La déchéance de nationalité zappée du projet de réforme constitutionnelle

Le gouvernement présente mercredi son projet de réforme constitutionnelle qui prévoit l'inscription dans la loi fondamentale de l'état d'urgence après les attentats qui ont frappé Paris et Saint-Denis le 13 novembre dernier. Mais ce texte, contrairement à celui soumis à l'examen du Conseil d'Etat et aux annonces faites par François Hollande face au Congrès, ne devrait pas comporter la déchéance de nationalité des binationaux, très décriée à gauche.
Emprunté à la droite et à l'extrême droite, le souhait du gouvernement d'inscrire dans la constitution la possibilité de déchoir les binationaux condamnés pour acte de terrorisme, y compris ceux nés en France, a suscité un concert de critiques, du premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis à la maire de Paris Anne Hidalgo en passant par des députés PS, frondeurs ou non.
"Je n'ai jamais pensé que cette question était essentielle dans la lutte contre le terrorisme", a ajouté lundi le patron des députés PS à l'Assemblée nationale, Bruno Le Roux. "Je pense que cela soulève trop de débats annexes à cette lutte contre le terrorisme. (...) Je laisse le président de la République en prendre la décision mais ce n'est pas l'élément central de la lutte contre le terrorisme", a-t-il précisé.
Rétropédaler en douceur
Selon Europe 1 et Libération lundi, la question au sein de l'exécutif est désormais de savoir comme faire passer en douceur ce rétropédalage que ne manquera pas de souligner l'opposition. Dès vendredi, les premiers signes d'un probable recul sur cette décision prise par François Hollande, Manuel Valls et Bernard Cazeneuve au lendemain des attaques, étaient apparus.
Le Premier ministre Manuel Valls avait souligné le caractère "symbolique" de la mesure, qui n'est "pas une arme pour lutter contre le terrorisme". Or les mesures prises pour lutter contre le terrorisme doivent être "efficaces", avait-il souligné dans la droite ligne de l'avis rendu par le Conseil d'Etat qui jugeait son effet "peu dissuasif sur les personnes décidées à commettre" des attentats.
La réforme compromise?
Interrogé le même jour sur l'opportunité de la mesure, François Hollande n'avait pas répondu, mais rappelé que le "seul objet" du projet de révision était "de pouvoir être efficace dans la lutte contre le terrorisme".
Problème, se fâcher avec son camp ou avec l'opposition pourraient mettre à mal l'ensemble du projet de réforme puisque une modification de la Constitution nécessite l'approbation des 3/5e des parlementaires.
Le président de la République aurait aussi été convaincu de revenir en arrière par le sociologue Patrick Weil, affirme Libération. "Il n'y a pas besoin de mettre cela dans la constitution", estime l'auteur du Sens de la République, interrogé par RMC. "La loi permet de faire des choses! On passe par la loi, comme on a toujours fait. Si vous mettez dans la constitution une distinction entre Français, vous divisez tous les Français". Un argument qui a dû finir de convaincre François Hollande.