Viande à la cantine: Barbara Pompili fustige un débat "préhistorique" et s'attire les foudre de LaREM

Alors qu'elle doit bientôt défendre son imposante loi "climat et résilience" en commission à l'Assemblée nationale, Barbara Pompili crée une faille à la fois au sein du gouvernement et de la majorité. En marge d'un déplacement en Charente-Maritime, la ministre de la Transition écologique a apporté sa pierre au débat déclenché par le maire écologiste de Lyon, lequel entend mettre en place un "menu unique sans viande" dans les cantines scolaires.
L'initiative de Grégory Doucet, censée permettre un meilleur respect du protocole sanitaire à l'école, a suscité l'ire de plusieurs membres de l'exécutif. Barbara Pompili, elle, "regrette beaucoup que sur ce sujet, on retombe dans un débat préhistorique (...) où l'on véhicule des clichés éculés, des clichés du type: l'alimentation végétarienne serait une alimentation déséquilibrée".
"On sait que la viande peut être remplacée par du poisson, des œufs, des légumineuses qui apportent toutes les protéines nécessaires. (...) On entend aussi que les enfants de milieux défavorisés mangeraient moins de viande que les autres. Il y a des études qui montrent l'inverse", a-t-elle insisté.
Bisbilles entre marcheurs
Ce faisant, Barbara Pompili ne fait rien de moins que de s'inscrire en faux contre ses collègues, et pas des moindres. Qu'il s'agisse du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, du ministre des Comptes publics Olivier Dussopt ou surtout celui de l'Agriculture, Julien Denormandie, tous sont montés au créneau ce week-end pour critiquer l'annonce de Gregory Doucet. Son prédécesseur, le marcheur Gérard Collomb, avait pourtant pris la même décision au printemps 2020, après la première vague épidémique.
"On ne peut pas comparer! On était juste à la sortie du confinement, dans la gestion de court terme. Aujourd'hui, on est dans une situation où l'on doit malheureusement vivre avec le virus. Et la solution serait de dire que l'on n'offre plus de viande à nos enfants dans les cantines?", a déclaré Julien Denormandie auprès du Parisien lundi.
Si les ministres se gardent bien de tancer Barbara Pompili, d'autres marcheurs ne s'en privent pas. À commencer par le député de la Creuse Jean-Baptiste Moreau, éleveur bovin habitué des joutes verbales, qui a tenu à rappeler sur Twitter que "des nutriments essentiels pour la croissance des enfants sont présents dans la viande".
Par ailleurs, il dénonce le choix du maire de Lyon "d'imposer dogmatiquement" son dispositif.
"Mais", ajoute-t-il en s'adressant à la ministre de la Transition écologique, "le pragmatisme comme l'amour de la science et la loyauté sont des concepts qui vous sont étrangers".
"Cohérence zéro!"
Dans la foulée, son collègue La République en marche Pierre Venteau, élu dans la Haute-Vienne, lui a emboîté le pas.
"Bannir la viande bovine c'est tuer les prairies permanentes: finis biodiversité, paysages et stockage de carbone. Cohérence zéro!", a-t-il tweeté.
S'agissant de la majorité, ces désaccords de fond n'occultent pas les bisbilles politiques internes. En l'espèce, celles-ci se jouent entre ce que l'on peut qualifier d'aile droite de LaREM et son aile gauche, dont l'une des composantes est En Commun, le petit parti créé à l'initiative de Hugues Renson et... Barbara Pompili.
Au gouvernement, les positions tranchées sont visiblement assumées jusqu'au bout. Sur Twitter, la ministre de la Transition écologique en a remis une couche lors de son déplacement à Saint-Denis-d'Oléron, publiant des photos où l'on peut voir "un menu végétarien équilibré et délicieux pour les enfants", écrit-elle non sans ironie.
Toujours dans Le Parisien, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal dénonce quant à lui l'écologie "anti-sociale" que prônent selon lui des édiles comme Grégory Doucet. "Le risque, c'est d'arriver à un modèle où toute une partie de la consommation est réservée à une élite", prévient-il. Julien Denormandie va plus loin encore, dénonçant encore ce mardi matin sur RTL une "écologie de l'entre-soi", qu'il juge contraire à celle que défend l'exécutif. "D'un point de vue social, c'est une honte", a-t-il insisté.
Pour autant, le ministre de l'Agriculture nie toute "cacophonie" au sein du gouvernement. "Barbara Pompili veut proposer des repas alternatifs, donner un choix", a distingué Julien Denormandie, conscient qu'il devra travailler de concert avec l'ancienne écologiste sur le projet de loi sur le climat.
Néanmoins, à quelques jours d'un examen législatif qui s'annonce âpre et complexe, en amont d'une campagne présidentielle où l'écologie sera un enjeu électoral majeur, de tels clivages sont loin d'être anodins.