EDITO - Gaza-Israël: comment négocier sous un Dôme de Fer?

Après une semaine d'affrontements, Israël et Hamas ne sont toujours pas prêts à enterrer la hache de guerre. Si Israël a accepté mardi le cessez-le-feu proposé par l'Egypte, le Hamas s'y refuse. Comment négocier sous les bombes? Lire l'éclairage de notre spécialiste en géopolitique.

Jamais, ces dernières années, un engin technologique n'aura autant affecté l'équilibre stratégique: le Dôme de fer israélien, système de tirs de missiles antimissiles, composé d'un camion électronique, d'un radar, d'une batterie de tir mobile, et des missiles intercepteurs.

Nous en sommes à la quatrième opération de même nature en six ans: Tsahal tente de faire cesser complètement les tirs de missiles désordonnés sur le territoire israélien, provenant de Gaza.

> Eté 2006: deuxième guerre du Liban

La première nuée de bombes provient du côté du Liban à l'été 2006: le Hezbollah fait pleuvoir les missiles, de fabrication ou d'inspiration iranienne, sur le nord d'Israël, frôlant Haïfa. L'armée israélienne envahit le Sud, et bombarde intensément le territoire libanais. Un cessez-le-feu s'ensuit, très strictement respecté jusqu'au 11 juillet 2014. C'est la première fois que Tsahal doit faire à la guerre sans forcément annihiler l'ennemi: le Hezbollah reste en place, et continue de recevoir et de construire des missiles.

Le Hamas, à Gaza, allait bientôt tenter, lui aussi, la guerre des missiles. Et déjà l'industrie israélienne planche sur un bouclier antiroquettes.

> Hiver 2008-2009: opération Plomb Durci

Le Hamas lance sa première campagne en décembre 2008 et janvier 2009. Les roquettes - mot qui désigne surtout les "Kassam", à portée de 15 km, et aussi les Grad de 20 à 40 km - tombent sur le nord, Tel Aviv et Jérusalem sont indemmes.

Israël lance alors l'opération Plomb Durci, qui nécessite des raids aériens, des tirs d'artillerie, et en fin de compte une incursion terrestre pure et simple. Environ 1.400 Palestiniens meurent, et quatorze israéliens. Les villes du sud israélien deviennent des cibles permanentes. La défense passive - les alertes et les abris - fonctionnent bien.

> Automne 2012: opération Pilier de Défense

À l'automne 2012, c'est le moment de vérité pour le Dôme de Fer. Une vingtaine d'intercepteurs sont tirés sur chaque roquette, Kassam ou Grad ou même un obus d'artillerie. Le taux d'abattage est de 80-90%. Lors de cette opération de 2012 contre Gaza, que les autorités israéliennes appellent Pilier de Défense, le Dôme de Fer épargne à l'armée israélienne une incursion terrestre dans Gaza.

Cette batterie fait ses preuves, aucun dégât majeur sur Israël. Netanyahu peut négocier avec le Hamas sans le sang de ses propres citoyens sur les mains. Et les tirs du Dôme de Fer ne tuant personne, cette arme devient révolutionnaire.

> Eté 2014: opération Bordure Protectrice

Et nous voici en juillet 2014: le Dôme de Fer arrête toujours une grande majorité des roquettes et missiles du Hamas. Son utilisation est un remake de 2012: Netanyahu peut de nouveau négocier dans la même posture qu'en 2012. Mais, le Dôme de Fer n'est plus la réponse: il y a des milliers de roquettes et des milliers de missiles prêts à tirer dans Gaza, impossible de tous les abattre avec des intercepteurs à 10.000 dollars pièce (coût évalué par votre seviteur). Cette fois-ci, le Dôme donne du temps, mais pas la solution.

Harold Hyman et spécialiste de géopolitique