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Les États-Unis s'alertent d'une résurgence de la rougeole, sur fond de couverture vaccinale en baisse

Un vaccin contre la rougeole préparé à Podgorica, au Monténégro, le 16 février 2020 (illustration)

Un vaccin contre la rougeole préparé à Podgorica, au Monténégro, le 16 février 2020 (illustration) - SAVO PRELEVIC / AFP

Des dizaines de cas de rougeole ont été recensés aux États-Unis depuis fin janvier, principalement au Texas. Une résurgence de cette maladie très contagieuse qui peut s'expliquer par une baisse de la couverture vaccinale chez les plus petits.

Les autorités sanitaires américaines en vigilance face à des dizaines de cas de rougeole recensés ces dernières semaines. La rougeole est une maladie virale très contagieuse dont les complications peuvent être graves.

Aux États-Unis, le Texas connaît une épidémie de rougeole depuis plusieurs semaines. Le 21 février, 90 cas avaient été identifiés depuis fin janvier, selon les autorités sanitaires locales. "Seize des patients ont été hospitalisés. Cinq des cas sont vaccinés. Les autres ne sont pas vaccinés ou leur statut vaccinal est inconnu", indique le département responsable des services de Santé au Texas sur son site. Celui-ci précise qu'en raison de "la nature hautement contagieuse de cette maladie, d'autres cas sont susceptibles de se produire" dans les zones déjà touchées.

Le 20 février, l'État du Nouveau-Mexique, voisin du Texas, recensait aussi 9 cas de rougeole. D'autres cas ont été rapportés dans les États de l'Alaska, de la Californie, de la Géorgie, du New Jersey, de New York et de Rhode Island, selon les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), une agence fédérale chargée de la santé publique. 25% de ces cas ont donné lieu à une hospitalisation en raison de complications.

La vaccination en baisse

Ces contaminations surviennent alors que les taux de vaccination aux États-Unis ont diminué depuis la pandémie de Covid-19, et au moment où l'incertitude règne quant à la politique que mènera le nouveau ministre américain de la Santé, Robert Kennedy Jr, connu pour ses positions antivaccins.

L'an dernier, 285 cas de rougeole avaient été recensés dans le pays, contre 59 en 2023, selon les CDC. Un nombre élevé mais bien plus faible que les plus de 1.000 cas recensés en 2019 lors d'une épidémie au sein des communautés juives orthodoxes de New York et du New Jersey, non vaccinées.

Quasiment éradiquée dans de nombreux pays développés, la rougeole est réapparue ces dernières années à la faveur d'un affaiblissement de la couverture vaccinale. Aux États-Unis, la proportion d'enfants en maternelle vaccinés contre la rougeole - vaccinnation pourtant obligatoire - est passée de plus de 95% en 2019 à moins de 93% en 2023, avec des diminutions plus importantes localement, selon les CDC.

Cela laissait "environ 280.000 élèves de maternelle à risque au cours de l'année scolaire 2023-2024", soulignent les autorités sanitaires, alors que cette maladie est particulièrement fréquente et dangereuse chez les enfants, selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).

"La rougeole, c'est le signe avant-coureur" d'une crise à venir, a affirmé à l'AFP le pédiatre infectiologue Paul Offit, pointant la baisse des taux de vaccination depuis la pandémie de Covid-19.

Défiance et maladie sous-estimée

Cette baisse peut s'expliquer par plusieurs facteurs, dont les nombreuses dérogations non-médicales (religieuses par exemple) à la vaccination dans certains États comme le Texas. Les experts pointent aussi une défiance croissante aux États-Unis envers les vaccins.

Richard Hughes, spécialiste en politiques de santé publique à l'université George Washington, observe une tendance liée au "contrecoup de la pandémie" de Covid-19, estime. La population est "frustrée à l'égard de la réponse globale du gouvernement", des messages contradictoires sur les masques aux obligations vaccinales, a-t-il relevé auprès de l'AFP. Une frustration exacerbée par les nombreuses fausses informations relayées sur les réseaux sociaux.

"Le mouvement anti-vaccin ou la réticence à l'égard des vaccins existe depuis qu'il y a des vaccins. Cet aspect n'est donc pas surprenant", a néanmoins estimé Adam Ratner, directeur de la division des maladies infectieuses pédiatriques à l'université de New York, dans un podcast de l'université de Chicago.

Le spécialiste juge surtout que les Américains ont en quelque sorte oublié combien la rougeole peut être grave. "Nous sommes passés d'une époque où les gens se rendaient compte qu'il valait la peine de prendre de petits risques pour obtenir de grands avantages, et que les grands avantages étaient la protection contre ces maladies", à une période où les dangers de ces affections sont sous-estimés, a ajouté le spécialiste.

Avant la mise au point du vaccin contre la rougeole au début des années 1960, la maladie tuait des centaines d'enfants chaque année aux États-Unis, et continue de faire des dizaines de milliers de morts à travers le monde, selon l'Organisation mondiale de la Santé.

Sophie Cazaux