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TOUT COMPRENDRE - Qu'est-il reproché à Marlène Schiappa à propos du fonds Marianne?

Marlène Schiappa à l'Élysée, le 31 août 2022

Marlène Schiappa à l'Élysée, le 31 août 2022 - Ludovic MARIN - AFP

La secrétaire d'État a lancé un fonds destiné à lutter contre le séparatisme après la mort de Samuel Paty en 2021. Des révélations indiquent cependant que l'argent alloué aurait pu en partie alimenter des proches de l'ex-ministre.

Le fonds Marianne a-t-il alimenté des proches de Marlène Schiappa? Des révélations de France 2 et de Marianne, datées du 29 mars, pointent du doigt l'utilisation potentiellement douteuse de subventions destinées à lutter contre le séparatisme. La secrétaire d'État à l'Économie sociale et solidaire réagit ce vendredi pour la première fois et dément toute accusation de favoritisme.

• Qu'est-ce que le fonds Marianne?

Il s'agit d'un fonds lancé par Marlène Schiappa, alors ministre déléguée à la Citoyenneté, en avril 2021, après l'assassinat du professeur d'histoire-géographie Samuel Paty, décapité après avoir montré des caricatures de Mahomet à ses élèves.

Objectif: "financer des personnes et associations qui vont porter des discours pour promouvoir les valeurs de la République et pour lutter contre les discours séparatistes notamment sur les réseaux sociaux et plateformes en ligne", annonce Marlène Schiappa sur BFMTV. L'organisation se voit dotée d'une somme de 2,5 millions d'euros et 17 structures sont désignées pour en bénéficier.

• Pourquoi l'argent alloué pose-t-il question?

Parmi les associations choisies pour bénéficier des fonds, l'une d'elles pose question: l'Union des sociétés d'éducation physique et de préparation au service militaire (USEPPM).

En effet, cette structure a reçu une somme importante grâce au fonds Marianne, 355.000 euros, pour des résultats mitigés. L'argent alloué était notamment destiné à financer un site Internet et des publications sur les réseaux sociaux, mais ces dernières n'excèdent cependant que rarement plus de 50 vues, un chiffre très faible.

Par ailleurs, 120.000 euros, sur les 355.000 reçus par l'association, ont permis de payer les salaires de deux responsables de l'USEPPM. L'un d'eux, Mohamed Sifaoui, est directeur de la communication du club de foot le SCO d'Angers, mais aussi journaliste et proche de Christian Gravel, lui-même chargé de chapeauter le fonds Marianne.

• Qu'est-il reproché à Marlène Schiappa?

Depuis ces révélations, la secrétaire d'État est soupçonnée d'avoir orchestré une potentielle manoeuvre frauduleuse. Plus précisément, Mohamed Sifaoui pourrait avoir bénéficié de subventions publiques et s'être enrichi grâce à sa proximité avec Christian Gravel, proche de Manuel Valls et ex-conseiller en communication de François Hollande.

Le secrétariat d'État à la Citoyenneté a indiqué le 29 mars à l'AFP avoir saisi l'inspection générale de l'administration d'un audit sur la question. Un signalement au titre de l'article 40 du Code de procédure pénale de Christian Gravel, président du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) est aussi en cours d'analyse, selon le parquet de Paris.

• Que répondent les personnes intéressées?

Marlène Schiappa dément tout favoritisme dans le choix des associations retenues pour bénéficier du fonds Marianne ce vendredi, dans un communiqué publié sur Twitter.

"Affirmer à tort qu'il s'agissait d'une décision ad hominem de Marlène Schiappa est totalement faux et démenti par la procédure, tout comme il est totalement faux de prétendre qu'il s'agirait d'amis de la ministre", affirme le communiqué.

"Ces allusions sont sans aucun fondement", martèle-t-il encore.

Mohamed Sifaoui assure de son côté lundi sur Twitter qu'il prévoit de "lancer des procédures judiciaires" visant "tout ceux qui (le) diffament". Il précise également mettre toutes "informations et documents utiles et nécessaires pour rétablir la vérité" à la disposition de la justice.

• Des élus de gauche accusent Schiappa d'avoir voulu faire "diversion"

Plusieurs élus de la Nupes se sont interrogés sur le choix de la secrétaire d'État de donner une interview au magazine Playboy début avril. L'interview, largement critiquée par les oppositions mais aussi au sein du gouvernement, est parue peu après les révélations sur le fonds Marianne.

"(Macron) lance toutes sortes de trucs de diversion", avait estimé Jean-Luc Mélenchon le 2 avril sur France 3. "Marlène Schiappa vient dans ce journal, c'est une provoc'", avait-il notamment dénoncé.

"C'est une tentative désespérée et pathétique de diversion", avait également accusé la députée Nupes Aurélie Trouvé sur BFMTV, quand la députée Nupes Manon Aubry avait déploré une "opération de diversion" sur Twitter.

La famille de Samuel Paty s'est de son côté dite mardi "heurtée" par les révélations. "Le nom de Samuel Paty ne peut en aucun cas et en aucune manière être l'instrument de tels agissements", souligne-t-elle dans un communiqué.

Vincent Vantighem et Juliette Desmonceaux