Variole du singe: pourquoi l'Espagne est-elle fortement touchée?

L'hôpital La Paz à Madrid, le 17 mars 2020. - PIERRE-PHILIPPE MARCOU / AFP
Avec une trentaine de cas confirmés, l'Espagne figure parmi les pays les plus touchés par la variole du singe, cette zoonose originaire d'Afrique qui se répand depuis début mai en Europe. Alors que le pays recherche son patient zéro, deux importants foyers de contamination ont été identifiés par les autorités sanitaires locales, permettant de mieux appréhender les mécanismes à l'œuvre derrière la transmission de cette infection.
Un sauna gay de Madrid à l'origine d'un foyer
Les recherches se sont d'abord portées sur Madrid, la capitale du pays qui concentre l'immense majorité des cas positifs ou soupçonnés à l'échelle nationale. Vendredi, les autorités sanitaires madrilènes - en Espagne, la santé relève des régions - ont fermé un sauna gay, El Paraiso, situé en plein cœur de la ville. Ce dernier est soupçonné d'avoir constitué un foyer de contaminations important de la maladie, qui touche dans la grande majorité des cas des hommes ayant des relations homosexuelles.
"La majorité des personnes testées positives ont un lien avec ce foyer", a expliqué Enrique Ruiz Escudero, en charge de la santé dans la région de Madrid.
Sur son compte Instagram, le sauna El Paraiso se décrit comme "la meilleure ambiance gay dans le meilleur sauna de Madrid", avec "1400m² d'aménagements pensés pour votre plaisir".
Dans un communiqué daté du 23 mai, l'établissement a tenu à rappeler qu'il "respectait strictement toutes les mesures sanitaires. Par conséquent, le sauna El Paraiso exclut toute responsabilité dans les faits liés à la variole du singe".
"La propagation de la maladie se fait par contact étroit entre les personnes, donc à l'extérieur ou à l'intérieur du sauna, sans que cet établissement soit à l'origine de cette maladie ou d'aucune autre", ajoute le communiqué.
Une super pride également pointée du doigt
Dans le viseur des autorités espagnoles se trouve également la Maspalomas Pride, qui s'est déroulée du 5 au 15 mai dernier sur l'île de Grande Canarie, aux Canaries, rassemblant plusieurs dizaines de milliers de participants.
Le quotidien madrilène El Pais précise ainsi que deux jeunes Italiens ayant pris part aux festivités ont été testés positifs à la variole du singe une fois de retour à Rome, ainsi qu'un habitant de l'île. La pride de Maspalomas est un des "temps forts du calendrier gay", continue El Pais.
Une source parmi les autorités sanitaires a également indiqué au quotidien que "parmi les 30 personnes testées positives à Madrid, plusieurs se sont rendues au festival. Mais il n'est pas encore possible de dire si l'un d'entre eux est le patient zéro, où s'ils sont tous tombés malades là-bas".
Parmi les deux festivaliers italiens, l'un s'était déjà rendu dans un centre médical à Gran Canaria, atteint d'une importante fièvre, de douleur, mais également de démangeaisons cutanées, avant de finalement reprendre un avion pour la capitale italienne.
Andrea Antinoria, directeur de l'unité d'immunodéficience virale à l'institut Spallanzani, où sont hospitalisés les deux Italiens, a indiqué: "La maladie n'est pas sexuellement transmissible. Mais la contagion se réalise lors de contacts rapprochés, comme ceux qui se déroulent lors de rapports sexuels, mais pas uniquement.
Des patients qui continuent à arriver dans les hôpitaux
En Espagne, la grande majorité des personnes atteintes par la variole du singe ou soupçonnées de l'être sont des jeunes hommes, ayant en moyenne 35 ans. La communauté de Madrid a précisé que plusieurs autres cas étaient encore à l'étude, et que le nombre de contaminations allait augmenter, alors que de nombreux patients atteints des symptômes assimilables à la variole du singe continuent d'arriver dans les hôpitaux.
Selon le quotidien espagnol ABC, l'hypothèse première selon laquelle le virus aurait d'abord émergé au Portugal semble perdre en crédibilité. Le patient zéro à l'échelle européenne pourrait en réalité provenir du Royaume-Uni. Lundi, Londres a d'ailleurs ravi à l'Espagne le plus grand nombre de contaminations au monde, avec 57 cas confirmés.
Toujours selon ABC, qui cite Elena Andradas, la directrice de la santé publique du ministre de la Santé de Madrid, les autorités espagnoles enquêteraient également sur le phénomène du "chemsex", qui consiste à lier relations sexuelles à usage de stupéfiants et que pratiquent certains hommes homosexuels.