L'indépendantiste Eroglu remporte la présidentielle chypriote

Le Premier ministre chypriote turc Dervis Eroglu, un conservateur partisan de l'indépendance de la partie turque de l'île, a remporté dimanche l'élection présidentielle qui l'opposait au chef de l'Etat de centre gauche sortant, Mehmet Ali Talat. /Photo pr - -
par Ayla Jean Yackley et Simon Bahceli
NICOSIE (Reuters) - Le Premier ministre chypriote turc Dervis Eroglu, un conservateur, a remporté dimanche l'élection présidentielle face au chef de l'Etat de centre gauche sortant, Mehmet Ali Talat.
Selon un résultat non définitif à l'issue du dépouillement, il est élu dès le premier tour avec 50,38%. Ces résultats, qui doivent encore être approuvés par la commission électorale, créditent Talat de 42,85% des suffrages.
Dervis Eroglu, farouche partisan de l'indépendance de la partie chypriote turque de l'île, cherche à obtenir au minimum une large autonomie pour les Chypriotes turcs dans les pourparlers engagés avec la partie grecque de l'île.
Il a assuré vouloir poursuivre les pourparlers de paix avec l'autre partie de l'île pour parvenir à une solution "avec laquelle nous pourrons tous vivre".
"Les pourparlers continueront car je veux la paix encore plus que ceux qui affirment que je ne la veux pas", a affirmé Eroglu devant ses partisans.
"DÉVELOPPEMENT NÉGATIF"
Dans la partie grecque de Chypre, la victoire d'Eroglu, si elle était attendue, a été mal accueillie.
"Son élection est un développement négatif, étant donné les opinions exprimées par M. Eroglu", a commenté Stefanos Stefanou, porte-parole du gouvernement chypriote grec, seul reconnu par la communauté internationale.
"Ce qui compte à présent, c'est de considérer les bases de ce développement, de déterminer notre attitude et nos tactiques à venir, afin de mettre en oeuvre une solution", a-t-il ajouté à l'antenne de la Cyprus Broadcasting Corporation.
Le Premier ministre turc, Tayyip Erdogan, a de son côté assuré que son pays maintiendrait son appui aux pourparlers de paix et s'emploierait à parvenir à une solution pour Chypre avant la fin de l'année 2010.
"Les Chypriotes turcs doivent poursuivre le dialogue, et c'est aussi ce que pense Eroglu. Notre objectif est de trouver une solution avant la fin de l'année", a-t-il dit sur la chaîne turque NTV.
Il appartiendra désormais à Eroglu de négocier un règlement de l'île divisée depuis 1974 entre une partie chypriote turque non reconnue par la communauté internationale et une partie grecque qui représente Chypre dans l'Union européenne. Sans un accord, les Chypriotes grecs bloqueront toute adhésion de la Turquie à l'UE.
"Personne ne va quitter la table des négociations, mais cela va faire de la réunification un objectif plus compliqué à atteindre", a commenté Hugh Pope, directeur de recherche pour la zone Turquie/Chypre à l'International Crisis Group.
Agé de 72 ans, Dervis Eroglu, Premier ministre du gouvernement chypriote turc que seule la Turquie reconnaît, est favorable à un partenariat entre peuples égaux et souverains, ce que la partie chypriote grecque juge inacceptable.
Son adversaire malheureux Mehmet Ali Talat, 58 ans, et le président chypriote grec Demetris Christofias ont lancé des pourparlers de paix en 2008, s'orientant vers la création d'une fédération souple.
Chypre est divisée depuis l'invasion turque du nord de l'île pendant l'été 1974, consécutive à un coup d'Etat à Nicosie inspiré par le régime militaire grec.
Jean-Stéphane Brosse et Gregory Schwartz pour le service français