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Variole du singe: pourquoi est-il si difficile de prendre rendez-vous pour se faire vacciner?

Image d'illustration - une personne se faisant vacciner

Image d'illustration - une personne se faisant vacciner - Fred TANNEAU © 2019 AFP

La France a annoncé l’élargissement de la vaccination contre la variole du singe à partir de cette semaine mais les autorités sanitaires sont critiquées en raison de la difficulté à obtenir un rendez-vous.

Depuis lundi, les témoignages évoquant des difficultés pour accéder à la vaccination contre la variole du singe se multiplie. "J’ai envoyé un mail à tous les centres proposés: aucune réponse", écrit un internaute. "Pas accès au vaccin faute de dispos", assure un autre. Tous s'inquiètent de la possibilité d'être contaminé par quelqu'un, ou de contaminer quelqu'un, au cours de l'été, alors qu'un vaccin existe.

"Avec déjà 600 cas confirmés dans notre pays (912 selon le dernier bilan daté de mardi, NDLR) et probablement beaucoup d'autres à venir, les difficultés rapportées concernant la vaccination - pour obtenir un rendez-vous notamment - doivent être résorbées afin de contenir l'épidémie", écrivait mardi le député Arthur Delaporte (Nupes), dans une question au gouvernement.

Face à la montée des cas de variole du singe et aux difficultés de retracer les chaînes de contamination, la France a pourtant annoncé vendredi l’élargissement de la vaccination dès ce début de semaine. Recommandée jusque-là aux cas-contacts, la vaccination peut désormais se faire de façon préventive aux "groupes les plus exposés au virus".

Elle concerne "les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes et les personnes trans rapportant des partenaires sexuels multiples, les personnes en situation de prostitution, les professionnels des lieux de consommation sexuelle", précise la HAS.

"Nous n'avons que 40 doses pour la semaine!"

À partir de ce lundi, une douzaine de lieux devaient ainsi proposer la vaccination en Ile-de-France, région la plus touchée à ce jour avec 569 cas confirmés. Mais les témoignages sur les réseaux sociaux pointent du doigt l'impossibilité de se vacciner, par manque de créneaux disponibles, ce que confirme de rapides recherches sur Doctolib. Des rendez-vous apparaissent parfois, mais sont rapidement pris d'assaut.

"Les plages de vaccination à Bichat sont saturées", répond ainsi l'hôpital par mail après une sollicitation pour un rendez-vous. "Pour toute demande de vaccination, vous pouvez contacter les autres centres de vaccinations", qui sont eux aussi surchargés, et manquent de vaccins.

"Arrêtez d'insulter le personnel qui a reçu ce matin plusieurs centaines d'appel pour le vaccin (de la variole du singe) alors que nous n'avons que 40 doses pour la semaine!", écrit ainsi sur Twitter Willy Rozenbaum, médecin à l'hôpital Saint Louis à Paris. "On ne peut pas admettre le défaut d’informations transparentes aux demandeurs: quand et combien de vaccins pour eux? Il y a urgence", écrit de son côté sur twitter le sénateur socialiste Bernard Jomier.

"Où sont les vaccins?", interroge encore Act Up-Paris.

Des délais "pendant les premiers jours de la campagne"

La direction générale de la Santé (DGS) a reconnu mardi dans un communiqué que "compte tenu de la forte demande, des délais pour la prise de rendez-vous et l’injection peuvent être observés pendant les premiers jours de la campagne" et dans le même temps assuré "que l’ensemble des personnes concernées par les indications de la HAS pourront être vaccinées".

Les doses de vaccins contre la variole du singe ont commencé à arriver dans 70 centres de vaccination en France, avec une montée en charge dans les prochains jours, ont précisé mercredi les autorités de santé. Dans le détail, 7500 doses du stock national de vaccins contre la variole ont déjà été déstockées, a indiqué le docteur Clément Lazarus, de la Direction générale de la santé, lors d'une audition sur la variole du singe devant la commission des Affaires sociales du Sénat.

L'Agence régionale de Santé d'Île-de-France précisait déjà de son côté que "les vaccinations préventives s’ouvrent progressivement (dans la région), les structures désignées par l’ARS proposent la vaccination à leurs patients et ouvriront rapidement de nouveaux créneaux sur rendez-vous uniquement".

L'ARS ajoute également que "la priorité dans les services hospitaliers doit être donnée aux situations post-exposition", soit à ceux qui ont déjà été potentiellement exposés au virus.

"Pas la force de frappe d'un centre de vaccination"

Pour Benjamin Davido, infectiologue à l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine), ce n'est pas tant le nombre de vaccins que l'organisation qui est en cause dans les délais actuels. Une vaccination contre la variole du singe réclame au soignant une nouvelle procédure pour la traçabilité, qui "n'est pas encore automatisée comme pour le Covid-19", déplore l'infectiologue, qui salue toutefois l'ouverture de la vaccination à un public plus large.

Sans compter que le personnel des hôpitaux doit jongler avec les demandes habituelles ainsi que le coronavirus, et ne peut pas assurer autant de vaccination qu'il y a de demandes. Willy Rozenbaum critique ainsi "un manque de ressources humaines disponibles déjà débordées dans les centres".

"On a eu 20 doses cette semaine, mais on peut en recommander", assure Benjamin Davido. "Le problème, c'est qu'on n'a pas la force de frappe d'un centre de vaccination."

Lui souhaite que tous les outils mis en place pour simplifier la vaccination contre le coronavirus soient appliqués à la variole du singe. "Il nous faut un Vite Ma Dose", lance-t-il par exemple, tout en appelant à ouvrir des vaccinodromes pour vacciner en masse et rapidement.

"On a une population qui veut se vacciner, c'est une bonne nouvelle. Il faut que ce soit simple pour eux pour ne pas qu'ils se découragent et ne fassent par exemple qu'une dose sur les deux", appuie Benjamin Davido. "Il faut vacciner massivement pour que ce soit fini à la fin de l'été" et que la population à risque soit vaccinée à la rentrée.

Des centres en cours d'ouverture en régions

Pour l'instant, en-dehors de l'Île-de-France, les centres ouvrent petit à petit. "Pour des questions de logistique, aucun centre ne sera en mesure de réaliser des vaccinations de prévention avant le 18 juillet", prévient ainsi sur son site l'ARS Auvergne-Rhône-Alpes. L'ARS Hauts-de-France propose elle plusieurs sites pour se faire vacciner, et précise que cette liste "sera complétée au fil de l’eau, de nouveaux sites étant attendus dans les jours à venir".

Dans le Grand Est, "le centre de vaccination de Reims est ouvert et fonctionne les mardis et jeudis. Celui de Strasbourg est également opérationnel", déclare à BFMTV.com l'ARS. Pour le département de Meurthe-et-Moselle, "le centre sera ouvert à partir du 18 juillet."

"5000 doses sont déjà prévues la semaine prochaine et la semaine suivante, et on continuera comme cela en fonction des besoins des agences régionales de santé qui nous sont remontés (...) au fur et à mesure de l'ouverture des centres de vaccination", a précisé Clément Lazarus ce mercredi.

Jérôme Salomon avait prévenu la semaine dernière que la France serait en capacité de répondre "dans les prochaines semaines", aux besoins des centres, donc pas immédiatement après l'annonce. En attendant, les autorités ont décidé de mettre en place un numéro vert "Monkeypox Info service" (0801 90 80 69) accessible 8h à 23h et 7 jours/7 pour informer le public sur l'épidémie et la vaccination.

Salomé Vincendon
Salomé Vincendon Journaliste BFMTV