"Une banalisation des symboles nazis": une vente aux enchères d’objets liés au IIIe Reich suscite l’indignation

Une vente aux enchères d'objets militaire organisée à Orléans à partir de ce jeudi 15 mai fait l'objet de plusieurs demandes d'annulations, en raison des pièces nazies qui y sont proposées. Les 15 et 16 mai, puis les 26 et 27 juin, plus de 10.000 objets militaires vont être proposés aux enchères lors de ventes Militaria, parmi lesquels environ 200 arborent des symboles nazis.
La Licra dans le Loiret a réclamé mardi l'annulation de cette vente. "Quand on a appris cette vente avec des objets nazis, quand même 200 objets, on a été un petit peu choqués", a affirmé auprès de l'AFP Joëlle Gellert, présidente de la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme) dans le Loiret, notamment en raison d'un "contexte d'antisémitisme fulgurant".
De leur côté, les organisateurs réfutent tout caractère polémique à la vente, dont les objets proviennent d'une collection "loin d'être idéologique" et récupérée à la suite du décès de son propriétaire.
Des appels à l'annulation de la vente
"On est d'accord pour que ces objets soient dans un musée, qu'ils soient utilisés comme actes de mémoire pour la jeunesse. Mais nous ne sommes pas d'accord pour qu'ils soient vendus aux enchères sans savoir qui prendrait ces objets", a fustigé Joëlle Gellert.
La Licra Loiret avait appelé dans un communiqué publié vendredi "les autorités locales, ainsi que les commissaires-priseurs et les organisateurs, à prendre leurs responsabilités et à renoncer à cette vente". Le sénateur PS du Loiret, Christophe Chaillou, a également interpellé le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, pour lui demander d'annuler la vente.
"Il me semble inacceptable de pouvoir contribuer, de la sorte, à la normalisation de symboles du nazisme et de son idéologie de haine et de discrimination responsable de la mort de millions de personnes", a-t-il dénoncé.
Les organisateurs défendent leurs "précautions"
Sur BFMTV ce jeudi, Me Ghislain de Maredsous, commissaire-priseur en charge de la vente, a déclaré que "les héritiers avaient tenté de faire des donations, mais la plupart des musées concernés ont refusé". L'objectif de cette vente est donc, selon lui, de "permettre à des gens sérieux, qui ont l'esprit de collection et de l'Histoire, de s'approprier ces objets" et que "ce soit des documents pour permettre à la mémoire de ne pas disparaître".
"Le risque était que ces choses partent, sans être contrôlées, dans des réseaux" et permettent "à des personnes idéologiquement assez orientées de les utiliser", a-t-il poursuivi, sans détailler comment les acheteurs seraient contrôlés.
"Nous avons tout mis en œuvre pour respecter la sensibilité de chacun", s'est défendu la commissaire-priseur Me Cécile Solibieda, également en charge de la vente, en respect de la "loi qui oblige à ne pas exposer les insignes de façon outrancière".
Les croix gammées des insignes ont par exemple été masquées du catalogue de l'exposition sur le site Interenchères, où un message d'avertissement a aussi été ajouté. "Il faut prendre des précautions" pour "éviter l'ostentation qui pourrait nous rapprocher d'une forme d'apologie de crimes de guerre", a expliqué Ghislain de Maredsous.
Des appels à changer la loi
"Il y a des pays dans lesquels c'est interdit, en France, la loi l'autorise dans le respect des sensibilités de chacun", a précisé Me Solibieda. "Il n'y a ni idéologie, ni apologie". Selon elle, "il n'y a pas eu de débat" à organiser cette vente, "même si on s'expose, ce sont des objets d'histoire et de collection".
Dans le détail, la loi interdit l’exposition, en vue de la vente, "d’uniformes, parties d’uniforme et objets porteurs de signe nazi, ou rappelant de manière évidente les exactions commises par les nazis (étoile jaune d’époque ou même sa copie)", selon le site du Conseil des maisons de vente, l'autorité de régulation du secteur.
Ces dernières années, plusieurs ventes de ce type ont été annulées, comme à Blois en 2021. Au Puy-en-Velay la même année, ce sont plusieurs objets qui avaient été retirés de la vente. Dans son courrier à Bruno Retailleau, Christophe Chaillou a jugé "indispensable de faire évoluer la loi": "je participerai ou soutiendrai toute initiative allant dans le sens d'une interdiction de ce type de vente aux enchères".
La députée Renaissance du Loiret Stéphanie Rist a également appelé sur X à "changer la loi pour que la vente d'objets nazis ne soit plus autorisée".