Banlieue : une aide ciblée pour 6 départements?

A Sevran, la rénovation urbaine représente 7 millions d'euros en 2012. - -
Pas de ciblage et trop de saupoudrage: voilà comment résumer la politique de la ville menée depuis dix ans dans les quartiers populaires, selon le rapport publié hier mardi par la Cour des comptes. Après deux ans d'étude, ses conclusions sont sans appel : les différentes actions publiques menées en faveur de la banlieue depuis dix ans n'ont pas permis de réduire la fracture urbaine. La juridiction recommande donc une réforme radicale de la géographie prioritaire. Pour réduire les inégalités dans les banlieues, la Cour des comptes préconise une aide ciblée. Ainsi, les aides en faveurs des zones urbaines sensibles (ZUS) devraient, selon elle, se focaliser sur les six départements qui rencontrent les plus grandes difficultés : la Seine-Saint-Denis, le Val-d’Oise, l’Essonne, les Bouches-du-Rhône, le Nord et le Rhône. En clair : « concentrer l'effort » sur un nombre réduit de « cibles », dans un souci d'efficacité.
Si cette mesure rentre en vigueur, elle ne sera franchement pas populaire dans les villes des départements mis à l'écart, comme les Yvelines.
« Ça suppose que dans les départements "riches", il n’y a pas de pauvreté »
Présidente de l'association « Ville et Banlieue », Catherine Arenou est la maire de Chanteloup-les-Vignes, dans les Yvelines : « Si on concentre les aides sur six départements, ça laisse supposer que dans les départements dits riches, il n’y a pas de situation extrême, ni de pauvreté. A Chanteloup, ville qui n’a que 28% d’habitants éligibles à l’impôt, classée parmi les 150 villes les plus pauvres de France, on est en train de sortir difficilement la tête de l’eau. Si on s’arrête là, on reviendra en arrière, et cela pourrait même être pire ! », avertit-elle.
« Casser les barres d'immeubles, aérer les quartiers »
La Seine-Saint-Denis est, après Paris, le département dont l'enveloppe budgétaire est la plus faible, alors que le département est le plus pauvre de toute la région. Emmanuel Kujawski est adjoint au maire de Sevran, au coeur du 93. Pour lui, « s’il y a plus de moyens pour notre département, ça peut être positif. On est face à des quartiers construits à une époque où on ne se rendait pas compte qu’ils allaient devenir des ghettos. En gros, on a une route qui passe par quartier : une entrée, une sortie. C’est insupportable pour la vie des gens ». Face à une telle situation, les solutions sont parfois radicales : « Casser une barre d’immeubles par exemple, pour aérer le quartier », explique l’élu, qui précise : « Cette année à Sevran, dans le budget 2012, la rénovation urbaine représente 7 millions d’euros. Si on pouvait mettre plus, évidemment, on le ferait ! »
Ici, en quelques années, six barres HLM ont été détruites. Une septième, complètement vidée de ses habitants, attend l’arrivée des pelleteuses prévue dans quelques jours.