La moitié des Français qui vont aux urgences patientent plus de 3 heures

Un service qui porte bien mal son nom: les "urgences", où les Français passent de plus en plus de temps, selon un rapport de la Drees publié ce mercredi 19 mars. En durée médiane, en 2023, la moitié des patients passaient cinq heures dans ce service, soit 45 minutes de plus qu'il y a dix ans.
Plus être précis, la Drees a enregistré le temps passé entre le moment où les patients sont enregistrés administrativement et le moment où ils sortent effectivement du service.
"On peut dire que les patients restent plus longtemps aux urgences en 2023 qu'en 2013. En 2013 la moitié des patients restaient plus de 2h15 aux urgences et c'est plus de 3 heures en 2023. Donc on a une augmentation assez nette de la durée du passage dans le même temps que le nombre de patients aussi a augmenté de manière assez importante", analyse auprès de BFMTV Elvire Demoly, chef de projet de l'enquête urgence à la Drees.
S'il s'agit d'une médiane, les temps peuvent être encore bien plus longs. Pour 15% des patients, soit plus d'une personne sur dix, la durée aux urgences est de "plus de 8 heures, contre 9% en 2013" selon cette étude.
Effet "embouteillage"
Comment expliquer cette envolée spectaculaire? Plusieurs facteurs sont avancés. D'un côté, une diminution de l'accès à l'offre de soin hors du recours aux urgences qui contraint les patients à passer les portes de ces services, alors que certains maux auraient pu être gérés en médecine de ville. Mais aussi un changement des profils des malades.
"Surtout il y a une évolution des patients qui sont aujourd'hui plus âgés, polypathologiques, qui ont plus besoin de soins d'hospitalisation et en 10 ans on a vu l'évolution de la démographie médicale de ces patients et l'impact des fermetures de lits avec un manque cruel de lit d'aval qui nous fait dire que c'est la maladie nosocomiale des urgences", souligne Louis Soulat, vice-président de SAMU-Urgences de France et responsable du SAMU et des urgences au CHU de Rennes.
La cheffe de projet à la Drees note également que, plus un service peut accueillir de monde, plus le temps d'attente s'accroît. "Quand on reçoit plus de patients on peut avoir plus un phénomène d'embouteillage, de patients nombreux à un moment donné dans le service qui font que la prise en charge prend un peu plus de temps en revanche", pointe-t-elle.
Des heures d'attente sur des brancards
Une partie de l'explication du temps d'attente aux urgences est aussi la difficulté à obtenir des lits pour hospitaliser les malades. "C'est vraiment notre priorité aujourd'hui: éviter que les patients restent sur des brancards pendant des heures et on sait que ce temps de passage aux urgences augmenté impacte fortement la mortalité des plus de 75 ans", explique le docteur Soulat.
Une étude française publiée en novembre 2023 nous apprenait par exemple qu'une nuit passée sur un brancard aux urgences augmente de 40% le risque de mortalité chez les plus de 75 ans. Selon cette étude de mars, la mortalité moyenne aux urgences est d'une personne sur mille (0,1%), des cas "rares".