«Ils ont pris ma tête pour un ballon de foot...»

Bruno Wiel, tabassé il y a quatre ans à la sortie d'un bar gay, témoigne sur RMC avant l'ouverture du procès de ses agresseurs présumés. - -
C'était en juillet 2006. Alors qu'il sortait d'un bar gay, Bruno Wiel était tombé sur quatre jeunes originaires d'une cité de Thiais (Val-de-Marne), en état de grande ébriété. En quelques minutes, il s'était pratiquement vu mourir. Coups de pieds, tortures, agression sexuelle... Plongé dans un coma artificiel suite à un traumatisme crânien, il était resté sept mois à l'hôpital, avant de réapprendre à vivre: marcher, lire, parler, écrire. Même s'il ne pourra jamais revivre normalement - il souffre notamment d'une amnésie totale de ce qui s'est déroulé ce soir-là -, il attribue aujourd'hui sa survie à un vrai miracle.
Alors que s'ouvre ce mardi, devant la Cour d'assises, le procès de ses agresseurs présumés et de leurs complices, Bruno témoigne sur RMC, de ce qu'il a vécu : « Je n'ai aucun souvenir de cette agression. Selon les médecins, ça serait "volontaire" de ma part de vouloir occulter toute cette violence et toute cette barbarie ; d’autres médecins disent que ça peut revenir à tout moment donc j’appréhende un peu le fait de les voir bouger ou parler. Que cela me débloque ces souvenirs. J’ai pas du tout envie de me souvenir donc j’ai très peur de les voir. Ça fait quatre ans que je lis pratiquement quotidiennement toutes ces horreurs ; je ne connais pas la vérité mais j’essaie de croire les versions qui sont les moins humiliantes pour moi parce que c’est très violent, c’est vraiment très dur à lire. Et de l’entendre ça sera encore plus dur ».
« J'ai failli mourir pour 10 euros »
« C’est de l’homophobie, ils l’ont déclaré, c’est écrit noir sur blanc dans les déclarations qu’ils ont faites aux policiers. Ils m’ont dragué, l’un se faisant passer pour un homosexuel. C'est bien réfléchi. Ça va avec tout le cliché comme quoi tous les homosexuels sont riches. Mais ils sont tombés sur la mauvaise pomme avec moi, parce que je n’étais sorti qu’avec 10 euros ce jour là. Donc voilà, j’ai failli mourir pour 10 euros. Je ne vois pas comment on peut aller à de telles extrémités de violence. Je sais même pas comment j’ai fait pour survivre, puisque quand on lit les premiers pronostics des médecins auprès de ma famille, c’était qu’ils me placent dans le coma mais que j’en sortirai pas. Et si jamais j’en sors, je serai un légume. Et je suis ni l’un ni l’autre, je suis handicapé du fait de mes problèmes de mémoire ou de rapidité d’exécution. Si je vais chercher des cigarettes, je peux très bien me dire au bout de 30 mètres "mince qu’est ce que je suis allé chercher ?". Je vis, certes, mais je survis aussi ».
« Le ballon de foot est plus costaud qu'ils ne le pensaient »
« Il y en a sûrement d’autres de victimes d’homophobie ou de discriminations, et j’attends de ce procès que la peine soit exemplaire. Je veux vraiment qu’ils paient. Ils n’auront jamais une peine à la hauteur de ce que je vis actuellement. Mais je m’en sors tellement bien que je suis plutôt fier de moi et je vais être super fier de me montrer devant eux et d’utiliser de belles phrases très compliquées, uniquement pour leur montrer que comme ils l’ont déclaré, ils ont pris ma tête pour un ballon de foot, mais qu’au final le ballon de foot est beaucoup plus costaud qu’ils ne le pensaient ».