Racisme: les Français approuvent les sanctions

Manifestation contre le racisme à Avignon, en 2010 - -
Quarante ans après la promulgation de la loi Pleven qui punit le racisme, les mentalités ont, semble-t-il, évolué en France. Selon une étude de la LICRA (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme) parue mercredi, 85% des Français se disent favorables au fait de punir la provocation à la haine ou à la violence raciste, l’injure ou la diffamation à caractère raciste.
La loi Pleven, promulguée en 1972, réprime l'injure et la diffamation à caractère racial. Cette loi condamne les écrits, les paroles ou les dessins proférés dans des lieux publics, qui provoquent la discrimination, la haine, la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe en raison de ses appartenances. Les sanctions vont de la simple amende (1 500 euros pour incitation non publique à la haine ou à la discrimination) à 5 ans de prison ferme (pour apologie de crimes contre l'humanité).
« Un sentiment d’impunité » sur Internet
Mais aujourd’hui, malgré un durcissement des peines en 1994, l'arsenal judiciaire en vigueur reste incomplet. Il subsiste une sorte de zone de non-droit où les propos racistes peuvent librement s’exprimer : Internet.
« On a constaté que les organisations d'extrême-droite avaient des militants capables de diffuser leur propagande raciste sur Internet, explique Samuel Thomas, ancien vice-président de SOS racisme. La loi en tout cas ne permet pas à un juge d'instruction de mener les investigations qui permettent de remonter jusqu'aux auteurs, qui prennent des adresses internet à l'étranger. Donc il y a des vides juridiques et ils ont su en tirer parti ».
Selon Alain Jacubowicz, le président de la Licra, à l'origine de ce sondage, « le racisme a pris d'autres formes parce que la société a évolué. Notamment avec l'émergence d'Internet qui est le vecteur le plus puissant de la libération de la parole raciste. Les gens qui propagent cette idée ont un sentiment d'impunité, cachés derrière leur écran. Indépendamment de cela, on a évidemment des éléments qui sont liés aux phénomènes d'actualités. Depuis cette horrible affaire Mérah, à Toulouse, on a vu une montée des actes racistes et antisémites. Traditionnellement, la violence met un coup d'arrêt à la violence, mais là, la violence suscite la violence ».
Le racisme, pas suffisamment puni par la loi pour 41 % des Français
L’actualité qui suscite le racisme, Internet qui favorise sa diffusion… Selon l’étude de la Licra, 27% des personnes interrogées se considèrent comme « plutôt » ou « un peu » racistes. Interrogé par RMC, Jean-Paul ne s’en cache pas, il lui arrive d’avoir des pensées xénophobes : « Tout le monde est un peu raciste. Parce que quand je vois, par exemple, des cambrioleurs ou même des assassins qui ont un nom étranger, ça me fait mal au ventre ». Mohamed estime toutefois que la xénophobie a changé depuis son enfance. Il a aujourd’hui 34 ans, mais se souvient de ce qu’il entendait à l’époque : « sale bougnoule ». De tels propos, il ne les entend plus jure-t-il, mais il constate que le racisme, de nos jours, « est plus caché. Vous avez un entretien (d’embauche), même si celui-ci s'est bien passé, on vous dit vous n'avez pas le profil ».
40 ans après, certains Français aimeraient que la loi Pleven soit durcie ou complétée par d’autres mesures. Car selon l’étude de la Licra, 41% des personnes interrogées jugent que le racisme n’est pas suffisamment puni par la loi.