Sans-papiers : bientôt 16h de rétention ?

Le centre de rétention du Mesnil-Amelot - -
Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls présente vendredi en Conseil des ministres un projet de loi permettant de retenir jusqu'à 16 heures les sans-papiers au commissariat pour engager une procédure d'expulsion. Un dispositif destiné à remplacer leur garde à vue, désormais illégale, depuis juillet dernier.
Depuis juillet, les étrangers ne peuvent donc pas être retenus plus de 4 heures comme le prévoit la procédure de vérification d'identité. Un délai souvent trop court, le temps de trouver un interprète, d'interroger la personne et de vérifier si elle a déjà fait l'objet d'une procédure dans les fichiers de la préfecture.
Taux de remplissage sous les 30%
Conséquence : une baisse du taux de remplissage des centres de rétention où sont placés les clandestins avant d'être expulsés, et un nombre de reconduite à la frontière qui risque de baisser mécaniquement. Lucie Feutrier, responsable de la Coordination des centres de rétention pour l’Ordre de Malte constate la baisse du taux de remplissage depuis juillet : « On a constaté qu’il y avait une baisse du nombre de personnes placées. Au niveau du taux de remplissage des centres, on est sous la barre des 30%, si ce n’est moins. Si vous prenez par exemple le centre de rétention de Lille, qui peut accueillir jusqu’à 80 personnes, on est plutôt autour de 15 personnes en général. Mais effectivement, pour nous, la baisse s’accompagne de la fin de la garde à vue pour les étrangers et donc de moins de facilité pour les forces de police pour pouvoir placer en rétention ».
« Nouveau régime de privation de liberté »
Le nouveau projet passe mal du côté des associations d’aide aux migrants. « Pour moi ce n’est pas du tout satisfaisant, dans la mesure où c’est un nouveau régime de privation de liberté uniquement destiné à des migrants qui n’ont commis aucun délit, alors qu’en toute logique on devrait aller vers la fin de l’enfermement massif et systématique des migrants et vers de nouvelles politiques de l’immigratio », s’insurge David Rohi, responsable de la Commission éloignement de la Cimade.
« Difficultés de procédure »
Pour l’opposition, le nouveau projet arrive un peu tard. « Ça fait 5 mois qu’il y a des difficultés de procédure, déplore Guillaume Larrivé, député UMP de l’Yonne, ancien conseiller de Brice Hortefeux au ministère de l’Immigration. 65% des centres de rétention sont vides ça veut dire nécessairement que le nombre des reconduites à la frontière est en diminution. Je crois qu’aujourd’hui qu’il n’y a pas la volonté de lutter fermement contre l’immigration irrégulière. J’en veux pour preuve que Manuel Valls a supprimé les objectifs chiffrés d’éloignement qui étaient jusqu’alors fixés aux préfets, aux policiers et aux gendarmes ».