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Suicide de Jean Germain: Bérégovoy et Salengro, d'autres destins tragiques

De gauche à droite : Pierre Bérégovoy, Jean Germain, et Roger Salengro.

De gauche à droite : Pierre Bérégovoy, Jean Germain, et Roger Salengro. - François Marit ; Alain Jocard – AFP ; montage BFMTV

Le suicide du sénateur socialiste Jean Germain rappelle les disparitions de Pierre Bérégovoy et de Roger Salengro, partis eux aussi car ils ne supportaient pas de voir leur honneur bafoué.

Ils ont brisé leur vie et leur carrière politique en se donnant la mort: avant Jean Germain, sénateur socialiste disparu tragiquement ce mardi en se tirant une balle avec un fusil de chasse, deux autres grands hommes politiques ont eux aussi connu des destins tragiques.

Pierre Bérégovoy, "livré aux chiens"

Le 1er mai 1993, il est près de 18 heures quand un homme, seul, sort un revolver de sa poche, le long du canal arboré de la Jonction, près de Nevers. La météo est mauvaise, et aucun promeneur ne s'est aventuré ce samedi-là sur les berges. L'homme pose le 357 Magnum sur sa tempe droite, et tire. Cet homme, c'est Pierre Bérégovoy.

Un mois plus tôt, il était encore à la tête de Matignon, sous la présidence de François Mitterrand. Chassé par la "vague bleue" aux législatives, Pierre Bérégovoy est un homme brisé, convaincu d'avoir joué un rôle prépondérant dans la défaite du camp socialiste, notamment à cause des révélations du Canard Enchaîné. Le journal a mis au jour un prêt sans intérêts octroyé sept ans plus tôt par un ami de François Mitterrand, lui-même mêlé à une affaire de fraude. Une infamie pour cet ex-Premier ministre, qui se présentait comme le chantre de la lutte contre la corruption.

"Toutes les explications du monde ne justifieront pas que l'on ait pu livrer aux chiens l'honneur d'un homme, et finalement sa vie!", lancera quelques jours plus tard François Mitterrand, la voix tremblante de colère, lors d'un éloge funèbre, rappelle Metronews. Longtemps, plusieurs versions de sa mort ont subsisté, certains restant persuadés qu'il s'agit d'un assassinat politique.

Roger Salengro, diffamé et éploré

Soixante plus tôt, un autre homme politique était parti, ne supportant plus l'opprobre. Le 17 novembre 1936, Roger Salengro, ministre de l'Intérieur dans le gouvernement de Léon Blum, rentre chez lui, à Lille. Dans sa cuisine, il allume le gaz, et se laisse mourir asphyxié. On retrouvera son corps et, sur la table, des exemplaires d'un journal d'extrême droite qui l'avait diffamé, ainsi que deux lettres d'explications.

"S'ils n'ont pas réussi à me déshonorer, du moins porteront-ils la responsabilité de ma mort", écrit, en substance, celui qui a aussi dirigé la ville de Lille. Roger Salengro fait référence sans ambiguïté à la très violente campagne de diffamation qu'il venait de subir, des journalistes d'extrême droite l'ayant accusé, à tort, d'avoir déserté son pays pendant la guerre de 14-18. Le chagrin de la perte de sa femme, décédée dix-huit mois plus tôt, aurait fini de le convaincre de se tuer, d'après ses explications post-mortem.

Alexandra Gonzalez