Irak: la bataille de Mossoul touche-t-elle à sa fin?

Des soldats irakiens marchent dans la vieille ville dévastée de Mossoul, le 25 juin 2017. - Mohamed el-Shaded - AFP
La bataille de Mossoul n'est-elle plus qu'une question de jours? Depuis dimanche, les forces irakiennes bataillent dur dans le cœur historique de la ville, dévasté, s'approchant des dernières poches de jihadistes pour les chasser de leur ultime fief urbain dans le pays. Il s'agit peut-être de la dernière ligne droite pour reprendre la ville, tombée aux mains de Daesh il y a trois ans. L'armée irakienne estime qu'il ne reste plus qu'une dizaine de jours avant la reconquête de Mossoul.
Près de 70% de la ville libérés
Trois ans après avoir pris Mossoul, la deuxième ville d'Irak, les jihadistes de Daesh ne contrôlent plus qu'environ un kilomètre carré dans la vieille ville, selon des commandants irakiens.
"65 à 70 % de la vieille ville a été libérée, il reste moins d'un kilomètre carré à reprendre", a déclaré le lieutenant-colonel Salam al-Obeidi, des services d'élite du contre-terrorisme qui mènent l'assaut contre ce secteur depuis le 18 juin. Il ne reste que "quelques centaines de combattants de Daesh", a-t-il estimé.
Mais comme l'explique notre envoyé spécial sur place Edouard Dufrasne, les jihadistes mènent depuis dimanche soir une sorte de contre-offensive, dans un quartier situé à la périphérie ouest de la ville, ce qui complique la tâche de l'armée irakienne, obligée de redéployer des hommes dans ce secteur pour tenter d'en reprendre le contrôle. "Sauf si cette contre-insurrection dans l'ouest de la ville devait continuer, il est probable que dans un peu plus d'une semaine on puisse déclarer la ville de Mossoul complètement libérée".
Le 21 juin, les jihadistes ont fait exploser l'emblématique minaret penché de la mosquée Al-Nouri, où Abou Bakr al-Baghdadi avait donné en juillet 2014 son premier prêche en tant que calife autoproclamé, sa dernière apparition publique à ce jour. L'édifice, surnommé la "tour de Pise irakienne" , datait du XIIe siècle.
Une ville complètement détruite
Les combats dans le vieux Mossoul ont été parmi les plus intenses depuis le début de la guerre contre Daesh. Les journalistes présents sur place ont pu constater des dégâts considérables dans la vieille ville, qui comprend de nombreux trésors architecturaux, notamment certains édifices datant du XIe siècle.
Le quartier al-Farouq est notamment dévasté par les bombardements, les tirs de mortier, et les combats de rues. Proche de la mosquée al-Nouri, il a été repris ces deux derniers jours par les unités antiterroristes de l'armée. Il offre une vision apocalyptique: ses ruelles désertes sont encombrées par des montagnes de gravats et de débris, et les nombreux cadavres de combattants présumés de Daesh dégagent une odeur putride. "Il ne reste plus grand-chose de la vieille ville de Mossoul", nous confirme Edouard Dufrasne.
De nombreux bâtiments se sont écroulés, et il n'est pas possible de savoir dans l'immédiat si les nombreux civils qui s'y trouvaient encore ces derniers jours, cachés notamment dans des sous-sol, ont pu s'en échapper à temps.
Des dizaines de milliers d'habitants pris au piège
Selon un commandant des forces du contre-terrorisme irakien, quelque 8.000 personnes ont réussi à fuir la vieille ville depuis le 18 juin. Mais 100.000 civils restent pris au piège des combats par les jihadistes, qui les utilisent comme boucliers humains.
Les civils qui essaient de s'échapper courent parfois de graves dangers, comme en témoigne un drame survenu vendredi. Un kamikaze qui s'était infiltré au sein d'un groupe de personnes fuyant la vieille ville s'est fait exploser, faisant au moins 12 morts, selon des officiers.
"Les combattants de Daesh ne se rendent pas. Leur dernier recours, c'est de se faire exploser, de se suicider. Lorsqu'ils sont à court de munitions, ils se font exploser", rappelle Muhanad al-Tamimi, un commandant de bataillon de l'armée irakienne.
Des civils parmi les jihadistes
Le secteur toujours contrôlé par les jihadistes est relativement petit mais les rues étroites et la présence des nombreux civils rendent l'avancée des forces irakiennes extrêmement délicate. D'autant plus que, encerclés, les jihadistes opposent une résistance féroce en ayant recours à des engins piégés, des tirs au mortier, des attaques-suicides ou des tireurs d'élite.
Les forces irakiennes mènent depuis le 17 octobre cette offensive, soutenue par la coalition internationale, pour reprendre Mossoul aux jihadistes, qui s'étaient emparés de la grande ville du nord de l'Irak en juin 2014. Elles ont repris en janvier l'est de la cité, coupée en deux par le fleuve Tigre, puis ont lancé une offensive en février sur l'ouest, où se trouve la vieille ville.
En huit mois, des centaines de combattants de Daesh ont été tués, de même que des centaines de civils. Plus de 800.000 personnes ont en outre été déplacées, nombre d'entre elles vivant aujourd'hui dans des camps.