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Parlement

Audition de Cahuzac: ce que les députés vont lui demander

Les mensonges de Jérôme Cahuzac ont conduit les députés à créer une commission pour comprendre l'affaire.

Les mensonges de Jérôme Cahuzac ont conduit les députés à créer une commission pour comprendre l'affaire. - -

Jérôme Cahuzac va être réentendu ce mardi par la commission d'enquête parlementaire, qui veut notamment l'interroger sur une réunion secrète à l’Élysée dont il n'avait pas parlé la première fois.

Il n'a manifestement pas tout dit la première fois. Mardi après-midi, l'ancien ministre du Budget Jérôme Cahuzac sera de nouveau entendu par la commission d'enquête parlementaire, qui s'intéresse de près au rôle du gouvernement et des services de l'Etat dans l'affaire Cahuzac. Explications.

> Des failles dans la "Muraille de Chine"?

Le 10 décembre, cinq jours après les révélations de Médiapart sur l'existence d'un compte en Suisse, Jérôme Cahuzac signe une note le déchargeant de son propre dossier fiscal, et accepte que l'affaire soit confiée à Pierre Moscovici, ministre de l'Economie.

L'opération "Muraille de Chine" entre alors en action. Il s'agit d'ériger un "mur" autour de Jérôme Cahuzac, afin qu'il soit exclu des décisions prises après le scandale, et qu'aucun élement de l'administration fiscale le concernant ne lui soit transmis.

Lors de son audition devant la commission parlementaire, Pierre Moscovici l'a assuré: la "Muraille de Chine a parfaitement fonctionné". Pourtant, dans un ouvrage paru le 4 juillet, Jérôme Cahuzac les yeux dans les yeux, la journaliste Charlotte Chaffanjon a révélé une possible faille dans ce mur: une réunion confidentielle.

> Une réunion secrète à quatre

Le 16 janvier, soit bien après le début de l'opération "Muraille de Chine", une réunion s'est tenue dans une pièce attenante à la salle du Conseil des ministres.

Durant cette rencontre, le ministre de l'Economie Pierre Moscovici a informé le Premier ministre Jean-Marc Ayrault et le chef de l'Etat François Hollande de la possibilité d'interroger la Suisse sur l'existence ou non d'un compte dans ce pays. Ce jour-là, Jérôme Cahuzac assiste à la réunion.

Devant la commission d'enquête, Pierre Moscovici a confirmé les faits, déclenchant un tollé de certains députés. "Cela ne vous choque pas que la personne concernée soit associée à la procédure?", a lancé le président de la commission Charles de Courson. "Le mot associé est impropre", a rétorqué Pierre Moscovici. "Il a été informé sans que son avis n'ait été demandé."

> Cahuzac a-t-il menti?

Lorsqu'il a été auditionné, le 26 juin dernier, Jérôme Cahuzac a été interrogé sur la décision de recourir à une procédure d'entraide administrative avec la Suisse. Sa réponse a été très claire: "M. Pierre Moscovici ne m'a jamais informé de cette procédure".

Un point crucial que vont donc soulever les députés lors d'une audition très attendue. Car si l'intéressé a menti sous serment, les conséquences judiciaires pourraient être alourdies pour lui.

> "La déception immense" de sa conseillère

La liste des gens qui sont passés sur le gril des questions de la commission d'enquête est longue. Mardi matin, peu avant Jérôme Cahuzac, Marion Bougeard, sa conseillère chargée des relations avec la presse, s'est prêtée à l'exercice.

Elle a confié avoir cru jusqu'à ses aveux du 2 avril Jérôme Cahuzac. Elle n'a jamais cité son nom, l'appelant "le ministre pour lequel je travaillais" ou "cet homme". Elle a évoqué avec de légers sanglots dans la voix "la déception immense, intense, la souffrance et la trahison" ressenties par elle et d'autres collaborateurs du ministre.

Mercredi, l'ancien juge anti-terroriste Jean-Louis Bruguière sera entendu pour la seconde fois lui aussi. Lors de sa première audition le 19 juin, Jean-Louis Bruguière avait affirmé qu'il n'avait jamais utilisé l'enregistrement audio sur un compte suisse de Jérôme Cahuzac, contredisant ainsi Michel Gonelle et irritant plusieurs députés.

Des détectives privés seront également auditionnés dans les prochains jours. La commission rendra ses conclusions et ses recommandations à l'automne.

> Exilé en Corse

Jérôme Cahuzac, contacté par Europe 1, a fait comprendre qu'il se serait bien passé de cette nouvelle convocation devant ses anciens homologues. "Ca va, ça va. Je n'ai pas le choix. Je répondrai, à disposition de la commission", a-t-il lâché d'une voix laconique.

Selon la radio, il séjourne depuis plusieurs semaines en Corse, où il tente, selon ses proches, de se faire oublier. L'hypothétique retour en politique semble bel et bien appartenir au passé.

Alexandra Gonzalez