile de faire la lumière sur les événements. Il y a très peu de journalistes à Gaza et ceux qui ont pu entrer dans l'enclave palestinienne après le 7 octobre ont évolué sous le contrôle de l'armée israélienne.
La situation apparaît toutefois inquiétante, selon les informations notamment fournies par des équipes Médecins sans frontières (MSF), qui parlent d'enfants n'ayant plus manger "depuis 24 heures", et par l'OMS, dont le patron se dit "extrêmement inquiet", estimant qu'"un hôpital ne devrait jamais être attaqué". L'ONU se dit de son côté "horrifiée" par le raid israélien à al-Shifa.
Au moins neuf bébés prématurés sont morts après avoir été sortis de leurs couveuses, tandis que 27 malades en soins intensifs sont décédés parce qu'ils n'avaient plus de respirateur en état de marche, selon le ministère de la Santé du Hamas.
Une fosse commune creusée dans le complexe renferme déjà "179 corps" selon le directeur de l'hôpital, le docteur Mohammed Abou Salmiya. En plus de ces "équipes arabophones et médicales", Israël affirme ce mercredi avoir avoir "livré des couveuses, de la nourriture pour bébé et du matériel médical" en marge de son "opération".