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Bassines de Sainte-Soline: des tensions éclatent sur le site de la réserve d'eau

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Au moins 5000 manifestants sont présents ce samedi à Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres, pour essayer de bloquer le chantier d'une réserve d'eau, malgré l'interdiction préfectorale et un imposant dispositif de gendarmerie.

Un face-à-face s'est engagé ce samedi après-midi, aux alentours de 14 heures, entre plusieurs milliers de manifestants présents à Sainte-Soline, dans le département des Deux-Sèvres, pour essayer de bloquer le chantier d'une réserve d'eau, et les 1700 gendarmes mobilisés.

Des manifestants "antibassines" ont réussi à forcer des grilles protégeant le chantier de la réserve d'eau aux alentours de 15h20, selon un journaliste de l'Agence France-Presse (AFP) présent sur place. Une partie d'entre eux a également réussi à parvenir à l'intérieur. Les individus qui ont dégradé les barrières pour s'y introduire ont, ensuite, été repoussés par les gendarmes, a-t-on appris de sources concordantes.

Avec une surface à couvrir de plusieurs hectares, les forces de l'ordre avaient du mal à contenir la foule, dans laquelle des centaines de militants masqués ou cagoulés côtoyaient des familles et de nombreux retraités. Au moins 5000 personnes sont présentes, dont plusieurs centaines d'ultras, selon des sources concordantes à BFMTV. Deux fourgons de gendarmerie sont, par ailleurs, entrés en collision lors d'une manoeuvre d'urgence. Des gaz lacrymogènes ont été lancés et des élus arborant leur écharpe tricolore molestés, notamment la députée écologiste de la Vienne, Lisa Belluco, selon un photographe de l'AFP.

Cinq gendarmes et deux manifestants blessés

Cinq gendarmes et deux manifestants ont été blessés, ce samedi, lors d'une manifestation, interdite par la préfecture, à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) contre le chantier d'une réseau d'eau, a annoncé la préfète Emmanuelle Dubée. Quatre personnes ont également été interpellées.

Plus tôt dans la journée, la préfète des Deux-Sèvres avait indiqué sur BFMTV que des individus "déterminés et violents" étaient sur place. Elle entendait "faire respecter" l'interdiction de manifester et avait assuré qu'elle ne tolèrerait pas "qu'un cortège revendicatif ou que des groupes se constituent pour s'approcher du chantier de la réserve de substitution".

Un projet de 16 réserves

Les manifestants s'opposent à un projet de bassines d'eau pour l'agriculture, qui servent à irriguer les champs. Le collectif "Bassines Non Merci", qui rassemble des associations environnementales, organisations syndicales et groupes anticapitalistes, se dit opposé à cet "accaparement de l'eau" destiné à l'"agro-industrie".

"Sainte-Soline, c'est 720.000 mètres cubes d'eau sur plus de 10 hectares, 18 kilomètres de tuyaux pour des agriculteurs, dont pas un n'a renoncé aux pesticides. On ne veut pas que ça se fasse ici, on ne veut pas que ça se fasse ailleurs", a lancé ce samedi matin Melissa Gingreau, porte-parole du collectif "Bassines Non Merci".

Les réserves de substitution sont des cratères à ciel ouvert, recouverts d'une bâche en plastique et remplis grâce au pompage de l'eau des nappes phréatiques superficielles l'hiver. Ils peuvent stocker jusqu'à 650.000 m3 (soit 260 piscines olympiques) d'eau pour irriguer l'été.

La réserve de Sainte-Soline est la deuxième d'un projet de 16 élaboré par un groupement de 400 agriculteurs réunis dans la Coop de l'eau, pour "baisser de 70% les prélèvements en été", dans cette région encore soumise à des restrictions d'irrigation après une sécheresse estivale hors norme.

"Pas de conséquences négatives pour les nappes phréatiques"

Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a souligné sur France inter que le "projet n'avait pas de conséquences négatives pour les nappes" phréatiques, selon un rapport récent.

Selon cette étude du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), le projet pourrait, par rapport à la période 2000-2011, augmenter "de 5% à 6%" le débit des cours d'eau l'été, contre une baisse de 1% l'hiver, sans prendre en compte l'évaporation potentielle des futures réserves, ni la menace de sécheresses récurrentes liée au réchauffement climatique.

Le ministre a également rappelé que le "plan signé par tout le monde il y a quatre ans" après une longue concertation entre agriculteurs, élus, autorités et associations, conditionnait l'accès à l'eau à des changements de pratiques (réduction des pesticides, plantation de haies, conversion à l'agroécologie). Mais aucun des dix agriculteurs utilisant la première retenue "n'a souscrit de réduction de pesticides", selon Vincent Bretagnolle, membre du comité scientifique et technique de suivi (CST) du projet, et depuis la signature, plusieurs associations se sont retirées du protocole.

Denis Mousseau, président de la FNSEA 79 qui défend ce projet de stockage, a rappelé jeudi "la forte inquiétude" des agriculteurs locaux face à ce rassemblement. "On ne lutte pas contre les agriculteurs, on lutte contre les outils de l'agro-industrie qui fait disparaître les paysans", a déclaré Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne. "En 30 ans, le nombre de paysans a été divisé par trois".

C.Bo. avec AFP