Trois cartes pour expliquer le vote en faveur du Brexit

Le Royaume-Uni a décidé de quitter l'Union européenne. - John McDougall - AFP
On savait le match serré, pourtant la décision du peuple anglais de quitter l'Union européenne résonne comme un coup de tonnerre. Cette décision, qui engage non seulement le Royaume-Uni mais aussi l'Europe tout entière pour de nombreuses années, est historique. Comment expliquer ce vote? Les résultats sont remarquables dans leur répartition géographique. La lecture des cartes est pleine d'enseignements.
Ils ont voté pour le maintien dans l'Union Européenne
• Londres. Centre financier et politique du pays, la capitale britannique est aussi, avec ses zones péri-urbaines, la région où le salaire médian est le plus élevé du pays. Avec le choix du Remain, le vote des Londoniens est significatif du choix de l'élite anglaise.
• Les villes universitaires. A la suite de leurs parents, les enfants de l'élite britannique et les strates les plus éduquées de la population ont choisi, eux aussi, de rester en Europe.
• L'Ecosse. Comme un seul homme, la nation écossaise s'est massivement tournée vers le Remain, indépendamment des autres facteurs: aucune circonscription n'a choisi le Brexit. Au total, les Ecossais sont 62% à avoir décidé de rester dans l'Union. Ce score important a poussé la Première ministre écossaise à adresser un avertissement à Londres: l'Ecosse veut faire partie de l'Europe, et, en conséquence, considère la possibilité d'organiser un nouveau référendum d'indépendance.
• L'Irlande du Nord. Les Nord-Irlandais ont choisi à 56% de rester dans l'UE. Inspiré par ce résultat, le Sinn Feinn, parti nationaliste irlandais, a appelé lui aussi à un référendum d'indépendance pour unifier le pays avec son voisin, la République d'Irlande, presque 20 ans après les accords de pays qui ont mis fin à 30 ans de guerre civile.
Ils ont voté pour le Brexit
• Les zones rurales anglaises. La répartition des votes montre qu'à l'opposé des grands centres urbains, la campagne anglaise s'est massivement opposée à ce que le Royaume-Uni reste au sein de l'Union européenne. Les zones les plus éloignées des villes ont voté comme les green belts, quartiers entourant les grandes villes, où le discours anti-immigration a été extrêmement porteur.
• Les stations balnéaires. Ces villes à la population majoritairement blanche et plus âgée que la moyenne a massivement rejoint les rangs des pro-Brexit. Un certain sentiment d'abandon et la peur de l'immigration en ont fait l'une des terres de prédilection de Ukip, le parti europhobe de Nigel Farage, qui milite depuis toujours contre l'Union européenne. Cela rejoint un autre facteur décisif dans ce vote: l'âge.
Un vote très générationnel
La fracture qui oppose la population anglaise à elle-même est aussi générationnelle, cela se constate dans la géographie du vote. Les écarts très importants selon les catégories d'âge se sont logiquement reportés dans les zones où ces catégories sont majoritaires. Ainsi, sur les 14 circonscriptions dans lesquelles l'âge médian est le plus élevé de tout le royaume, seule une a voté contre le Brexit: le South Lakeland.
Selon les chiffres de YouGov, 75% des électeurs de la tranche 18-24 ans étaient en faveur du maintien. A l'inverse, les plus de 65 ans n'étaient plus que 39%. Cela explique cette concentration des votes. Les seniors ont choisi de quitter l'UE alors que, comme le relève YouGov, ce sont eux qui auront à vivre le moins longtemps avec les conséquences de ce vote. Une constatation qui a d'ailleurs mis Alex Kapranos, le chanteur du groupe écossais Franz Ferdinand, très en colère. Il blâme les "égoïstes" baby boomeurs pour ce résultat.
L'indécision du pays de Galles
A l'inverse de l'Irlande ou de l'Ecosse, le Pays de Galles s'est montré plus indécis. Certes sur les 22 circonscriptions, cinq seulement se sont déclarées hostiles au Remain. Mais le score total fait basculer le territoire dans le camp du Brexit: avec 71,7% de participation, 52% des électeurs ont décidé de faire leurs adieux à Bruxelles, un chiffre au niveau du score national.
Cette décision surprend les Anglais car ce territoire est celui qui profite le plus de l'argent de l'Europe. La raison n'est donc clairement pas financière. De plus, ce vote semble échapper quelque peu aux facteurs qui ont donné forme au scrutin dans le reste du pays. Par exemple, Cardiff mis de côté, ce sont les zones les plus développées qui ont le plus voté pour le Brexit, alors que les zones rurales se sont plutôt rangées du côté du Remain.