Pas de vote pour, menace de censure, contre-projet: le RN place ses pions sur le budget

Échange entre les députés RN Jean-Philippe Tanguy et Marine Le Pen à l'Assemblée nationale le 14 novembre 2023 - LUDOVIC MARIN / AFP
Une évidence officialisée par Jordan Bardella ce mercredi 16 octobre: "le Rassemblement national ne votera pas le budget". La raison évoquée par le président du parti d'extrême droite est très simple. Ce texte "détermine quels sont les partis d'opposition ou de la majorité", selon qu'ils votent pour ou contre.
Rien de surprenant donc dans cette décision du parti à la flamme, qui ne souhaite, surtout pas, s'inscrire aux côtés du gouvernement de Michel Barnier, appuyé par une alliance entre Les Républicains et le camp présidentiel.
Préparer l'alternance
Au contraire, le mouvement de Marine Le Pen veut se préparer à l'alternance avant la prochaine présidentielle, en 2027. "Nous sommes le principal parti d'opposition", martelait encore le président délégué de son groupe de députés, Jean-Philippe Tanguy, dans Le Figaro ce mardi 15 octobre, au moment d'évoquer le budget.
Le RN, une opposition au gouvernement? Plutôt un "soutien sans participation", renvoie la gauche, alors que les lepennistes avaient promis de ne pas censurer "a priori" Michel Barnier, contrairement à d'autres Premiers ministrables potentiels, tels Bernard Cazeneuve et Xavier Bertrand, jouant un rôle majeur dans la nomination du négociateur de Brexit.
"Plus rien ne peut se faire sans nous"
Promesse tenue, la motion défendue par la gauche mardi dernier n'a pas été votée par l'extrême droite. Quelques jours avant, lors de la déclaration de politique générale de Michel Barnier, Marine Le Pen saluait le "sens de la courtoisie" du chef du gouvernement, qui promet de considérer toutes les formations politiques.
Et même plus, ce dernier allant jusqu'à recadrer son ministre de l'Économie Antoine Armand, après qu'il a exclu le RN de "l'arc républicain". Tout en appelant au passage Marine Le Pen pour la rassurer.
En résumé: l'extrême droite pèse lourdement sur le gouvernement et joue de son rôle d'arbitre sur celui-ci. "Plus rien ne peut se faire sans nous au Parlement", jubilait encore Jordan Bardella ce lundi sur BFMTV, au lendemain de l'annonce d'une nouvelle loi immigration pour début 2025. Une ligne rouge fixée par Marine Le Pen, qui appelait à reprendre à minima les mesures de la loi de 2023 censurées par le Conseil constitutionnel.
Contre-budget et menace de censure
Sur le budget, le RN a également donné un point au gouvernement, après qu'il a finalement décidé de geler les crédits consacrés à l'Aide médicale d'État (AME) pour les sans papiers, alors qu'il prévoyait initialement des les augmenter.
Si sa position de ne pas voter le texte était attendue, le parti d'extrême droite n'a pas encore précisé s'il voterait contre ou s'il s'abstiendrait. Ce qui est fondamental dans la perspective de potentiels 49.3, Michel Barnier s'appuyant actuellement sur une majorité très relative à l'Assemblée nationale.
En attendant la suite de l'histoire, le RN place ses pions. Il a présenté son contre-budget ce mercredi par la voie de Jean-Philippe Tanguy, alors que Marine Le Pen devait se rendre au tribunal correctionnel de Paris pour l'affaire des soupçons d'emplois fictifs à laquelle est confrontée le parti.
Dénonçant un "mauvais budget", le député de la Somme a appelé à chercher des recettes sur l'appareil de l’État, l'immigration ou les rachats d'actions, et à renoncer à des hausses d'impôts et de cotisations patronales.
Là encore, une menace décidément bien pratique, est à l'ordre du jour. "Sans changement fondamental, la question de la censure se posera", a averti Jean-Philippe Tanguy dans Le Figaro.