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Les Tibétains élisent un juriste comme Premier ministre

Le Dr. Lobsang Sangay, professeur de droit de l'université américaine d'Harvard, a été désigné par les Tibétains du monde entier comme Premier ministre. /Photo prise le 18 mars 2011/REUTERS/Mukesh Gupta

Le Dr. Lobsang Sangay, professeur de droit de l'université américaine d'Harvard, a été désigné par les Tibétains du monde entier comme Premier ministre. /Photo prise le 18 mars 2011/REUTERS/Mukesh Gupta - -

Les Tibétains en exil ont désigné comme Premier ministre un professeur de droit qui pourrait adopter une politique plus radicale envers la Chine après le retrait de la vie politique du dalaï-lama.

Lobsang Sangay, 42 ans, a obtenu 27.051 voix, soit 55% des suffrages, devançant deux autres candidats laïcs.

"La Commission électorale de l'Administration centrale tibétaine de Sa Sainteté le dalaï-lama a proclamé le Dr Lobsang Sangay troisième kalon tripa", a déclaré lors d'une conférence de presse le commissaire électoral Jampal Thosang en utilisant le titre tibétain du Premier ministre.

L'élection fait suite à la décision du dalaï-lama, leader spirituel des Tibétains, de renoncer à son rôle de chef politique. Le transfert du pouvoir vise à donner davantage de poids au rôle de Premier ministre et à éviter une possible crise de pouvoir en cas de décès du dalaï-lama, âgé de 75 ans.

Lobsang Sangay, spécialiste du droit international relatif aux droits de l'homme, a laissé entendre qu'il pourrait aller au-delà de l'autonomie réclamée à la Chine par le dalaï-lama dans le cadre de sa politique de "voie du milieu".

Lorsqu'il était étudiant à New Delhi, il dirigeait le Congrès de la Jeunesse tibétaine qui réclame l'indépendance complète. Né en 1968 dans un camp de réfugiés en Inde, Lobsang Sangay a étudié à Harvard où il a obtenu un doctorat en droit. Devenu professeur, il a eu pour élèves des Chinois et organisé à deux reprises des rencontres entre ces deux-ci et le dalaï-lama .

SÉPARATION DES POUVOIRS

Lobsang Sangay se trouvait aux Etats-Unis lors de l'annonce des résultats. En tant que Premier ministre, il s'installera à Dharamsala, dans le nord de l'Inde, siège du gouvernement tibétain en exil constitué en 1959 après la fuite du dalaï-lama de Lhassa et l'échec d'un soulèvement contre le régime chinois.

Le dalaï-lama a annoncé en mars qu'il renonçait à une tradition vieille de quatre siècles et qu'il cèderait le pouvoir politique à un dirigeant démocratiquement élu par la diaspora tibétaine. Il demeure le guide spirituel de son peuple qui le considère comme une réincarnation du bouddha de la compassion.

Le gouvernement chinois affirme que toute réincarnation de bouddha vivant doit recevoir son approbation, et il entend ainsi disposer d'un droit de veto sur le choix du prochain dalaï-lama, appelé à succéder, à sa mort, à Tenzin Gyatso.

Les tibétains redoutent que la Chine ne se serve de l'épineuse question de la succession pour diviser le mouvement autonomiste en suscitant la désignation d'un nouveau dalaï-lama distinct de celui reconnu par les Tibétains en exil.

En séparant pouvoirs spirituel et politique, le dalaï-lama s'efforce d'éviter cet écueil. La Chine, qui considère le dalaï-lama comme un dangereux séparatiste attisant les troubles au Tibet, a qualifié cette initiative de "ruse".

Par Abhishek Madhukar - Pierre Sérisier et Nicole Dupont pour le service français, édité par Gilles Trequesser