L'"animal mignon", star de la webcam

Qu'on parle de chatons, d'aigles ou de pandas, de nombreux animaux sont visibles en direct sur Internet via webcam. Parce que ces animaux sont mignons ou impressionnants, de nombreux internautes aiment s'immiscer dans leur quotidien. BFMTV.com a recueilli le témoignage d'habitués des webcams animalières.

Impossible de voir Mei Xiang et Tian Tian sur Internet. En raison de l'absence d'accord sur le budget américain, la webcam qui permet de regarder en direct les pandas du zoo de Washington a été coupée. Que les internautes victimes de ce "shutdown" se rassurent, il existe quantité de webcams branchées 24 heures sur 24.

Aigles, mygales, lions, éléphants ou écureuils: elles se sont multipliées ces dernières années. Mais comment expliquer ce succès? Pourquoi certaines personnes se passionnent-elles pour ces webcams animalières? Témoignages et décryptage.

Voir le premier envol d'un bébé faucon

"J'étais sur Internet et je suis tombé sur un nid de bébés faucons crécerelles, j'y suis resté", explique Sébastien à BFMTV.com. Ce trentenaire parisien se souvient: "Quand j'ai commencé à suivre ce nid de faucons mis en ligne par un institut suisse allemand, il n'y avait que les parents. Ensuite il y a eu les œufs, puis les bébés, puis les premiers vols. La première sortie du nid est très émouvante!"

Les animaux, ce n'est pas la passion première de Sébastien. Pour autant, pendant plusieurs semaines, il a passé entre cinq et dix minutes par jour à regarder des bébés faucons. "Parfois, j'avais même le direct en arrière-plan sur mon ordinateur pendant que je travaillais. J'y jetais un coup d'œil de temps en temps", raconte-il avant d'avouer: "On s'y attache à ces petites boules de poils."

"Ce que j'aime: c'est la surprise!"

Julia, elle, adore les pandas depuis son plus jeune âge et ne s'en cache pas. C'est en préparant un voyage en Californie qu'elle est tombée sur la "pandacam" (webcam de pandas) du zoo de San Diego. "Après les avoir vus en vrai, j'ai eu envie de prendre de leurs nouvelles, même si ce n'est pas très rationnel", reconnaît la jeune fille auprès de BFMTV.com. "Avec la 'pandacam', on peut les voir bouger, grimper, on assiste au travail des soigneurs… "

"Parfois on voyait quatre bélugas dans le bassin, parfois aucun! C'est ce que j'aime avec ces webcams: la surprise!", clame Delphine. Cette quadra vit près de Dijon et avec sa fille, et ensemble elles se sont attachées il y a cinq ans à des bélugas, des baleines de l'océan Arctique.

Et le respect de la vie privée des animaux?

"J'aimerais bien aller au Canada pour les observer dans la baie du Saint-Laurent. Par contre, aller les voir dans un bassin, ça ne me dit rien", admet Delphine à BFMTV.com. "Le bassin où je voyais un béluga était grand, peu éclairé, respectant l'animal et son intimité. Je suis tombé sur d'autres webcams de bélugas mais ça ne me plaisait pas."

Regarder des animaux dans leur quotidien, est-ce du voyeurisme? "Si c'en est, c'est tout notre rapport à la nature qui change", raconte Jérôme Michalon, sociologue spécialiste des relations humains-animaux. "Et parler de voyeurisme, c'est considérer que les animaux ont une vie privée, une intimité, ce qui est nouveau. C'est dans la tendance actuelle des zoos de respecter l'animal et éviter au maximum le contact direct avec l'humain. Cette évolution doit être la même sur Internet, où il y a un effacement de la mise en spectacle de l'animal."

Une certaine vision de la nature

Aux Etats-Unis, il est courant que des refuges diffusent sur Internet des webcams d'animaux, notamment pour des chatons. Les atouts sont nombreux: sensibiliser le public à l'abandon des animaux, leur trouver un foyer et faire parler de la cause dans son ensemble. Pauline, 20 ans, aime y aller "parce que c'est mignon un chaton et que le soir, quand je vais me coucher, ils dorment et ça me détend."

Cette étudiante en école de commerce ne s'est pas arrêtée là. "J'ai aussi regardé les cerfs d'une forêt du Vercors. Je n'ai pas souvent l'occasion de regarder la nature autour de moi alors que là je peux assister au brame du cerf pendant la saison des amours, les voir se battre. Ça fait découvrir de nouvelles choses…"

Pour le sociologue Jérôme Michelon, le public de ces "webcams animalières" est plutôt urbain. "Ce sont des personnes qui ont un rapport avec l'animal très abstrait et qui sont en recherche de nature. Ce qu'ils regardent sur Internet, ce ne sont pas les rats d'égoûts dont la vie est moins désirée, mais des animaux sauvages, des animaux 'cute'".

La dictature de l'animal mignon

Tous se l'accordent, s'ils regardent des animaux en direct c'est avant tout parce qu'ils sont mignons. "Des recherches ont été faites sur l'effet "cute", où s'ébahir sur quelque chose de mignon est une caractéristique humaine", analyse le sociologue spécialiste des relations humains-animaux.

Pour Jérôme Michalon, "il y a une notion d'esthétique environnementale. La protection d'animaux ne part pas forcément d'une idée rationnelle mais de la volonté de sauvegarder quelque chose de beau. Ce n'est pas pour rien que le panda est l'emblème du WWF!" Le problème? Le manque de mobilisation pour la défense des animaux au physique peu avantageux.

Si beaucoup aiment juste regarder de temps à autre un animal mignon se prélasser, d'autres vont bien plus loin, comme le raconte Sébastien: "Ça peut aller très loin. Certains internautes donnent des noms aux animaux, font des vidéos, des zappings des meilleurs moments, etc. Il y a aussi des forums sur le sujet: une vraie communauté s'est créée autour de ses webcams d'animaux."

|||• Sites proposant de nombreuses webcams:
> toutesleswebcams.com
> liveanimals.com

• La loutre, le nouveau panda?

Pour Pauline, "le panda est en perte de vitesse. Aujourd'hui, c'est plutôt la loutre qui est à la mode." D'ailleurs, si les zoos d'Edimbourg et d'Atlanta ont des "pandacams", la loutre n'est pas en reste: un projet de webcam de loutres vient de trouver son financement par crowdfunding.

Marc Pédeau