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Plan de déconfinement: la stratégie de Matignon pour éviter les fuites

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Pour couper court à toute communication hasardeuse autour du plan de déconfinement, l'exécutif a décidé d'avancer sa présentation à ce mardi 15h. D'ici là, les ministres sont sommés de ne pas se prononcer sur l'"après-11 mai".

Port du masque obligatoire? Réouverture des écoles? Déplacements inter-régionaux autorisés? Le Premier ministre doit répondre ce mardi après-midi à ces interrogations en présentant devant les députés, à 15h, le plan de déconfinement. Mais d’ici là, pas question de laisser fuiter quelque information que ce soit. 

"Trop de bavards, trop de bordel", commente un ministre dans les colonnes de Libération.

En effet, en fin de semaine dernière, des rumeurs ont fuité à l’issue de la réunion de travail entre le "monsieur déconfinement" du gouvernement Jean Castex, la ministre de la Cohésion des territoires Jacqueline Gourault, et les associations d’élus locaux, la transformant en "annonce du plan" de sortie du confinement. Il en est par exemple ressorti que le déconfinement ne se ferait pas par région, avant que l’Elysée ne retoque cette information en précisant qu’il ne s’agissait encore que d’une "doctrine qui n’est pas arrêtée".

"Que rien ne sorte"

Echaudé par ces ébruitements, l’exécutif a cette fois-ci décidé de serrer la vis de la communication. A Matignon, l’heure est donc au verrouillage pour éviter les fuites. La dernière réunion pour peaufiner le périlleux plan de déconfinement s’est déroulée lundi soir dans une ambiance de conclave. Durant six heures, Emmanuel Macron, Edouard Philippe, les ministres de l’Education et de la Santé, et quelques conseillers ont échangé à huis clos: pas de plateau-repas, pas de pause, aucune entrée ni sortie. 

"Même nous, on ne saura rien avant mardi 15h", glisse à BFMTV un membre du gouvernement. Et un conseiller ministériel d’ajouter: "Si on veut reprendre le récit du déconfinement, il faut que rien ne sorte avant mardi 15h."

Un repli qui en dit long sur les difficultés à gérer la parole quand tous les ministères sont concernés par le plan de déconfinement et que chacun y va de son commentaire. Ainsi, le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a détaillé les modalités de la rentrée scolaire devant la commission des Affaires culturelles et de l’Education, "alors que rien n’était arbitré", il ne s’agissait que de pistes évoquées la veille lors d’une réunion avec le premier ministre, rapporte Le Figaro

"Dès qu’un ministre émet la moindre hypothèse, ça devient une certitude", remarque dans l’Opinion un membre du gouvernement. 

Serrer la vis

Ces multiples couacs ont valu à certains ministres un recadrage les priant "d’arrêter de s’exprimer. Tous ont l’obligation de ne pas parler de 'l’après'", d’arrêter "de penser à voix haute sur le déconfinement", selon les confidences de l’entourage d’Edouard Philippe au Figaro. Matignon s’impose donc comme le métronome de la communication et a décidé, pour contrer toute fuite supplémentaire, d’accélérer et de présenter le plan ce mardi, quitte à prendre de court sa propre majorité. 

"On ne peut plus perdre notre temps en palabres", ajoute ce même membre du gouvernement.

A 15h, le plan de déconfinement sera suivi d’un vote dans la foulée. C'est un véritable exercice d'équilibriste auquel le gouvernement doit se livrer alors que le pays est confiné depuis six semaines pour freiner la propagation du nouveau coronavirus qui a fait, depuis le 1er mars, plus de 23.000 morts en France. 

Elisa Bertholomey et Ambre Lepoivre