Vaccination dans les Landes: "forts soupçons" de sabotage antivax devant une vague de désistements

Ponctuellement, bien sûr, la chose est envisageable, voire incontournable. Une distraction, un impératif, un imprévu et c'est un engagement qui passe à l'as. Mais dans les Landes, depuis début août, ce sont 10 à 12% des rendez-vous pour une injection de vaccin contre le Covid-19 qui n'ont pas été honorés. L'antenne locale de France Bleu note que cette statistique représente concrètement une cinquantaine de désistements impromptus sur 250 à 500 créneaux réservés quotidiennement dans un centre de Mont-de-Marsan. La radio souligne même qu'à Saint-Séver, qui concentre moins de 5000 habitants, on a relevé une vingtaine de faux-bonds par jour sur 200 rendez-vous prévus et ce, tout au long du mois d'août.
Des chiffres qui interrogent les professionnels de santé landais et sur lesquels plane l'ombre d'une opération de militants antivax embarqués dans une mission sabotage rudimentaire mais concertée de la campagne d'inoculation.
Un rendez-vous pris par "Elton John"
Jeudi, l'une de nos équipes a pu constater que sur un seul centre de vaccination montois et en une seule matinée, on s'est fait poser 12 lapins. "Bien sûr, il y a de forts soupçons autour d'antivax", convient ce vendredi Benoît Elleboode, directeur de l'Agence régionale de Santé de Nouvelle-Aquitaine auprès de BFMTV: "Parce que quand 'Elton John' ne vient pas, c'est que le système a été abusé".
"Il y a des gens qui prennent des rendez-vous et qui sont peut-être antivax. Il y a eu des rendez-vous pris sur DoctoLib et qui ne correspondent pas à des vraies personnes à vacciner", confirme Didier Couteaud, directeur départemental landais de l'ARS à notre chaîne. "La deuxième chose, il y a tout simplement des oublis, et la troisième chose, c'est qu'aujourd'hui dans le département, et globalement en Nouvelle-Aquitaine, on est sur un niveau de vaccination élevé", enchaîne le même interlocuteur.
Certes, on compte, parmi les Landais éligibles à l'aiguille anti-virus, 80,9% de personnes ayant reçu au moins une première dose, contre 72,6% au plan national, et 77,2% de schémas vaccinaux complets, plus de dix points au-dessus du pourcentage général. Mais en quoi ce succès aurait-il un lien avec ces rendez-vous passés à la trappe? C'est simple, explique Benoît Elleboode, plus la vaccination progresse, plus elle laisse les soignants en présence d'une patientèle moins investie: "Il y a aussi des gens qui adhéraient moins au vaccin, qui ont pris des rendez-vous et pour lesquels, c'est moins important."
Retour de manivelle
Le responsable régional a encore d'autres pistes à présenter pour tenter de comprendre ce soudain absentéisme:
"On a aussi un autre phénomène très important: des gens qui ont pris rendez-vous mais sont tombés malades entre-temps! Et quand on attrape le Covid, il faut attendre deux mois pour faire la première injection."
"Il y a des gens qui ont pris rendez-vous mais qui entre-temps se sont fait vacciner dans un des dispositifs sans rendez-vous: en centres de vaccination, dans les centres commerciaux, ou auprès de leur médecin", remarque-t-il, continuant d'égréner: "On commence à voir des gens attendre le vaccin Sanofi. Ils pensent qu'il sera différent alors que c'est le même que les autres."
Quant à ceux qui feraient défaut à l'heure de la seconde piqûre, Benoît Elleboode y voit un retour de manivelle post-vacances: "Et puis dans les Landes, on a vacciné 200.000 vacanciers. Le rendez-vous de deuxième dose a été pris automatiquement, 21 jours après la première. Les vacanciers sont rentrés dans leur région d'origine et ne se rendent pas au rendez-vous".
Double parade
D'accord, mais aucun de ces facteurs n'éclaire la réaction de ceux qui manquent à l'appel le jour J, à l'instant T de leur injection. Car à chaque rendez-vous resté sans patient, le protocole est immuable. L'accueil appelle l'impoli qui ne s'est pas fait excuser. Or, quand l'interlocuteur n'objecte pas un oubli, le standard tombe invariablement sur une boîte vocale bien commode. Et en l'absence de moyen d'investigation et naturellement de coercition, il est difficile de faire la part de la bonne foi et des mauvaises intentions éventuelles.
Mais les antivax impliqués - s'il s'agit bien d'une tentative d'activistes - pourraient en être pour leurs frais, car les centres ont une double parade devant le risque de gaspis des doses. "Ce n'est pas évident mais une fois que la dose est prête, elle peut être conservée six heures. Ce qui fait qu'une dose préparée en fin de matinée sera utilisée en début d'après-midi. Donc on a cette variable d'ajustement. Et on a encore des gens qui viennent sans rendez-vous", fait ainsi valoir devant nos caméras Nathalie Darraillans, responsable du centre de vaccination de Mont-de-Marsan, que BFMTV a pu visiter.