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Vers une mobilisation massive contre la réforme des retraites, comme en 1995?

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Les syndicats appellent à une première journée de mobilisation le 19 janvier contre la réforme des retraites. Ils promettent une mobilisation "massive" qui ne sera qu'un point de départ.

Un premier "jeudi noir" dès la semaine prochaine? Face à la réforme des retraites, les syndicats ont déjà dégainé une première date de mobilisation, le jeudi 19 janvier. Tous se serrent les coudes et espèrent bien donner le coup d'envoi d'un mouvement massif et durable contre le projet du gouvernement. C'est d'ailleurs la première fois depuis longtemps que l'ensemble du spectre syndical (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) affichera son unité dans la rue – ça n'était pas arrivé depuis la réforme des retraites portée par Éric Woerth, sous la présidence de Nicolas Sarkozy.

"Si les salariés le décident, ce sera la France à l'arrêt" ce jour-là, a promis mardi soir le leader de la CGT, Philippe Martinez, sur le plateau de BFMTV.

Outre les manifestations dans les rues, les syndicats appellent à la grève dans les administrations et les entreprises. Et ils l'assurent déjà: cette journée ne sera que le point de départ d'une longue mobilisation. L'intersyndicale se réunira dès le soir du 19 janvier, aux côtés des principales organisations de jeunesse, pour inscrire une prochaine date au calendrier et prévoir d'autres initiatives, alors que le projet de loi sera présenté en conseil des ministres le 23 janvier.

"Nous pensons mobiliser massivement", a déclaré Frédéric Souillot, secrétaire général de Force ouvrière, sur BFMTV.

"On peut faire mieux" que 1995

Dans le souvenir de tous: les grèves massives de 1995 contre le plan Juppé. Le pays avait été paralysé pendant près d'un mois et jusqu'à deux millions de personnes étaient descendues dans les rues, contraignant le gouvernement d'alors à renoncer à ses mesures sur les retraites.

"On peut même faire mieux" que 1995 "parce qu'il y a du ras-le-bol", a assuré Philippe Martinez.

La mobilisation pourrait être particulièrement forte dans certains secteurs-clefs, comme l'énergie ou les transports, qui s'apprêtent à perdre leurs régimes spéciaux pour les nouveaux entrants. La menace de grèves reconductibles y a d'ores et déjà été brandie par la CGT. Plusieurs sources syndicales ont également affirmé mercredi à l'AFP s'attendre à un "conflit dur" dans les entreprises énergétiques, comme EDF ou RTE, évoquant même de possibles baisses de charge dans les centrales électriques en cas de forte mobilisation.

Les syndicats, en tout cas, peuvent compter sur le soutien de toute la gauche. Tous les partis de la Nupes s'affichent unis contre la réforme et appellent à rejoindre la mobilisation syndicale du 19 janvier. "On encourage tous les gens […] à aller distribuer des tracts pour réveiller les soignants dans les hôpitaux […], à aller chercher les enseignants dans les lycées […], à aller chercher les ouvriers dans les ateliers et leur dire 'c'est maintenant, c'est le moment'. Et ce moment, c'est jeudi prochain, dans la rue derrière les syndicats", a avancé le député de la Somme François Ruffin.

Soutien de 60% des Français

Le soutien arrive également de l'autre côté de l'échiquier politique. Le Rassemblement national, lui aussi, tonne contre le projet du gouvernement – Marine Le Pen a juré d'y "faire barrage" – même s'il privilégie une bataille politique à l'Assemblée nationale. Reste à savoir si les membres du RN qui veulent tout de même rejoindre les manifestations seront les bienvenus, tous les syndicats n'étant pas sur la même ligne à ce sujet. "Les organisations syndicales organisent cette manifestation, et derrière se mettront tous ceux qui veulent y venir", a déclaré Frédéric Souillot, du côté de FO.

Mais les Français seront-ils au rendez-vous ? Le nombre de personnes dans les rues le 19 janvier sera crucial pour les syndicats, qui veulent donner le ton pour les semaines à venir. Selon un sondage Elabe pour BFMTV, réalisé après l'annonce du projet du gouvernement par Élisabeth Borne, 60% des Français assurent soutenir la mobilisation contre la réforme des retraites. Ce chiffre grimpe à 67% chez les employés, 65% chez les ouvriers et 68% chez les 50-64 ans. Surtout, 46% des Français se disent prêts à se mobiliser dans les prochaines semaines.

"Il y aura sans doute des rassemblements, peut-être que des députés de la majorité seront interpellés par des citoyens pour leur demander des comptes", a déclaré Laurent Escure.

"Des affiches" sur les voitures

L'opposition à la réforme des retraites pourrait aussi s'exprimer d'une autre manière, a anticipé le secrétaire général de l'Unsa, Laurent Escure. "Il y aura sans doute des actions tous les jours dans les entreprises, les administrations devant les écoles, les hôpitaux et j’invite tout le monde à manifester son mécontentement simplement en mettant des affiches sur leur voiture, leur administration". Dans une note du 6 janvier consultée par BFMTV, le renseignement territorial expliquait craindre une "explosion sociale" liée à l'addition des revendications actuelles, comme l'inflation.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV