L’avocat Jacques Vergès est mort à 88 ans

Jacques Vergès est mort à 88 ans. - -
Il aimait, lui-même, se faire appeler « l’avocat du diable ». Le très controversé Jacques Vergès est mort, jeudi à Paris, à l’âge de 88 ans. Célèbre notamment pour avoir défendu le nazi Klaus Barbie lors de son procès à Lyon en 1987, il a également été l'avocat du terroriste Carlos, de l'ancien président serbe Slobodan Milosevic, sans oublier Omar Raddad, le jardinier marocain ou des dirigeants africains comme Laurent Gbagbo. Parmi les autres faits marquants de sa vie : la résistance à 17 ans, son engagement dans la guerre d'Algérie aux côtés du FLN, ou encore sa disparition entre 1970 et 1978, alors que personne ne sait où il était passé.
« Un agitateur public »
« Il a été un agitateur public mais avant tout un avocat défenseur de bourreaux comme de victimes, qui cultivait un épais mystère », voit Christiane Ferral-Schuhl, bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris. « C’était un homme engagé, il considérait que l’avocat était avant tout celui qui porte la parole et que tout individu a le droit de s’exprimer dans un procès, il portait cette parole de manière parfois extrême, mais c’était sa conception de ce que devait être l’avocat ».
« Un avocat assez moyen, un homme exceptionnel »
Avocat, ancien ministre délégué à la justice, Georges Kiejman a « affronté » Jacques Vergès plusieurs fois dans les prétoires. « Je garde de Jacques Vergès le souvenir d’un homme fascinant et mystérieux. On ne sait pas tout sur lui, en particulier sur sa disparition pendant une période de 7 ou 8 ans. Personne aujourd’hui encore n’est capable de dire où il était. Est-ce qu’il était au service d’organisations politiques internationales qu’il aurait défendu jusqu’au bout ? Est-ce qu’il a été pris subitement d’une crise de scepticisme et il s’est dit qu’il allait devenir ce qu’on appelle un aventurier judiciaire ? Je suis incapable de le dire ». Surtout, Georges Kiejman admire l’homme pour ses combats. « Ce que j’admirais, c’était la conviction, la force avec laquelle il défendait ses idées. Mais c’était une admiration limitée : quand on me demandait ce que je pensais de lui, j’avais tendance à répondre « un avocat assez moyen, un homme exceptionnel ».
« De ceux qui ont honoré la profession »
Pas du tout l’avis de Christian Charrière-Bournazel, l'ancien président du Conseil national des barreaux pour qui « Jacques Vergès était un très grand avocat malgré tout ce qu’on peut dire de lui à propos de quelques provocations qui lui étaient familières ». Et un avocat jusqu’au bout, relève-t-il. « Je l’ai vu il y a une dizaine de jours, il était encore dans le souci d’être l’avocat, même s’il était un peu diminué. Cet homme extrêmement cultivé fait partie de ceux qui ont honoré la profession, et Jacques Vergès, de ce point de vue, reste quelqu’un de symboliquement très important ».