"Variole du singe": suis-je encore protégé en ayant été vacciné avant 1980?

Les personnes nées avant 1980 seraient-elles déjà protégées contre la "variole du singe", renommée mpox? L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a décrété mercredi 14 août son plus haut niveau de vigilance face à la recrudescence de cette maladie en Afrique de l'Est. Une inquiétude d'ampleur mondiale alimentée par la présence d'un nouveau "variant", le clade 1b, qui semble se répandre comme une traînée de poudre.
Ainsi, comme lors de la première épidémie de 2022, de nombreuses questions autour de la vaccination se posent, notamment sur les personnes concernées par la campagne en cours.
Comme l'indique à ce stade le ministère de la Santé, sont notamment éligibles à la vaccination les hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes, les travailleurs du sexe, mais aussi les "cas contact" ayant été exposés à la maladie il y a moins de quatre jours.
Une immunité croisée
Mais pourquoi certaines personnes nées avant 1980 pourraient-elles déjà bénéficier d'une protection contre le mpox sans même le savoir? Cela tient d'une méconnaissance des modes de protection actuellement employés pour se prémunir du virus. Et, plus particulièrement, de l'origine même du vaccin protégeant de cette maladie.
En effet, ceux qui reçoivent l'injection sont protégés grâce à un cousin de la "variole du singe" : la vaccine. Les produits actuels "dérivent tous du virus de la vaccine", comme le rappelle auprès de BFMTV le professeur Jean-Daniel Lelièvre, membre du Vaccine research institute et médecin au service des maladies infectieuses de l'hôpital Henri Mondor (AP-HP).
C'est déjà cette même vaccine qui servait de protection contre la variole (humaine). Or, toutes les personnes nées avant 1980 et l'éradication planétaire de la maladie ont été vaccinées contre l'ancienne variole, ce qui les protège - à un certain degré - contre le mpox.
"Quand on a commencé à vacciner contre la variole on utilisait des vaccins vivants atténués qui étaient associés à des problèmes d'effets indésirables et de mauvaise tolérance. (...) Donc on a fait en sorte de développer des nouveaux vaccins qui soient beaucoup mieux tolérés et c'est le cas du vaccin dont on dispose à l'heure actuelle" ajoute Jean-Daniel Lelièvre.
Des anticorps présents, même plus de 40 ans après
Chez les quinquagénaires et plus, une forme d'immunité partielle subsiste. Et les traces tangibles de ces défenses naturelles ont même été identifiées par les chercheurs de l'Institut Pasteur plus de quarante années plus tard.
"On arrive à retrouver chez une fraction importante d'entre elles (les personnes vaccinées nées avant 1980, NDLR) des anticorps qui sont capables de neutraliser mpox", explique le professeur Olivier Schwartz à la tête de l'unité "virus et immunité" de l'institut. Si les anticorps sont toujours présents chez une partie des testés, leur taux est cependant "très faible".
Ces défenses peuvent être aisément réactivées grâce à une dose de rappel. "Une dose de vaccin suffit à booster la réponse acquise même il y a plus de 40 ans", assure le chercheur.
Les personnes éligibles à la vaccination en 2024 et ayant déjà reçu cette protection il y a plusieurs décennies sont donc incitées à demander leur nouvelle dose dans l'un des 232 centres dédiés aux injections actuellement ouverts.
Une protection contre le nouveau variant?
Les Français nés avant 1980 pourraient également bénéficier d'une forme de protection contre le nouveau variant, le clade 1b. S'il est trop tôt pour connaître l'efficacité des injections déjà disponibles sur cette nouvelle forme du virus, les chercheurs sont globalement très confiants.
"Il existe des vaccins dits de 3e génération qui sont sûrs et efficaces contre mpox. Ils ont montré leur efficacité par exemple en 2022 lorsqu'il y a eu l'épidémie de mpox avec le virus de la clade 2b", détaille le professeur Olivier Schwartz.
"La famille des virus mpox comprend des membres qui ont une composition génétique très proche, donc on s'attend à ce que le vaccin disponible actuellement soit efficace contre le variant clade 1b qui circule actuellement en Afrique (...) même si cela n'a pas été formellement démontré pour l'instant".
"Nous ne sommes pas inquiets de l'émergence de cette nouvelle épidémie avec un virus mpox un petit peu différent de celui de 2022. L'efficacité attendue est exactement la même et est aux alentours de 80%", assure pour sa part Jean-Daniel Lelièvre.
Cette nouvelle donne, l'apparition d'un nouveau type de mpox, a par ailleurs poussé les autorités sanitaires françaises à voir s'il fallait réévaluer la réponse vaccinale de l'Hexagone face à l'épidémie.
Comme l'a annoncé le Premier ministre démissionnaire Gabriel Attal le 20 août, la Haute autorité de santé doit prochainement actualiser ses recommandations. Elle pourrait, par exemple, conseiller un rappel vaccinal aux personnes ayant reçu une protection en 2022, ou dans les années 1970. Son avis est attendu le 30 août.