La rébellion combat à Tripoli, discute à l'étranger

Rebelles dans le quartier d'Abou Slim, à Tripoli. Les insurgés libyens, dont les représentants se réunissent jeudi en Turquie pour préparer l'après-Kadhafi, ont commencé à nettoyer les poches de résistance des derniers partisans du régime de Mouammar Kadh - -
par Missy Ryan et Ulf Lässing
TRIPOLI (Reuters) - Les rebelles libyens, dont les représentants se réunissent jeudi en Turquie pour préparer l'après-Kadhafi, ont commencé à nettoyer les poches de résistance des derniers partisans du régime de Mouammar Kadhafi à Tripoli.
Alors que des tirs ont brisé le silence qui régnait jeudi matin dans la capitale, les rebelles affichaient leur confiance dans leur capacité à neutraliser les soldats encore fidèles au "guide" libyen.
Selon eux, Mouammar Kadhafi se cache probablement quelque part dans le pays, qu'il a gouverné sans partage pendant 42 ans. Le Conseil national de transition (CNT), formé à Benghazi par les rebelles, a promis une récompense de 1,3 million de dollars et une amnistie à quiconque lui livrerait l'ancien leader, mort ou vif.
"Les combats se termineront lorsqu'il sera capturé, mort ou vif", a déclaré Moustapha Abdeldjeïl, président du CNT.
Les combats pour le contrôle de Tripoli auraient fait plus de 400 morts et au moins 2.200 blessés, selon les insurgés.
Après la chute mardi de Bab al Aziziah, le quartier général fortifié de Mouammar Kadhafi, des combattants loyalistes et des tireurs isolés continuent à résister par endroits.
"Il y a encore beaucoup de tireurs dans l'est de Tripoli. Nous en viendrons à bout, mais cela prendra du temps", a dit un combattant rebelle.
L'Otan apporte son aide en matière de renseignement et de reconnaissance aux rebelles libyens pour mettre la main sur Mouammar Kadhafi et ses fils, a dit le ministre britannique de la Défense.
"Il y a encore des zones de résistance de fidèles au régime, qui a bénéficié d'un niveau élevé d'expertise militaire, possède toujours des stocks d'armes et dispose toujours d'une capacité de commande et de contrôle", a déclaré Liam Fox.
BALLET DIPLOMATIQUE
Les rebelles ont aussi fait état de combats dans le désert ainsi qu'aux alentours de Syrte, ville natale de Kadhafi. Des combattants rebelles en provenance de Misrata se dirigent vers Syrte, dont ils ne sont plus qu'à 50 km.
Nouri Echtioui, l'un des porte-parole des rebelles à Tripoli, a annoncé que les insurgés avaient relâché plusieurs centaines de détenus de la prison d'Abou Slim, à Tripoli.
Les réserves de médicaments ont atteint des niveaux critiques par endroits.
"Les hôpitaux où je me suis rendus sont remplis de personnes qui ont été blessées par balles", a dit le chef de la mission de Médecins sans frontières en Libye, Jonathan Whittall.
"Dans l'un des établissements que j'ai visité, les médecins ont converti des maisons attenantes en salles d'hospitalisation. Mais comme le personnel soignant manque, il n'y avait aucune infirmière et les patients devaient s'occuper seuls de leurs blessures."
Les nouveaux maîtres du pays multiplient les rendez-vous diplomatiques. Une réunion était organisée jeudi en Turquie pour sécuriser les financements dont les rebelles ont besoin pour reconstruire le pays après six mois de guerre civile.
Les leaders occidentaux et le gouvernement rebelle en attente n'ont pas perdu de temps pour préparer la transmission des importantes réserves libyennes d'avoirs étrangers.
Mercredi, les représentants des rebelles se sont réunis au Qatar avec des émissaires venus des Etats-Unis, de Grande-Bretagne, de France, de Turquie et des Emirats arabes unis. A l'issue de la réunion, ils ont demandé le déblocage en urgence de cinq milliards de dollars d'avoirs gelés.
CONFÉRENCE LE 1ER SEPTEMBRE
L'Italie a été le premier pays à débloquer 350 millions d'euros d'avoirs libyens gelés dans ses banques, a annoncé le président du Conseil, Silvio Berlusconi.
Les Etats-Unis ont également soumis un projet de résolution au Conseil de sécurité de l'Onu pour débloquer 1,5 milliard de dollars d'avoirs libyens. Selon des diplomates, le vote de cette résolution pourrait intervenir jeudi ou vendredi.
Face à l'effondrement du régime de Kadhafi, la France et le Royaume-Uni ont décidé d'organiser le 1er septembre à Paris une conférence internationale sur l'avenir de la Libye, a annoncé Nicolas Sarkozy après un entretien avec Mahmoud Djibril, Premier ministre du CNT.
Cette conférence sera élargie au secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-Moon, ainsi qu'aux représentants de pays n'ayant pas participé aux opérations militaires depuis mars, notamment le Brésil, l'Inde, la Russie et la Chine.
Le ministère russe des Affaires étrangères a demandé que la gestion de l'après-Kadhafi en Libye soit "exclusivement sous l'égide du Conseil de sécurité de l'Onu".
Les rebelles, dont beaucoup sont d'anciens partisans de Mouammar Kadhafi, disent vouloir coopérer avec d'anciens loyalistes et éviter les purges de l'ancienne élite au pouvoir.
D'après Abdel Salam Djalloud, ex-bras droit du dirigeant libyen rallié à la rébellion, Mouammar Kadhafi est convaincu qu'il pourra retrouver le pouvoir lorsque la campagne de bombardement de l'Otan cessera. Mais les défections semblent se renforcer dans son entourage.
Avec Peter Graff, Zohra Bensemra et Leon Malherbe à Tripoli, Robert Birsel à Benghazi et les rédaction du Caire, de Tunis et d'Alger; Hélène Duvigneau pour le service français, édité par Gilles Trequesser