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Société

Taxe à 66,66% : le Conseil d’Etat se fait l’avocat du diable

La taxe à 75% a été retoquée une première fois par le Conseil constitutionnel. Le Conseil d'Etat, à son tour, devrait proposer de nouvelles modifications.

La taxe à 75% a été retoquée une première fois par le Conseil constitutionnel. Le Conseil d'Etat, à son tour, devrait proposer de nouvelles modifications. - -

Un symbole qui prend l'eau de toutes parts : la promesse du candidat Hollande d’une taxe à 75% sur les hauts revenus se vide peu à peu de sa substance. Selon des informations du Figaro, le Conseil d'Etat défend un plafond à 66,66%, pas plus. Ce serait le seul moyen d'éviter une nouvelle censure et un nouveau camouflet.

Ce n’est pas un nombre satanique, le « chiffre du diable », mais une estimation faite à partir d’un faisceau de questions, soumises aux conseillers d’Etat par les experts de Bercy, dont le but était de dessiner une nouvelle taxe qui échapperait à la censure des sages du Conseil Constitutionnel, qui ont retoqué la précédente. Le symbole des 75%, qui a été un marqueur de la campagne de François Hollande, est passé à la trappe.
Ce sera en deçà de 70%, avait déjà révélé une source à Bercy. 66,66%, révèlent donc nos confrères du Figaro. La taxe devrait s’appliquer non plus par personne, mais par couple. Le Conseil constitutionnel avait jugé la précédente mouture confiscatoire parce qu’elle ne s’adressait pas aux foyers fiscaux.
Question : le seuil d’imposition sera-t-il à un ou deux millions par couple ? Ce sera à l’exécutif de trancher. Le dossier va être transmis à Matignon. L’arbitrage de Jean-Marc Ayrault est attendu avant l’été - il sera rendu public - pour un vote fin septembre, dans le cadre du projet de loi de finances 2014. La promesse Hollande à 75% a vécu. Ironie de l’histoire: Jérôme Cahuzac, pendant la campagne présidentielle, y était hostile.

La taxe à 75%, serpent de mer du quinquennat Hollande|||

Annoncée durant la campagne présidentielle, la taxe à 75% sur les revenus annuels supérieurs à 1 million d’euros ne se fera pas en 2013. La première mouture, qui concernait uniquement les revenus du travail, a en effet été retoquée une fois par le Conseil constitutionnel : assise sur les revenus de chaque personne physique, la taxe aurait dû être basée sur les revenus des ménages (comme l’impôt sur le revenu) pour être validée par les sages. En réalité, il s’agissait plutôt d’un taux supérieur de 18%, qui s’ajoute au taux maximum de l’impôt sur le revenu de 45%, aux 8% de prélèvements sociaux et aux 4% de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus instaurée en 2011 par François Fillon.
Le gouvernement a donc préparé une nouvelle mouture basée sur les revenus du couple : il s’agirait  d’une taxe sur les revenus par foyer, et non plus de la personne, mais cette taxe pourrait être basée sur les revenus supérieurs à deux millions d’euros au lieu d’un. En réalité, le Conseil d’Etat ne se prononcerait pas sur ce point, et c’est au gouvernement de choisir : s’il conserve le seuil d’un million par foyer (au lieu d’un million par personne), le nombre de contribuables concernées augmenterait considérablement. Il peut aussi relever ce seuil à deux millions par couple, ce qui concernerait moins de personnes.
Le Conseil d’Etat considère aussi – comme le Conseil constitutionnel – que tous les revenus doivent être pris en compte, et non plus seulement les revenus du travail comme la première mouture de la loi. Par ailleurs, le taux même de la taxe, très symbolique, devrait être modifié. Au-delà de 66,66%, cet impôt serait jugé confiscatoire et pourrait donc être à nouveau rejetée par le Conseil constitutionnel. Au lieu des 18% d'impôts supplémentaires exceptionnels, le gouvernement devrait donc se contenter d'un montant maximal de 9,6%. Quels que soient ses choix, le gouvernement devrait présenter une nouvelle version de son texte dans le projet de loi de finances 2014.

Jean-François Achilli