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"Un 49.3 déguisé": pourquoi la droite et les macronistes ont rejeté leur propre texte sur l'agriculture

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Les députés ont voté la motion de rejet sur la proposition de loi agricole dite Duplomb. Le rapporteur du texte Julien Dive, également à l'initiative de cette motion de rejet, a dénoncé l'"obstruction" des députés écologistes et de la France insoumise. Près de 3.500 amendements avaient été déposés.

Déposée par le bloc central, et finalement rejetée par celui-ci. La proposition de loi agricole Duplomb, censée rétablir notamment l'introduction de pesticides néonicotinoïdes, va passer en commission mixte paritaire après le vote d'une motion de rejet soutenue par le bloc central et les députés LR. Celle-ci a été adoptée par 274 voix contre 121. Le député Julien Dive (Droite Républicaine), à l'initiative de cette motion de rejet, est pourtant le rapporteur de ce texte. Comment expliquer alors ce revirement?

La proposition de loi Duplomb prévoit une dérogation "pour une durée de trois ans" de l'interdiction de produits phytopharmaceutiques "contenant une ou plusieurs substances actives de la famille des néonicotinoïdes". En l'espèce, il s'agirait de réintroduire l'acétamipride en France, interdit depuis 2018.

Samedi dernier, Julien Dive alerte sur les "3.500 amendements" déposés pour la proposition de loi Duplomb, un "mur de Berlin que La France insoumise et les Écologistes ont dressé pour empêcher l'examen d'un texte pourtant attendu par le monde agricole".

3.455 amendements déposés

Selon le site de l'Assemblée nationale, 3.455 amendements avait été déposés pour cette proposition de loi, la majorité étant écrits par des députés écologistes et par des députés de la France insoumise.

La cheffe des députés Écologistes Cyrielle Chatelain, dans un message publié sur le réseau social Bluesky a dénoncé un texte qui est "un danger pour la santé publique".

"Ni un retour en arrière en termes de santé publique et de protection de l’environnement, ni exposer de nouveau à des produits toxiques celles et ceux qui travaillent la terre, n’est acceptable", ajoute-t-elle, accusant le gouvernement de "lâcheté" en "sacrifi(ant) notre santé au lieu de répondre aux problématiques des agriculteurs".

"Le spectacle que donnent certains groupes politiques, LFI et les Écolos est absolument lamentable", avait dénoncé plus tôt ce lundi la ministre de l'Agriculture Annie Genevard, évoquant "des amendements humiliants pour les questions agricoles et les agriculteurs".

"Amender, ce n'est pas enliser le débat", a-t-elle a poursuivi. "Ce n'est pas possible d'accepter un tel comportement."

"Les députés RN feront tout pour que la loi Duplomb, facilitant l’activité des agriculteurs, soit adoptée!", avait prévenu la cheffe des députés RN Marine Le Pen, dénonçant "le sabotage législatif mis en œuvre par l’extrême-gauche (...) une attaque directe à notre souveraineté alimentaire.

Le texte sera débattu par une CMP favorable au bloc central

Une "obstruction massive, méthodique et manifeste" qui a motivé le député à déposer cette motion de rejet préalable, "devenue une nécessité imposée par les circonstances". La manœuvre de la motion de rejet vise donc à contourner "l'obstruction" dénoncée.

"Nous choisissons la responsabilité", a poursuivi Julien Dive, se portant "garant de défendre lors de la commission mixte paritaire les amendements issus de notre travail en commission (...) ce texte n'est pas figé".

Une manœuvre qui devrait en toute logique profiter au bloc central et à la droite puisque le texte n'est par conséquent pas débattu à l'Assemblée nationale et est directement envoyé en commission mixte paritaire pour tenter de dégager un compromis. L'instance est composée de sept députés, mais aussi de sept sénateurs, où la droite et le centre sont majoritaires.

"49.3 parlementaire"

"On va essayer de déposer une motion de censure" contre le gouvernement Bayrou, a déclaré devant des journalistes la cheffe du groupe insoumis Mathilde Panot, dénonçant un "49.3 déguisé".

"Le comble, les macronistes inventent le 49.3 parlementaire", a écrit Jean-Luc Mélenchon sur X peu avant le vote de cette motion de rejet "pour faire adopter sans débat une loi qui va inonder vos assiettes de pesticides (...) La France à la dérive."

Le patron des députés Modem Marc Fesneau avait annoncé que son groupe parlementaire voterait la motion de rejet mais qu'elle "ne vaut pas quitus pour le texte", demandant "des bougés en CMP".

Hugues Garnier avec AFP Journaliste BFMTV