Mort de Paul Aussaresses: "la face sombre de la guerre d'Algérie"

Le général Paul Aussaresses après la sortie de son livre, abordant la pratique de la torture en Algérie. - -
Pas d'éloge funèbre pour Paul Aussaresses. L'annonce de la mort de l'ancien général, ce mercredi, a essentiellement suscité des commentaires sur ses prises de position sur la torture en Algérie. "C'est la face sombre de la guerre d'Algérie", a estimé le ministre délégué aux Anciens combattants Kader Arif.
"C'est quelqu'un qui ne correspond pas à l'idée que je me fais d'une mémoire apaisée, la recherche d'une réconciliation", a commenté le ministre. "C'est quelqu'un qui, pour moi, représentait l'inommable et l'inacceptable pour tout conflit."
Dans un livre paru en 2001 (Services spéciaux, Algérie 1955-1957, chez Perrin), Aussaresses expliquait qu'il avait torturé et procédé à des liquidations sommaires durant la guerre d'Algérie. Des actes qu'il avait par la suite revendiqués. Poursuivi pour "apologie de crimes de guerres, il avait été condamné en 2004.
Collard parle de ses "liens filiaux"
Celui qui fut son avocat lors du procès, Me Gilbert Collard, se veut plus nuancé. "J'avais des liens vraiment filiaux avec lui", confie-t-il à BFMTV. L'avocat, aujourd'hui député du Rassemblement bleu Marine, se souvient également d'une conversation qu'il avait eu à ce moment-là avec son client sur la torture.
"Je lui ai dit: 'général, comment un héros comme vous a-t-il pu pratiquer la torture?' Et il m'a dit: 'le jour où j'ai vu un enfant déchiqueté, plus jamais je ne laisserai une bombe exploser. Si vous êtes dans une pièce avec une bombe qui va exploser, n'auriez-vous pas envie qu'un salaud comme moi sache où elle est pour qu'il puisse la désamorcer?'", relate Gilbert Collard. "Ce jour-là, il a posé concrètement le problème de la torture", estime-t-il.
"Il a brisé un tabou"
Sur ce sujet très sensible, l'homme "a brisé un tabou", a analysé sur le plateau de BFMTV Kader Abderrahim, chercheur à l'Iris et spécialiste du Maghreb.
"Il était l'un des très rares, voire l'unique officier supérieur de l'armée française à avoir assumé, voire revendiqué ce qui s'était passé pendant la bataille d'Alger. Beaucoup d'autres militaires français ont non seulement nié leur participation, mais aussi rejeté cette pratique, dont on savait qu'elle était assez courante pendant la guerre d'Algérie."
Après ses révélations, Paul Aussaresses avait été mis en retraite d'office et sa Légion d'honneur lui avait été retirée.