Pénurie d'un médicament contre le cancer de la vessie: un patient témoigne

Des infirmiers à l'hôpital de Lille, le 2 avril 2013. (Photo d'illustration) - Philippe Huguen - AFP
"J'avais fait ma cinquième séance quand les infirmières m'ont dit: 'Pour la semaine prochaine, on vous avertira car ce n'est pas sûr qu'on ait les produits à vous injecter'." Jean-Marie Semet a un cancer de la vessie, pour lequel il a subi une opération le 27 février.
Après l'ablation d'une tumeur non-infiltrante, il a été décidé qu'il suive une chimiothérapie à titre préventif grâce à des instillations d'amétycine.
"J'étais juste à la limite de l'ablation de la vessie et de la prostate", explique à BFMTV.com ce patient suivi à Coquelles, dans le Pas-de-Calais.
Dans environ 20% des cas selon l'urologue François Desgrandchamps, ces tumeurs infiltrent le muscle de la vessie et sont des cas bien plus sérieux à traiter. Le cancer peut former des métastases et gagner le reste du corps.
"Je ne voudrais pas que ça empire"
D'où l'importance, via l'amétycine, d'éviter ou retarder au maximum le retour des tumeurs, même en surface.
"C'est pour ça que je prends ça très au sérieux, parce que quelque part je ne voudrais pas que ça empire que je sois obligé d'y arriver", appuie Jean-Marie Semet.
Problème: le principe actif est en rupture de stock depuis le 9 mai, sans alternative immédiate - outre une ablation de la vessie, que l'urologue François Desgrandchamps juge "disproportionnée". L'approvisionnement de l'amétycine fait régulièrement défaut.
"Depuis six semaines, je suis bloqué. Ils m'avaient prescrit huit séances en tout, j'en suis à cinq et j'attends désespérément", témoigne le patient soigné à Coquelles, dans le Pas-de-Calais.
Si des hôpitaux ont encore des stocks, certains comme celui de Calais les gardent pour leurs patients.
Des patients dans le flou
Jean-Marie Semet dit avoir envisagé de transférer son dossier, puis décidé d'attendre "en se disant que ça allait peut-être se calmer". Pourtant, depuis six semaines, aucune nouvelle, que ce soit sur la suite du protocole ou la remise sur le marché du médicament.
"A un moment donné, je téléphonais régulièrement aux infirmières, car d'habitude on doit faire une analyse d'urine avant l'instillation et leur communiquer le résultat. On a fini par me répondre: 'On vous a dit qu'on vous appellerait', donc je n'appelle plus", soupire-t-il.
Il a également tenté de contacter directement l'urologue qui le suit.
"La secrétaire nous a dit: 'C'est comme ça, de toute façon c'est fait à titre préventif, pas curatif, donc il n'y a pas de problème'".
"C'est quand même malheureux, une situation comme ça en France"
"Quelque part, c'est quand même un cancer, je pense que c'est quelque chose d'assez important pour que ce soit pris en compte", se défend le patient.
Depuis plusieurs semaines, il multiplie les messages sur les réseaux sociaux afin de "faire bouger les choses". Il a notamment tenté de contacter des députés pour qu'ils interpellent la ministre de la Santé à l'Assemblée, sans succès ni réponse.
"C'est quand même malheureux d'arriver à une situation comme ça en France. C'est quand même un pays dit développé. Quand on est concerné directement, c'est encore plus difficile", expose Jean-Marie Semet, qui souhaite simplement que "tous les malades puissent se soigner normalement".