Pénalisation des clients: "il y aura plus de viols et de meurtres", selon un prostitué

Travailleur du sexe et coordinateur du collectif "Droits et prostitution", Thierry Schaffauser a détaillé jeudi sur BFMTV les raisons de son opposition à la pénalisation des clients de prostitué(e)s.

"Il va y avoir plus de viols, plus de violence, plus de meurtres", a alarmé Thierry Schaffauser, coordinateur du collectif "Droits et prostitution". Invité de BFMTV à la veille de la seconde lecture à l'Assemblée nationale de la proposition de loi renforçant la lutte contre la prostitution, le jeune homme de 32 ans, dont douze passés à se prostituer, estime que la pénalisation des clients "va forcer à la dispersion des zones de prostitution. En devant se cacher pour maintenir sa clientèle, ça nous met en danger (...) C’est une attaque directe sur nos revenus (...) Pour les associations de santé aussi, ça va être plus difficile de faire le travail de prévention."

"Une volonté prohibitionniste"

"Je ne pense pas que le client soit complice. Je pense qu'il peut au contraire être un allié dans la lutte contre la traite, plaide-t-il. Dans les pays où il y a des numéros verts qui sont en place, on se rend compte que la majorité des appels provient des clients qui dénoncent des abus et des cas d’exploitation." Selon lui, "cette pénalisation va nuire à tout le monde, même aux victimes de la traite, parce qu'on gâche les ressources de la police en arrêtant les clients."

Thierry Schaffauser estime d'ailleurs que la grande majorité des prostitué(e)s ne sont pas victimes de réseaux de prostitution "contrairement à ce que racontent les politiciens et le gouvernement." Le jeune homme s'appuie sur une étude de l'université Aix-Marseille qui met par ailleurs en exergue que "98% des prostitués sont contre la pénalisation des clients".

Ce jeudi après-midi, Thierry Schaffauser a manifesté aux côtés d'une cinquantaine de travailleurs du sexe à Paris pour dénoncer la "volonté prohibitionniste" des députés. "C'est indigne de pénaliser la sexualité entre adultes consentants", indique celui qui "n'a pas dans l'immédiat l'intention d'arrêter (...) ce métier pas comme les autres."

"Dans la même situation que les pédophiles"

Le coordinateur du collectif "Droits et prostitution" dénonce notamment l'article 1er de la proposition de loi qui obligerait "les fournisseurs d'accès à internet à empêcher l'accès aux sites hébergés à l'étranger qui contreviennent à la loi française contre le proxénétisme et la traite des êtres humains." "On se retrouve dans la même situation que les pédophiles et les terroristes", s'irrite Thierry Schaffauser, qui espère un jour avoir "les mêmes droits que les autres travailleurs".

Seule mesure positive dans cette loi selon ce dernier: la suppression du délit de racolage, à condition "qu'on nous impose pas des arrêtés municipaux, car ça reviendrait au même."

Jérôme Morin