Mariage homo: les opposants se désinhibent

Des opposants au mariage gay, les "Homen", manifestent à demi-nu dans Paris, à l'instar des Femen. - -
Exaspérés de voir le texte ouvrant le mariage aux homosexuels arriver ce jeudi au Sénat, les opposants se radicalisent. Le ton se durcit, les actes aussi, et lentement, la belle union affichée par le collectif Manif pour tous semble se laisser déborder par la multiplication des actions, sans cohérence entre elles, laissant d'ailleurs apparaître un collectif dissident et plus dur, le Printemps français.
Ainsi, ce jeudi, à l'aube, la sénatrice UDI Chantal Jouanno et ses enfants ont été réveillés en fanfare à leur domicile par une soixantaine de manifestants du Printemps français. Une cacophonie peu goûtée par la frange dure des catholiques: l'association Civitas - membre d'aucun collectif, mais également opposée au texte de loi - qui organise une manifestation silencieuse dans l'après-midi, appelant les gens à prier en pleine rue.
La veille, le GUD de Nancy avait posté sur Facebook une image choc où la silhouette d'un homme passe un tabac un homosexuel. Le jour d'avant, des enfants de militants posaient avec des pancartes devant des monuments aux morts…
Des exemples qui montrent que le débat sur le mariage pour tous a totalement désinhibé la parole des plus radicaux.
Le "réveil" des catholiques
Les catholiques les plus radicaux opèrent un retour en force dans la parole publique sur le sujet. "On les avait entendu lors du débat sur le PACS, mais là, c'est autrement plus fort", analyse Jean-Yves Camus, chercheur associé à l'Institut de relations internationales et stratégiques.
"C'est une révolte que l'on n'aurait pas pu voir il y a quinze ans. Le quinquennat de Nicolas Sarkozy a été celui de la libération de la parole et a fait sauter des sujets tabous. Parallèlement, l'Eglise a opéré un tournant conservateur depuis Jean-Paul II, après les années de progressisme qui ont suivi Vatican II."
L'apparition de la parole identitaire
Dans les éléments de langage véhiculés par les opposants au mariage homo, les messages à caractère identitaire se multiplient ces dernières semaines. "La fierté d'être français est de plus en plus mise en avant lors des actions des opposants. L'argumentaire dépasse le cadre de la loi sur le mariage pour tous, et se radicalise", note Nicolas Gougain, président de l'Inter-LGBT. Son association a justement porté plainte mercredi contre le GUD de Nancy, un groupuscule d'extrême-droite, pour une image jugée homophobe.
Cette dérive de la rhétorique anti-mariage homo vers l'identité française trouve encore une fois son explication dans "l'héritage culturel catholique de la France", selon Jean-Yves Camus.
"L'identité française a un historique et une culture catholique, avec le référentiel moral que cela suppose. Or, pour les opposants, en touchant à la structure de la famille, on touche à la pérennité même de la nation. On participe à une sorte d'entreprise de décadence du pays. Donc je ne crois pas que les groupuscules d'extrême-droite soient ceux qui dictent aux centaines de milliers d'opposants cette parole identitaire. Ils demeurent très minoritaires." Jusqu'à quand?
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